Le 2 avril 2015
Une comédie honnête, mais bien loin du niveau des œuvres cultes de Marcel Carné.
- Réalisateur : Marcel Carné
- Acteurs : Paul Meurisse, Suzy Delair, Jeanne Fusier-Gir, Jean Richard, Dany Saval
- Genre : Comédie
- Nationalité : Français
- Editeur vidéo : Gaumont DVD
- Durée : 1h49
- Date de sortie : 15 février 1963
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Sortie en blu ray le 25 mars 2015.
Une comédie honnête, mais bien loin du niveau des œuvres cultes de Marcel Carné.
L’argument : M. Armand, un ancien truand, est devenu le respectable propriétaire d’un immeuble. Il conserve avec précautions un magot de billets de banque, trace de son ancienne vie. Une vieille aristocrate, locataire de l’immeuble, meurt brusquement. Un inspecteur vient enquêter, M. Armand, préfère alors s’éloigner de Paris. Il emmène avec lui son argent et une de ses locataires, Lucie, jeune femme intéressée qui a découvert l’existence du magot et qui va tenter de s’en emparer.
Notre avis : Fruit de sa collaboration avec Jacques Prévert, Marcel Carné est l’auteur de plusieurs classiques du cinéma français, comme Le quai des brumes (1938), Hôtel du Nord (1938), Le jour se lève (1939) ou encore Les enfants du paradis (1945).
La deuxième partie de sa carrière, dans les années 50-60, marque un sérieux coup d’arrêt au niveau qualitatif. Lorsqu’il sort en 1962 Du mouron pour les petits oiseaux, adaptation du roman éponyme d’Albert Simonin, l’accueil critique est mauvais. Il faut dire qu’à cette époque la Nouvelle vague a pris le pouvoir et certains cinéastes comme Marcel Carné ont pris un sérieux coup de vieux. D’autant que Carné n’a plus dans son équipe Jacques Prévert, qui apporta une touche poétique à, son œuvre.
Pourtant, il serait injuste de considérer Du mouron pour les petits oiseaux comme une œuvre médiocre. Le film comporte des qualités indéniables.
Déjà, au niveau des thèmes abordés. L’action se déroule dans un quartier parisien qui paraît sans histoires. Les apparences sont bien souvent trompeuses et nos chers citadins ont tous des secrets qui n’en font pas des enfants de cœur : avarice, adultère, prostitution sont au programme. Évidemment, ces éléments sont abordés sur le ton de la comédie et de façon décalée.
Il n’empêche que Marcel Carné dresse sans ambages le portrait d’une micro-société où la sexualité et l’argent comptent plus que tout. Mademoiselle Lucie, entraîneuse dans une boîte de nuit, se prostitue avec le boucher du coin, homme plus âgé dans le but de lui extorquer de l’argent. Quant à la femme du boucher, lisse en apparence dans son attitude, elle aime les petits jeunes et a une relation adultérine avec son commis. Toujours au niveau de la sexualité, on notera aussi les penchants d’un vieil homme homosexuel (Marcel Carné était homosexuel, même s’il ne l’a jamais évoqué en public), qui s’envoie des lettres à lui-même, afin de recevoir la visite du jeune facteur, qu’il tente d’entraîner à son domicile.
La convoitise de l’argent est également un des vices de cette micro-société. Monsieur Armand, le propriétaire de l’immeuble où se déroule une partie de l’action, passe du bon temps avec des jeunes femmes qu’il paie. Mais surtout, il se crée parallèlement un pactole dans des conditions qui sont obscures. La mort suspecte d’une vieille dame - qui se faisait passer pour une impotente alors qu’elle souhaitait seulement que l’on s’occupe d’elle - est tout aussi étrange. Or, celle-ci possédait un magot.
C’est tout l’objet de l’intrigue de ce film où gravitent d’autres personnages hauts en couleurs, en plus de ceux cités précédemment : une concierge qui n’a pas sa langue dans sa poche et un tailleur évangéliste complètement halluciné.
Malheureusement, la multiplicité des personnages nuit à la cohérence de l’ensemble. Par moments, on a plus l’impression d’assister à des tranches de vie qu’à une comédie où les personnages sont censés interagir les uns avec les autres.
Il faut dire que la distribution, très hétéroclite, y est sans doute pour quelque chose. Paul Meurisse, qui vient de jouer dans les 2 Monocle de Georges Lautner, est extraordinaire en aristocrate à l’humour pince-sans-rire. Il est l’attraction numéro 1 de ce film. Suzanne Gabriello (l’ex de Jacques Brel, pour qui il a composé Ne me quitte pas... alors que c’est lui qui l’a quittée !) n’est pas mal non plus en concierge grande gueule qui ne se laisse jamais faire, à l’instar de cette réponse cinglante à une insulte du propriétaire de l’immeuble : "Monsieur Armand il est fini le temps de la concierge de papa". Quant à Suzy Delair, elle est aussi très bien en commerçante trompée par son époux qui jette son dévolu avec subtilité sur le timide commis.
A côté de ces acteurs très professionnels et convaincants, d’autres déçoivent sérieusement. La palme revient à Dany Saval, exaspérante à souhait dans son rôle de blonde décérébrée qui en fait des tonnes, y compris avec son zozotement. Jean Richard est également dans l’œil du cyclone dans son rôle de boucher colérique en total sur-jeu. Quant à Roland Lesaffre, il fait peine à voir en tailleur évangéliste, qui agace au lieu de faire rire, à chacune de ses apparitions.
Malgré tout, on a affaire à une comédie populaire qui se laisse regarder, notamment par les relations amoureuses superficielles, voire hypocrites, qu’elle met en avant. La fin du film, particulièrement drôle et cynique, en est le meilleur exemple.
Du mouron pour les petits oiseaux est un opus en mode mineur de Marcel Carné, mais ce n’est pas le naufrage évoqué par certains critiques.
Un blu ray révélant un bon master pour le film. Les bonus auraient mérité d’être plus fournis.
Les suppléments :
On a droit à une présentation du film par Morisson. Ce spécialiste de Marcel Carné revient sur la carrière du réalisateur français, sur la sortie délicate du film au niveau des critiques, ainsi sur les acteurs choisis. D’une durée de 12 minutes, ce bonus est fort intéressant.
La bande annonce du film complète la section des bonus.
L’image :
L’image est de très bonne facture, et permet d’apprécier la belle photographie en noir et blanc. La copie est propre, lavée de l’usure du temps.
Le son :
Son en mono DTS-HD master audio. On constate aisément qu’une restauration a eu lieu avec un son, plus pur et mieux installé sur l’enceinte frontale. A noter l’initiative fort louable de l’éditeur, qui permet de visionner le film avec des sous-titres pour sourds et malentendants.
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