Hamaca paraguaya - la critique

L’attente silencieuse entre grâce et ennui.

L’argument : 14 juin 1935 : la guerre du Chaco entre la Bolivie et le Paraguay est enfin finie. Sans nouvelles du front, Candida et Ramon, deux petits vieux, attendent le retour de leur fils prodigue, parti défendre l’honneur du pays.

Notre avis : Premier film paraguayen (et en guarani) visible en France depuis des lustres, Hamaca paraguaya se distingue dans le lot des sorties. Et pour cause ! Tout en plans fixes et plans séquences, Hamaca paraguaya repose sur un canevas famélique qui pourrait virer à la caricature de film d’auteur : un couple de petits vieux s’engueule dans un hamac alors qu’une chienne aboie au loin. Rien que de très banal sauf que Paz Encina, la réalisatrice, a une patte, et dégraisse le cinéma pour livrer ce film qui défile entre deux fondus au noir. Sans fioritures, ni musique. Tandis que le jour décline, Candida et Ramon tuent le temps. Ils s’occupent aux champs ou aux tâches ménagères, taiseux et le visage fermé. Tout le jeu des comédiens rend cette intériorité recroquevillée sur elle, sourde à un monde de palpitations que le film capte dans un système sonore multipiste. Car chaque séquence fait écho à une autre, l’image et les dialogues étant savamment dissociés. Encina fait entendre les échanges ultérieurs de Candida et Ramon sur des images où les personnages ne pipent pas mot. Des voix surimprimées sur le silence, vibrant au pépiement des oiseaux et aux bruits de la forêt. Avec un tel programme, Hamaca paraguaya n’est pas à mettre devant tous les yeux, distillant, tour à tour, l’ennui et une émotion rare. Mais, c’est le cœur gros que l’on sort de ce film où les voix étouffées du couple sénescent implorent le ciel tourmenté de laisser la vie sauve à leur fils. Avant un dernier fondu au noir, la nuit tombe, recouverte, peut-être, d’un linceul de pluie.