Le 1er juin 2021
Derrière le rire et le comique de situation, Kôji Fukada dissèque, non sans sarcasme, une société japonaise étouffée par les non-dits et la difficulté à communiquer. Un film résolument drôle.
- Réalisateur : Kōji Fukada
- Acteurs : Kiki Sugino, Kanji Furutachi, Kenji Yamauchi, Kumi Hyodo, Erika Ono
- Genre : Comédie
- Nationalité : Japonais
- Distributeur : Art House Films
- Durée : 1h36mn
- Titre original : Kantai
- Date de sortie : 26 mai 2021
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Résumé : Au cœur de Tokyo, la famille Kobayashi vit paisiblement de l’imprimerie. Quand un vieil ami de la famille réapparaît, aucun ne réalise à quel point il est en train de s’immiscer progressivement dans leur vie… jusqu’à prendre leur place.
Critique : Le cinéma du monde a cela de magique que le spectateur découvre les façons dont des sociétés différentes appréhendent un même problème. Ici, on parle de SDF et de personnes migrantes, sans papiers, sans situation de travail et de logement. Le cinéma français se plairait à décliner cette thématique dans une version sombre et sociale, là où le film de Kôji Fukada regarde le problème à travers le prisme d’une famille recomposée, qui gère tant bien que mal une imprimerie. Au début, on a du mal à cerner qui est la fille de qui, qui est la compagne de qui, et petit à petit, malgré les silences culpabilisants des protagonistes, le bazar apparaît dans sa totalité : il y a le chef de famille, en couple avec une toute jeune femme, qui préfère dire que la mère de sa fille est décédée, plutôt que se rendre à l’évidence qu’elle l’a fui ; il y a la sœur qui vit dans la maison entre l’alcool de riz et le manque de considération ; et soudain, surgit ce drôle de couple, improbable, dans le quotidien de la famille, à la suite de la disparition d’une perruche. Le binôme va s’installer dans les murs.
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Hospitalité est une sortie récente en France, mais le long métrage date en réalité de 2013. Depuis, le réalisateur a poursuivi sa dissection de la famille et de la société japonaise à travers au moins deux grands films, Harmonium et L’infirmière. Ici, le propos est délibérément ironique et burlesque. Le cinéaste dénonce les implicites, les non-dits qui ravagent les proches, mais aussi le fonctionnement tout entier de la société. Sous prétexte de ne pas perdre la face, de ne pas à avoir à gérer des conflits, les personnages acceptent tous les abus et se laissent manipuler en toute illégalité. Pour autant, le père de famille ne se vit pas comme une victime. Il trouve presque une raison à cette intrusion dans son entreprise et son domicile, y saisissant l’opportunité d’améliorer le rendement de son imprimerie et surtout d’égayer son existence sociale et sexuelle.
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Le rire est là. Il n’est pas moqueur pour autant. Les protagonistes sont attachants et suscitent même l’empathie du spectateur. On a envie de les secouer, de leur faire prendre conscience de la manipulation dont ils sont victimes. On découvre un Japon besogneux, une vision assez réactionnaire de ses pauvres par les habitants, une organisation des relations sociales pleines de silences et d’échecs de la communication. La conscience politique est presque absente de ces paysages urbains où l’on se risque au badinage, à tromper son conjoint, tout en se cachant dans le mensonge. Il y a dans la mise en scène un parti pris assurément théâtral : l’unité de lieu, le comique de situation donnent le ton général de cette comédie délicate et plaisante.
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