Le 30 novembre 2021
Pour l’un de ses derniers films, le prolifique Allan Dwan livre un patchwork décomplexé qui tire vers la caricature un scénario simpliste.
- Réalisateur : Allan Dwan
- Acteurs : Arlene Dahl, John Payne, Rhonda Fleming, Ted de Corsia, Kent Taylor
- Genre : Policier / Polar / Film noir / Thriller / Film de gangsters
- Nationalité : Américain
- Editeur vidéo : Sidonis Calysta
- Durée : 1h39mn
- Titre original : Slightly Scarlet
- Date de sortie : 8 août 1956
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Résumé : Les intrigues d’un gangster qui veut contrôler une ville. Deux sœurs sont impliquées dans ces affaires de corruption.
Critique : Deux rouquines dans la bagarre a acquis au fil du temps un statut d’« œuvre culte » qui laisse sceptiques les amateurs de films noirs sérieux, ce que le titre français, avec son aspect série B, souligne judicieusement. C’est que cette vague histoire de corruption n’a rien d’original, ni d’ailleurs de palpitant et déroule son intrigue prévisible avec un manque patent d’ambition. Rien de trouble ou de neuf, mais des personnages dépourvus d’épaisseur qui débitent des tirades assez plates.
Du moins pour la partie « noir ». Car, on s’en doute, l’essentiel est ailleurs : rarement aura-t-on vu une mise en scène qui, dans toutes ses composantes, joue à ce point contre le sérieux des situations : tout se passe comme si Dwan ruinait consciencieusement la tension et multipliait les détails visant à contrecarrer les codes du genre. Ça commence de fait par une scène de plein jour, la sortie de prison de Dorothy, et la présentation en image arrêtée des héros : les acteurs surjouent déjà, et ce n’est que le début. Le cinéaste aligne ensuite des séquences caricaturales : ainsi les méchants sont-ils dans des intérieurs surchargés et rongés par des ombres démesurées, alors que les deux sœurs vivent dans une maison kitsch et prennent des bains de soleil en tenues moulantes ; elles s’y livrent à une joute de regards langoureux et de postures alanguies. Si la plus âgée semble sérieuse, mais cela ne dure pas, la plus jeune picole et drague ouvertement le fade John Payne. Dès lors, on se désintéresse des péripéties pour savourer les allusions transparentes, les jambes qui dépassent ou les détournements de mélodrame. Car, en plus de ne pas croire en son sujet, Dwan s’amuse à multiplier les esthétiques et les emprunts en les exagérant. Si on prend le film au sérieux, on peut y voir la patte d’un vieux monsieur qui ne croit plus en son art, et jette un pied de nez parodique à la face de Hollywood, tout en conservant par moments une transparence classique, voire plutôt fine : témoin ce beau travelling à la fin de l’élection.
Mais le trait est trop gras : la mort de Marlowe, par exemple, est surjouée ; de même de menus détails démolissent-ils telle scène dramatique : on pense en particulier à ce bandit géant qui pose sa grosse main sur un avorton, avant quelques minutes plus tard de le soulever sans efforts. On n’est pas loin alors du slapstick ou du dessin animé ce qui, reconnaissons-le, fait tache dans un film noir. De même les incongruités (le briquet, le harpon) voisinent-elles avec des tunnels dialogués sans intérêt. Au fond, on ne sait que penser d’une œuvre bariolée, délirante et composite, mais, à l’instar de Bertrand Tavernier, on passe un bon moment à regarder ce patchwork décalé et définitivement à part.
Les suppléments :
On aime toujours les interventions de Bertrand Tavernier, qui analyse quelques scènes avec finesse et aligne ses réserves sur le film (le roman, le scénario, les décors, les acteurs…) tout en avouant son plaisir (32 mn) ; De son côté, François Guérif lui distribue quelques bons points et réévalue le livre d’origine (11mn). La bande-annonce et une galerie photos complètent ces bonus.
L’image :
La jaquette a beau arborer « Master haute définition », les couleurs sont pâlottes et la définition insuffisante. Quant aux parasites discrets qui parsèment la copie, s’ils ne gênent pas la lecture, ils invalident une restauration toute théorique.
Le son :
Là encore, les deux versions (VO et VF) sont sans grande profondeur même si les dialogues sont largement audibles et la musique sans saturations.
– Sortie DVD : le 10 octobre 2017
Galerie Photos
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