Love is strange
Le 16 août 2012
Un beau film d’amour qui, s’il s’essouffle un peu en cours de route, emporte l’adhésion par sa bouleversante sincérité.


- Réalisateur : Ira Sachs
- Acteurs : Thure Lindhardt, Zachary Booth, Marilyn Neimark, Julianne Nicholson
- Genre : Drame, LGBTQIA+
- Nationalité : Américain
- Durée : 1h41mn
- Titre original : Keep the lights on
- Date de sortie : 22 août 2012

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Un beau film d’amour qui, s’il s’essouffle un peu en cours de route, emporte l’adhésion par sa bouleversante sincérité.
L’argument : Erik est réalisateur de documentaire. Paul est avocat. Tous deux sont homosexuels, l’un assumant, l’autre pas. Ils se rencontrent un soir pour une aventure sans lendemain mais, très vite, décident de se revoir. À mesure que se développe leur relation, chacun, de son côté, continue de combattre ses propres pulsions et addictions.
Notre avis : Contrairement à ce que le synopsis peut laisser croire, l’homosexualité n’est pas le sujet central de Keep the Lights On. C’est avant tout un film sur le sentiment amoureux, dans tout ce qu’il a de plus noble et de plus irraisonné. Ira Sachs, le metteur en scène, s’est inspiré de son parcours personnel pour livrer au spectateur une histoire à la portée universelle. Narrant la rencontre entre Erik et Paul, deux jeunes hommes perdus dans la jungle New Yorkaise, puis leur liaison passionnée et conflictuelle s’étalant sur une période de dix ans, le film fait écho à la propre relation qu’a entretenue Sachs avec Bill Clegg, agent littéraire dont la forte dépendance au crack a finalement eu raison de la stabilité du couple.
Construit sur des bases autobiographiques fortes, l’oeuvre est constamment habitée par cette envie viscérale qu’éprouve l’auteur à se raconter. Cette dernière se ressent à chaque image. Adoptant le point de vue d’Erik/Ira, la mise en scène, discrète et élégante, épouse à merveille les ressentis du personnage principal. Par des jeux pertinents de cadres et de montage, Sachs nous livre une succession de séquences puissantes, où un simple changement d’axe de caméra suffit à retranscrire les expériences émotionnelles des protagonistes (la scène de la découverte du crack est à ce titre exemplaire). Enfin, la direction d’acteurs, irréprochable, permet notamment à l’excellent Thure Lindhardt de livrer une prestation bluffante. La première partie du métrage est ainsi irréprochable, tant l’interprétation et la réalisation transcendent un scénario dont on ne peut nier la sincérité originelle.
Malheureusement, le film s’essouffle progressivement, la faute à un déséquilibre certain entre le temps consacré à certaines périodes de la vie d’Erik et l’intérêt de ces dernières pour le spectateur. Si les situations s’enchainent parfaitement lors de la première heure, alternant des noeuds narratifs toujours indispensables avec des séquences contemplatives permettant à l’émotion de naître à l’image, le script s’attarde par la suite bien trop longtemps sur la séparation forcée entre Erik et Paul et les souffrances ressenties par le personnage principal. Cette baisse de rythme désamorce l’impact émotionnel qu’aurait pu avoir le film lors de ses dernières séquences.
On aurait ainsi aimé qu’Ira Sachs s’affranchisse légèrement de son histoire personnelle pour insuffler davantage de souffle dans la deuxième partie de sa retranscription cinématographique. Keep the Lights On reste cependant un film d’une rare sincérité, excellemment mis en scène et interprété, d’une grande lucidité sur l’amour et la souffrance que ce sentiment peut générer.