Le 25 novembre 2017
Un petit film noir enlevé qui fonctionne magnifiquement à l’économie.


- Réalisateur : Robert Parrish
- Acteurs : Charles Bronson, Ernest Borgnine, Broderick Crawford, Richard Kiley
- Genre : Drame, Policier / Polar / Film noir / Thriller / Film de gangsters, Noir et blanc
- Nationalité : Américain
- Editeur vidéo : Sidonis Calysta
- Durée : 1h27mn
- Titre original : The Mob
- Date de sortie : 5 décembre 1952

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– Sortie DVD : le 26 septembre 2017
Résumé : Le détective de police Damico est suspendu par ses supérieurs après avoir s’être fait dupé par un truand. Ce dernier venait d’assassiner un témoin gênant qui devait participer à un procès visant le milieu corrompu des dockers. En réalité, Damico est envoyé en mission d’infiltration...
Notre avis : Dans la gueule du loup est le deuxième film de Robert Parrish, réalisé sans grands moyens et avec des acteurs de second plan mais, il faut le souligner, tous excellents. L’histoire n’a rien d’exceptionnel, avec la taupe policière chargée de démasquer le grand chef des méchants, et la galerie de fausses pistes, même si son identité peut surprendre. En revanche, c’est dans le traitement de l’intrigue que Parrish révèle son talent : s’il sacrifie aux codes du film noir, ruelles pluvieuses, séquences nocturnes, hôtel mal famé, il emprunte également au whodunit et laisse de côté toute idée de femme fatale. Son héros lui-même, interprété par le magistral Broderick Crawford, a l’allure pataude, n’est pas très fin, se bat et tire sans adresse extrême mais il manie le sarcasme et l’humour avec allant. Au fond, c’est plutôt un loser magnifique qu’un chevalier triomphant : dès la première scène, il est moqué par un bijoutier et il échoue à arrêter un meurtrier. Par ailleurs, c’est un homme banal, amoureux d’une femme sans grand charme.
C’est par ce côté modeste que le film touche d’abord, renforcé par un aréopage de miteux qui gravite autour de Crawford. Mais Parrish, même à ses débuts, sait aussi mener rondement une œuvre qui ne cesse d’avancer à grands pas : ainsi des ellipses (les ennuis qu’il cause sur le bateau, l’interrogatoire par les bandits) et du montage qui évacue tout superflu ; les rebondissements s’enchaînent à un rythme soutenu, sans graisse ni fioritures, et pourtant nombre de détails comme la boisson de la Nouvelle-Orléans ou le bocal d’eau dans lequel on jette des pièces, offrent un supplément de chair à cette œuvre fondée sur l’efficacité. En effet, hormis les dernières images assez plates, on cherchera en vain des séquences inutiles, ou simplement décoratives.
Cette efficacité repose également sur une science du cadrage : tel plan de policiers en groupe menaçant, ou d’agents apparaissant par la fenêtre en disent long en très peu d’images. On prendra donc un réel plaisir à suivre ces aventures menées à pas de géant, même si, malgré la qualité des dialogues et leur humour, on regrette que le scénario se révèle un peu timide : s’il y a des flics corrompus, on ne cesse de rappeler qu’ils font honte à la profession. Autrement dit, Dans la gueule du loup manque un peu de noirceur, il est un peu trop propre, sans pour autant se départir d’un charme tenace qui tient au savoir-faire du cinéaste et à une interprétation solide. On ne s’y ennuie jamais, et le suspens qui régit la longue séquence du piège tendu au méchant est singulièrement prenant.
Les suppléments :
On est toujours content de retrouver les bonus habituels de la collection, c’est à dire la bande-annonce, la galerie photos et surtout les entretiens : Bertrand Tavernier (22mn30) et François Guérif (9mn30) distribuent de nombreux bons points au film, le premier insistant davantage sur la qualité des dialogues, ce qui ne souffre pas de discussion. On apprécie évidemment l’érudition et la subjectivité des deux compères.
L’image :
De menues imperfections n’empêchent pas la copie de restituer un beau noir et blanc, nuancé, contrasté, bref, compte tenu de l’âge du film, de la belle ouvrage.
Le son :
La VO a beaucoup de présence, avec ses dialogues limpides et sa musique quasi sans saturation. La VF d’époque a beaucoup moins bien vieilli.