Horizons Obliques – Richard Blake - la chronique BD

Critique : Cette BD est un voyage, une exploration d’une autre dimension aux règles mystérieuses. Richard Blake nous offre un univers multiple, constituées de bâtiments aux architectures mélangeant les époques passées et futures, d’habitations flottant dans les airs, d’un espace fracturé et de visions de lieux qui se délitent au fur et à mesure qu’on les explore. Ce mélange est envoûtant.

On suit la préparation d’Adley pour le grand saut et on s’attache à cette petite fille, devenue jeune femme et à son allié mécanique, Staden. Ce voyage, cette quête pour retrouver ses parents, va mener le duo bien plus loin qu’il ne pensait. Et cette faille qu’ils explorent, remplie de robots hostiles, semble plonger dans les méandres de la mémoire humaine, avec ces bâtiments rappelant un passé plus ou moins lointain. Ces constructions vides, qui s’étiolent, comme s’étiolent nos souvenirs, nous renvoient à ce que nous nous rappelons, à ce qui nous reste de notre vie, le temps passant. Toute personne ayant vécu un certain âge a pu s’entendre dire « ma ville a bien changé », celle qu’il a connu n’est plus celle que connaît ses enfants, et a fortiori ne sera pas celle que connaîtront ses petits-enfants.

L’exploration de cette dimension nous rappelle indirectement tout cela en passant par une quête, qui propose sa dose d’action mais aussi de réflexions. Le livre se conclut sur une interview très riche de Richard Blake par François Schuiten en personne, l’auteur du cycle des Cités Obscures avec François Peeters, et par une galerie de couvertures et de recherches graphiques.

© Richard Blake / Urban

Richard Blake nous sert un très beau dessin, renvoyant à la peinture. Personnages réalistes, décors hallucinants mais parfois estompés, le dessinateur mène savamment différents niveaux de précision pour marquer le fait que les constructions s’effacent. L’emploi de formes géométriques parfois autour des quartiers renforcent ce sentiment. La composition prend le temps, celui de s’arrêter sur des moments intenses, en ralentissant l’action, celui de nous offrir aussi de magnifiques dessins pleine planche pour saisir un instant de toute beauté, pour laisser le temps d’une réflexion.

Les couleurs douces, chaudes ou froides, évoquent paradoxalement le silence de cet autre monde. Même les explosions sont muettes mais pas moins dangereuses pour autant. Seuls les dialogues résonnent dans cette autre dimension.

L’histoire se décompose en plusieurs chapitres, avec une belle page d’introduction en teinte marron clair, sépia, avec un double cadre cernant une image.

Horizons Obliques est une BD de toute beauté, qui nous entraîne dans une histoire intrigante, originale, nous emmenant plus loin que la simple quête d’Adley et Staten.