Le 13 février 2015
Un film apte à faire réfléchir, appuyé sur une thèse pour le moins effrayante, mais gâché par une mise en images des plus déconcertantes.


- Réalisateur : Aris Chatzistefanou
- Genre : Documentaire
- Nationalité : Grec
- Durée : 1h23mn
- Date de sortie : 18 février 2015

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Un film apte à faire réfléchir, appuyé sur une thèse pour le moins effrayante, mais gâché par une mise en images des plus déconcertantes.
L’argument : Dans son nouveau documentaire, Aris Hadjistéphanou montre comment les industriels et les banquiers ont appuyé le fascisme dans les années 20 et 30, afin de détruire les mouvements socialistes et les syndicats. Aujourd’hui, à nouveau en temps de crise, ce schéma se reproduit à la périphérie de l’Europe : en Grèce des partis d’extrême droite comme « L’Aube Dorée » et « L.A.O.S. » ont été soutenus par une partie des élites économiques et les groupes médiatiques. « L.A.O.S. » a même été salué par l’UE et le FMI dans le cadre du gouvernement non élu de Lucas Papadimos. Un jeu risqué qui peut facilement devenir hors de contrôle.
Notre avis : On appréciera ce documentaire différemment selon ses connaissances historiques : que les fascistes ne soient jamais arrivés au pouvoir par la force et qu’ils prospèrent à partir des crises, tous les lycéens le savent – ou devraient le savoir ; que les grands industriels (Renault ou Fiat, par exemple) aient activement collaboré ne surprendra pas grand monde. Nombre d’informations ainsi distillées tout au long du film sont utiles, certes, mais enfin pas très neuves. Moins connue, la thèse principale, le lien qui unit fascisme et capitalisme, est néanmoins largement débattue depuis longtemps, et combattue aujourd’hui par les néo-libéraux qui, au contraire, le relient au socialisme. Bref, répétons-le, la partie historique séduira les néophytes, et confortera les convictions de nombre de spectateurs, sans doute déjà acquis à cette vision de gauche.
En revanche, la fin, qui met en relation le passé et le présent, séduit grâce à notre méconnaissance notamment de la réalité grecque. Le lien entre les armateurs et l’Aube dorée, le parallèle entre l’Allemagne des années 30 et la Grèce contemporaine intéresse et, disons-le, effraie. Pire encore, le rôle de l’Union Européenne, évoqué en quelques images glaçantes de courtoisie, ne peut que nous faire réfléchir. Là est sans doute la force du film, beaucoup plus que dans la première partie, nécessaire sans doute pour établir les ponts entre les époques, mais plus convenue.
© Les Films du Saint-André
La thèse peut séduire, intéresser et faire débat, mais il fallait bien mettre des images sur cet exposé théorique. Laissons de côté les interventions de spécialistes, filmés frontalement, et les images d’archives ou d’actualités. Mais il y a le reste … et qui nous a laissé sceptique pour le moins. Quel est le rôle de ces plans de tags exécutés avec des pochoirs, de ces plans de ville accélérés, ou de gares, de trains ? Pourquoi multiplier les afféteries comme les images incrustées sur une valise ? Quel intérêt présente la répétition d’un concert de rock ou quelques scènes d’une pièce de théâtre « engagée » à la limite de la caricature ? Peut-être y a-t-il dans ce dernier cas une manière de montrer que l’art constitue un rempart contre les dictatures. Peut-être...
Nous sommes donc bien embarrassé : si la thèse intéresse, surtout dans la seconde partie, le choix des illustrations ne laisse pas de nous agacer.