Le 17 juin 2013
- Festival : Lyon BD 2013
"Sous les Bulles", un documentaire qui pointe les problèmes du monde de la BD, mais qui aurait pu pousser la réflexion, et le bouchon, plus loin.
Le festival de Lyon a conclu ses évènements par une projection de circonstance : le documentaire "Sous les Bulles" de Maiana Bidegain.
Ce documentaire a déjà fait le tour de la France et dresse un curieux constat de l’état de la BD et des auteurs en France. Pour tous ceux qui n’avaient pas eu l’occasion de le voir, c’était une belle manière de finir son tour au festival BD de Lyon.
Ce film nous rappelle les dures conditions de vie des auteurs. Il nous montre aussi le travail des libraires, des imprimeurs, des distributeurs, des éditeurs. On pourrait regretter que les éditeurs interviewés soient les grands noms, de Delcourt à Dargaud en passant par Dupuis. Pas l’ombre d’un indépendant ou d’une structure pus petite, à part le temps d’une enseigne. A l’inverse, les libraires questionnés étaient des petites structures, pas l’ombre d’un gros du marché, à part Le Virgin, aussi en enseigne, il a d’ailleurs fermé ses portes depuis. Seuls les auteurs étaient représentés autant par des grands noms comme par des petits.
Le constat est assez triste, surtout concernant la situation des auteurs.
Aujourd’hui, plus de 5000 BD inondent le marché chaque année. Calculez, on est presque à 12 BD par jour.
Ce qui amène à parler du grand absent de ce documentaire : le lecteur, qui arrive en guise de conclusion. « Lecteur, tu feras la BD de demain ». Et comment ? Mystère...
Le film aborde l’évolution du marché en terme de quantité, en terme d’évolution de modèle économique, d’évolution du marché, mais il ne parle pas, par exemple, du phénomène de niche, qui concerne directement les lecteurs.
Nous nous doutons bien que ces 12 BD/jour ne s’adressent pas au Public dans un sens large, à un seul et même lecteur, mais qu’elles ciblent tout un tas de publics différents : Jeunesse, ados, adultes, bobos , ménagères, filles, hommes, autres, etc…
En fait, le seul qui se retrouve à devoir lire ces 12 BD/jour, c’est le libraire, puisque c’est lui qui devra vous conseiller sur quoi offrir à vos enfants, vos nièces, votre voisin, vos collègues, vos amis métalleux ou plombiers, votre patron, votre concierge. Mais il n’a pas le temps de les lire. Imaginez, 12 BD par jour, même en allant vite, comptons trente minutes. Donc, votre libraire adoré doit passer six heures par jour pour pouvoir vous conseiller. C’est vrai aussi qu’il a une boutique à gérer !
L’éditeur est-il vraiment le grand méchant ? Il vise un public de niches, donc il en vendra moins. Les BD grand public, les plus connues, voient leur vente baisser, nous annonce le documentaire. Serait-ce la politique du signer plus pour vendre moins ? L’éditeur est-il vraiment gagnant dans l’histoire ?
Ce qui est sûr, c’est que l’auteur est perdant. Bien peu d’entre eux vivent au-dessus du Smic, voire même au niveau du Smic. Beaucoup d’appelés mais peu d’élus.
Est-ce qu’il n’aurait pas été intéressant de comparer le modèle économique de la BD en Europe avec ceux d’Asie et d’Amérique, qui doivent avoir leurs spécificités, leurs défauts et leurs qualités ? Après tout, leurs BD arrivent jusqu’à nous. Dans les bacs des libraires, super-héros côtoient héros de mangas et de BD franco-belges.
Or, l’arrivée et l’implantation de ces BD, leur part de marché, leur taux de présence parmi ces 5000 BD par an n’est pas évoqué. Pourtant, la mondialisation frappe aussi le monde de la Bande Dessinée. Et les auteurs Français doivent trouver leur place sur un marché français, certes, mais un marché ouvert aux œuvres internationales. Sans se limiter aux deux catégories évoquées précédemment, les BD d’Amérique du Sud, d’Afrique du Nord existent et sont présentes dans nos rayons. Sur quel modèle économique se passe l’export de ces BD ? Quels gains pour leurs auteurs ? Quelles idées à reprendre, à éviter ou à adapter ?
Le documentaire évoque également la BD numérique, et la démarches des auteurs essayant de trouver des modèles économiques pour l’édition numérique. Mais dans ce combat là, les auteurs sont à nouveau bien seuls.
"Sous les Bulles" pose le doigt là où ça fait mal, mais oublie de gratter autour pour faire ressortir des pistes de solutions. Un regard incomplet qui a néanmoins le mérite de porter le problème de la condition des auteurs sur la place publique, un problème qui n’est pas allé en s’arrangeant depuis la sortie du film.
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