Le 29 mars 2023
En réalisant son septième long-métrage, Joanna Hogg fait déjà la démonstration qu’elle occupe une première place dans le cinéma mondial d’aujourd’hui.
- Réalisateur : Joanna Hogg
- Acteurs : Tilda Swinton, Joseph Mydell, August Joshi, Carly-Sophia Davies
- Genre : Drame fantastique
- Nationalité : Américain, Britannique
- Distributeur : Condor Distribution
- Durée : 1h36mn
- Titre original : The Eternal Daughter
- Date de sortie : 22 mars 2023
- Festival : Festival de Venise 2022
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Résumé : Julie, accompagnée de sa mère âgée, vient prendre quelques jours de repos dans un hôtel perdu dans la campagne anglaise. La jeune femme, réalisatrice en plein doute, espère y retrouver l’inspiration ; sa mère y voit l’occasion de faire remonter de lointains souvenirs, entre les murs de cette bâtisse qu’elle a fréquentée dans sa jeunesse. Très vite, Julie est saisie par l’étrange atmosphère des lieux : les couloirs sont déserts, la standardiste a un comportement hostile, et son chien n’a de cesse de s’échapper. La nuit tombée, les circonstances poussent Julie à explorer le domaine. Elle est alors gagnée par l’impression tenace qu’un indicible secret hante ces murs.
Critique : Ça commence par les sonorités sinistres de violoncelles, faisant penser à une célèbre série américaine des années 90. Sauf que les deux êtres qui roulent à travers les paysages brumeux ne sont ni agent du FBI, ni médecin, mais une mère et sa fille en quête de souvenirs dans l’hôtel qui va les accueillir. A priori Eternal Daughter a tout du film de fantômes. L’hôtel où elles s’enferment toutes les deux ressemble à un manoir ancien et sinistre, les autres occupants sont invisibles, et la jeune femme qui assure la réception et le service semble sortie d’un film d’horreur. Joanna Hogg se plaît aussi à répéter les scènes un jour sur l’autre, comme si elle souhaitait faire monter la tension chez son spectateur et le pétrifier d’angoisse. Sauf qu’au bout de dizaines de minutes, le récit s’éloigne peu à peu du style fantastique et s’enfonce dans la psychologie tourmentée des deux héroïnes.
Souvenir I et II mettait en scène une réalisatrice de cinéma, hantée par un passé amoureux violent. Cette fois, Joanna Hogg récidive avec un personnage féminin de cinéaste, jouant ainsi subtilement entre le réel et le fantasme de l’artiste. L’héroïne est également habitée par des traumatismes anciens que sa mère, très soignée, s’efforce de garder dans le sceau du secret. Il y a beaucoup d’amour entre ces deux femmes, très british, mais aussi le fantôme d’un non-dit qui les ronge de l’intérieur. Eternal Daughter témoigne de ces mots avortés, de ces secrets familiaux à travers les apparitions furtives de fantômes ou les grincements suspects de portes et de fenêtres. On est jamais loin de la folie, quand plus simplement les personnages laissent parler leurs tourments intérieurs.
- Copyright Condor Distribution
Joanna Hogg offre une véritable leçon de cinéma. Toute la mise en scène s’attache aux détails. Un mouvement de tasse, un cadeau déposé sur une assiette, un bruissement de rideau : autant d’exemples qui démontrent le soin extrêmement scrupuleux de la réalisatrice à faire chanter le récit. En réalité, la véritable fiction se loge dans les accessoires, les brumes du jardin, les meubles et les tapisseries de l’hôtel, beaucoup plus finalement que dans les dialogues entre les deux femmes. Les personnages sont rares, à l’exception de la réceptionniste, d’un merveilleux veilleur de nuit. Tout le récit se joue les fumées qui s’évaporent la nuit des arbres, et l’angoisse s’affiche dans l’impossibilité pour l’héroïne d’appeler son compagnon ou dans la fuite brutale du chien Louis dans les couloirs de l’hôtel.
- Copyright Condor Distribution
Eternal Daughter est une œuvre cinématographique déroutante et fascinante. Elle flirte avec tous les styles sur l’écran, poussant le spectateur dans ses retranchements. Sa patience est mise à l’épreuve, jusqu’à la dernière scène où les tourments des deux héroïnes ne cesseront plus de le poursuivre.
- © Condor Distribution
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