Le 30 décembre 2015
Un film original qui n’évite pas toujours la sécheresse et l’abstraction.
- Réalisateur : Nicolas Roeg
- Acteurs : Harvey Keitel, Denholm Elliott, Art Garfunkel, Theresa Russell, Daniel Massey
- Genre : Drame, Thriller
- Nationalité : Britannique
- Editeur vidéo : Potemkine
- Durée : 2h03mn
- Titre original : Bad timing
- Date de sortie : 18 juin 1980
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– Sortie Blu-ray : le 9 octobre 2015
Un film original qui n’évite pas toujours la sécheresse et l’abstraction.
L’argument : A Vienne, un jeune professeur en psychanalyse, éprouve une passion obsessionnelle pour une jeune femme mystérieuse qui ne peut s’assouvir car elle se refuse souvent à lui. Un soir, il appelle la police car elle a tenté de se suicider. Un jeune inspecteur de police essaie alors de reconstituer l’emploi du temps du professeur et de la jeune femme.
Notre avis : Point d’orgue des expérimentations esthétiques de Nicolas Roeg, Enquête sur une passion (Bad timing en anglais), fait partie de ces œuvres qui jouent contre leur scénario en le déconstruisant par des effets de montage. Les temporalités se mêlent et même s’entremêlent, puisque l’inspecteur « assiste » à une scène d’amour passée, jusqu’à constituer un puzzle qui vise à l’énigmatique, malgré une histoire somme toute banale d’où il ressort que l’on ne connaît jamais la personne que l’on aime. Si le film tient, c’est, outre le jeu très contrôlé d’acteurs et les sauts temporels, par une attention incroyable portée aux détails, souvent symboliques : que ce soit les broches de Milena, les paquets de cigarette d’ Alex, les tableaux, cadres et reproductions, Roeg construit un monde d’objets qui se font écho en un réseau asphyxiant de signes complexes. C’est la richesse mais aussi la limite d’une œuvre close sur elle-même, victime de la maîtrise du cinéaste, d’autant que le système de répétition (les nombreuses séquences de disputes ou controverses) finit par générer un ennui certain.
Certes, intellectuellement, le film séduit par ses nombreuses idées : l’opposition entre les personnages joue sur toutes sortes de niveaux, de la décoration (les deux appartements) à la manière de vivre (principe de plaisir contre principe de réalité, raison contre passion, analyse contre hédonisme) ; Roeg parvient à des moments de sensualité et sait utiliser la technique (éclairages, zooms, montage évidemment) pour obscurcir à dessein le portrait de Milena. Sauf que parfois la mécanique tourne à vide à force de précision : le fonctionnaire et sa tasse de café ou le voyage au Maroc dilatent le temps mais annihilent aussi l’adhésion du spectateur. Ce n’est qu’épisodiquement qu’on retrouvera des scènes de tension (la « dispute à la perruque », par exemple).
Enquête sur une passion intéresse en tant que construction abstraite ou projet esthétique, mais il est aussi révélateur de l’impasse à laquelle aboutit le « Nouvel Hollywood » finissant. Symptôme d’une contestation formelle (mais dans ce domaine le Resnais de Je t’aime, je t’aime allait plus loin), il bute sur une intellectualisme raffiné dont les audaces un peu vaines vident son sujet d’un potentiel émotionnel certain, et la fin sentencieuse n’arrange rien.
Les suppléments :
Entretien avec Jean-Baptiste Thoret, aussi enthousiaste qu’érudit (19 minutes).
L’image :
Quelques légers parasites au début mais la copie est en général magnifique : piqué, colorimétrie, on est dans le haut de gamme de la restauration.
Le son :
La seule piste disponible (VO mono 2.0 DTS HD MA) met en valeur aussi bien les dialogues que la riche bande originale. Du travail d’orfèvre.
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