In the Heat of the Night
Le 18 mars 2022
Le chef-d’œuvre de Michael Mann bénéficie enfin d’une édition Blu-ray digne de ce nom ! Une délectation de tous les instants à se procurer d’urgence.
- Réalisateur : Michael Mann
- Acteurs : Robert De Niro, Al Pacino, Val Kilmer
- Genre : Drame, Policier / Polar / Film noir / Thriller / Film de gangsters, Thriller
- Nationalité : Américain
- Editeur vidéo : Twentieth Century Fox Home Entertainment
- Durée : 2h50mn
- Reprise: 22 février 2017
- Box-office : 1,278,417 (entrées France) ; 67,436,000 $ (recettes USA)
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Résumé : La bande de Neil McCauley à laquelle est venu se greffer Waingro, une nouvelle recrue, attaque un fourgon blindé pour s’emparer d’une somme importante en obligations. Cependant, ce dernier tue froidement l’un des convoyeurs et Chris Shiherlis se retrouve obligé de "terminer le travail". Neil tente d’éliminer Waingro, mais celui-ci parvient à s’échapper. Parallèlement, le lieutenant Vincent Hanna mène l’enquête...
Critique : Pas loin de quinze ans après son formidable Le Solitaire (coup d’essai pour le cinéma, coup de maître), Michael Mann réalise Heat, un film aujourd’hui considéré par les plus grands spécialistes tel un film "cathédrale", mais qui en son temps fut traité comme une belle réussite formelle. De nos jours, difficile de ne pas déceler en ce patrimoine cinématographique une œuvre nihiliste, un film somme, désabusé, grimé en projet de l’entertainment dont l’argument de vente était la réunion de deux acteurs légendaires. Présentement, Heat est affiché par des metteurs en scène comme Christopher Nolan en tant que source intarissable d’inspiration... Alors après deux décennies d’adoration cinéphilique, que représente ce director’s cut définitif supervisé par Mann himself ?
- © 20th Century Fox
Comme en 1995, tout débute sur le quai d’une gare de L.A. (qui trouvera, pour rappel, un tonitruant écho dans Collatéral) au son des notes envoûtantes de la plus belle composition d’Elliot Goldenthal, une composition parée d’un bleu mannien qui retranscrit à merveille cet état de solitude d’une création qui, pourtant, se joue en permanence d’un thème récurrent de la filmographie du metteur en scène : la dualité. De Neil McCauley (impérial De Niro), on retiendra irrémédiablement sa caractérisation par un plan emblématique dont la subtile intertextualité remémore la peinture Pacific d’Alex Colville. L’HK USP de De Niro est posé dans le champ de la caméra alors que son personnage se ressource par la simple vision d’un azur monoïde bleuté. Cette matérialisation d’un versant affectif traversé par le criminel endurcit, et bien qu’a priori traitée en filigrane, est à rattacher pleinement à l’essence même du long métrage dont l’enjeu est la conduction de ses protagonistes vers un ailleurs utopique.
- © 20th Century Fox
Mais comme souvent chez Mann, ce qui le taraude est multiple, l’une de ses maximes étant : " J’ai besoin de plusieurs niveaux de lecture, sentir une frontière que je n’ai pu franchir ". Car si dans ses films contemporains, l’humanité est arrivée à un état des lieux voulant que son humeur est largement adventice, dans Heat, l’introduction de ce monde des réseaux modernes est plus que palpable. Le long métrage étant bel et bien l’histoire d’un voyage salvateur qui n’aura jamais lieu, c’est qu’en son sein se joue le troc d’humains au profits de valeurs et autres chiffres. En admettant que dans sa trilogie du numérique contemporaine (Collatéral, Miami Vice et Blackhat) les protagonistes du réalisateur ploient sous la pression des flux et des réseaux, Heat représente bien une (des) frontière(s) que l’on franchit : celle de la fin d’une ère et plus précisément d’une certaine façon de bâtir le septième art, la fin d’un cycle historique, la fin d’un mouvement politique et culturel etc.
- © 20th Century Fox
Les plans de LA fusillade anthologique, un cas d’école, évoquent au demeurant des séquences de La Horde sauvage de Peckinpah et ce n’est pas un hasard : Heat est peckinpahien dans son approche frontale du genre, presque un western qui enterre une bonne fois pour toutes une inévitable mythologie à l’ancienne, en ouvrant les portes d’un nouveau monde que les figures mythiques ne comprennent plus. Pour se convaincre de la réalité de ce parti pris, on peut lorgner du côté du lieutenant Vincent Hanna (halluciné et hallucinant Pacino) qui se gausse de " la crèche de merde naze, tech post-moderne et ultra branchée " de l’ex-mari de son épouse. Mann cherche finalement à capter par petites touches subtiles la condition d’êtres humains dépassés et désabusés, pris au piège d’un monde " professionnel " qui reste, de façon contradictoire, leur seul et unique assujettissement.
- © 20th Century Fox
Mais se laisser aller aux multiples beautés de Heat, en saisir la substance même, c’est comprendre que l’un de ses principaux éclats réside dans la caractérisation de l’un de ses protagonistes : Los Angeles. Rarement ambiance urbaine aura autant servi le fond et la forme d’un long métrage. À la fois Cité des anges brillant de milles feux et berceau d’un piège où l’espoir n’a pas (plus) droit de cité... L.A. n’aura jamais autant bien serti les pensées mélancoliques et désespérées d’un Michael Mann qui, pour citer Gérard de Nerval, sait que " La mélancolie est une maladie qui consiste à voir les choses comme elles sont. " Un chef-d’œuvre absolu qui, aux côtés du Casino de Scorsese, marque de son empreinte indélébile les pages de l’histoire du cinéma des années 90... et bien plus !
Les suppléments :
Au niveau des suppléments, en plus de ceux que l’on trouvait déjà sur l’édition Warner (un commentaire audio de Michael Mann, des scènes coupées, un excellent making of, un flashback sur la scène mythique de conversation entre De Niro et Pacino et une virée dans Los Angeles sur les multiples lieux du tournage, pour conclure par les habituelles bandes-annonces), on découvrira avec passion un échange avec Michael Mann, enregistré à Toronto en 2015 ainsi qu’à l’Academy of Motion Picture Arts and Sciences en 2016 avec... Christopher Nolan (fortement influencé par Mann). Une édition enfin complète, que l’on attendait depuis bien trop longtemps !
© 20th Century Fox
L’image :
Une Haute Définition qui frise la perfection. La sublime photographie de Dante Spinotti reçoit enfin l’hommage qu’elle mérite : la définition est parfaite, le piqué est parfait, les contrastes et notamment le rendu des noirs sont parfaits. Rien à dire, si ce n’est un grand merci au travail sur le master 4K supervisé par le metteur en scène lui-même.
Le son :
La VO (à privilégier obligatoirement) dévoile un DTS-HD Master Audio 5.1 qui magnifie les ambiances comme jamais auparavant. La VF possède un mixage en DTS 5.1. Pas de HD donc, mais une version française tout de même supérieure au 5.1 de l’édition Warner.
– Sortie Blu-ray : le 22 février 2017
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