Le 23 juin 2015
Retour sur le coffret événement dédié à Kenneth Anger, édité par Potemkine. Du lourd...
- Réalisateur : Kenneth Anger
- Editeur vidéo : Potemkine
- Durée : 159mn
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– Années de production des 9 films : 1947 - 1981
– Sortie DVD : le 23 juin 2015
– Projection événement de Inauguration of the Pleasure Dome en version triptyque inédite, le jeudi 25 juin 2015 à 20:00, au Max Linder Panorama
24, boulevard Poissonnière - 75009 Paris
La première partie du test du coffret
Rabbit’s moon 1950 - 1979
Ce film fut tourné en 1950, modifié à plusieurs reprises, remonté, raccourci et finalisé en 1979. Anger fait ici appel aux signes des folklores et des mythologies Aztèque et Japonaise et filme, via un filtre bleu pour figurer la nuit, l’histoire d’un Pierrot-le-clown qui sautille et essaie d’attraper un lapin. Il rencontrera un autre clown-Arlequin qui lui présentera sa Colombine, dans une seconde partie qui rappelle l’exubérance de la commedia dell’ arte.
Toujours très proche des codes du cinéma muet (époque Méliès), le film, un peu grimaçant, vaut surtout par la belle tenue de ses cadres et ses inserts coupants sur les corps de ses 3 protagonistes.
Puce moment 1949
Cette fantaisie inachevée, tournée rapidement en 1949, nous montre une femme glamour prise au piège de ses apparats (robes et chiens). Une douleur diffuse parcourt le métrage, et on ne peut s’empêcher de se rappeler que le jeune Kenneth a été élevé seul par sa mère et sa grand-mère. Comme souvent chez Anger, le décor est traditionnel, classique ; ici une villa Hollywoodienne où Anger aurait vécu jeune. La villa et ses alentours sont sublimés par des couleurs saturées, qui inspireront plus tard le Wong Kar Wai de Nos Années sauvages ou In the Mood for love. On pense même furtivement au Lynch de Mullholland Drive par cette manière qu’a Anger de légèrement accélérer le défilement de la pellicule pour accentuer et hystériser les expressions des visages féminins.
Notons enfin qu’au départ la musique devait être un morceau classique d’un opéra de Verdi et qu’Anger a finalement décidé de retravailler la bande son du film dans les années 60 avec un titre psychédélique de Jonathan Halper, ce qui donne une coloration et une tonalité plus kitsch à ces mêmes images ; comme si ces images étaient suffisamment fortes et intemporelles pour traverser les époques et refléter le monde tel qu’il est au moment où le spectateur regarde le film.
Fireworks 1947
Ce premier film de Kenneth Anger débute par un très beau plan inaugural d’une torche éteinte dans la mer qui symbolise le film et l’œuvre à venir. Dans tous ses films en effet, Anger n’aura de cesse de souffler le chaud et le froid, de fondre des éléments triviaux dans un décor classique ou familier. Dans ce film, baigné par une musique patriotique, il multiplie les symboles phalliques, détourne l’imaginaire du marin et du soldat pour célébrer et glorifier la beauté du corps masculin. En filmant ces corps dans leur plus simple expression, il leur ôte leur potentiel de destruction et transforme, au moyen d’un montage coulé et câlin, ces loups en agneaux. Voir ce plan assez drôle où l’on utilise le feu et les brindilles d’une cheminée pour allumer une clope à son amoureux ; ou ces plans légèrement décadrés, filmés à hauteur de sexe, de main ou de torse qui déconstruisent l’imagerie guerrière et grotesque des parades militaires.
Le film, libre et hétérogène, n’hésite pas, après une entrée en matière assez douce, à faire jaillir la violence et le sang du nez du héros, telle une explosion de foutre ; avant de passer à une séquence assez drolatique où le héros allume une fusée de feu d’artifice avec son sexe et utilise un sapin de Noël pour ‘menacer’ sexuellement son amant. Autant de signes dévoyés de leur fonction symbolique traditionnelle et utilisés à des fins plus ‘coquines’. La fin du film, de nouveau apaisée, montre les corps des 2 amants enfin réunis, paisibles, se réveillant l’un près de l’autre, les yeux encore illuminés du rêve qu’ils viennent de faire ; le rêve d’un monde muet et charnel, d’une époque où le cinéma était subversif, sans dialogues et où le sens passait par les images et le montage.
Coffret consistant qui se présente sous la forme de 2 DVD (l’un avec les films l’autre avec les bonus), avec un livret riche en documents. 88 pages reprenant des extraits du livre Éloges de Kenneth Anger de Olivier Assayas, et le storyboard de Puce Moment, dessiné par Kenneth Anger lui-même.
Les suppléments :
L’éditeur a fait un travail remarquable et très complet sur les bonus. A retenir notamment un entretien passionnant entre Kenneth Anger et Gaspar Noé à la Cinémathèque et un échange entre Jean-Baptste Thoret et Olivier Assayas. Un CD est inclus, reprenant la B.O de Lucifer Rising, composée par Bobby Beausoleil : collector !
– River of Anger, un film d’Antoine Barraud, 38’
– Les Sortilèges de Kenneth Anger, un film de Pip Chodorov, 15’
– Discussion entre Olivier Assayas et Jean-Baptiste Thoret autour de Kenneth Anger, 36’
– Dialogue entre Kenneth Anger et Gaspar Noé à la Cinémathèque, 35’
L’image :
L’image et les formats d’époque sont parfaitement respectés et les couleurs si particulières de films comme Puce Moment ou Kustom Car Commandos ressortent particulièrement bien.
Le son :
La musique jouant un rôle tellement important dans cette oeuvre qui comporte peu de sons, et aucun dialogue (!), il est appréciable qu’un tel soin ait été apporté au nettoyage des bandes et à leur restitution dans leur éclat d’origine. On se sent vraiment transporté à l’époque du psychédelisme des années 70/80 sur Lucifer Rising ou dans les Fifities avec Scorpio Rising.
Galerie Photos
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