Dancers - la critique du film

Kenneth Elvebakk signe un documentaire attachant, malgré des longueurs que l’on pourrait qualifier de disgracieuses dans une oeuvre qui célèbre l’art de la danse.

Argument : Inséparables et complices depuis l’enfance, Lukas, Syvert et Torgeir, sont trois jeunes danseurs qui partagent le même rêve : intégrer l’Académie de ballet d’Oslo. Mais les places sont chères et les opportunités rares. Acharnés à réussir, à se perfectionner et à faire de leur corps l’instrument parfait, ils nous emmènent dans leur quotidien rythmé par la dureté des entraînements et le stress des auditions. Autant d’épreuves qu’ils sont prêts à surmonter pour, un jour, devenir danseur étoile.

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Notre avis : Le réalisateur Kenneth Elvebakk n’aime pas les clichés. En 2006, sa série télévisée Hullabaloo montrait de jeunes hommes homosexuels se transformer en sportifs agressifs sur les terrains de handball, loin du look queer qui les distinguait des autres équipes dans la vie quotidienne. Avec Dancers, il s’oriente vers la danse classique en montrant qu’il ne s’agit pas d’une question de genre, d’orientation sexuelle ou de virilité. En s’inspirant des documentaires de Nicolas Philibert et de Margaret Olin, il s’attarde sur la ténacité nécessaire à trois jeunes garçons, amis depuis l’enfance, pour intégrer les meilleurs corps de ballet au monde. {{© ZED}}Ce documentaire a pour vocation de s’attarder sur les années de discipline, de sacrifice et d’abnégation qui attendent ces apprentis pour obtenir le premier rôle. Entre soutien des proches, beauté du geste, financement délicat de ces études et défis émotionnels, le film apporte un éclairage nouveau sur la formation de ces adolescents qui rêvent d’atteindre les étoiles. {{© ZED}}Si dans le fond le sujet est très intéressant (les coulisses des ballets gardent encore une partie de mystère), dans sa forme le documentaire est trop long, au point de devenir assez vite ennuyeux lorsqu’il se concentre trop sur l’un des trois protagonistes.
Trop préoccupé par le sort du jeune prodige Lukas Bjørneboe Brændsrød, le réalisateur en oublie la raison d’être de son film : dresser le portrait d’une jeunesse qui a choisi un sport de discipline et qui arrive, en pleine adolescence, à remettre en cause ce choix de vie, à l’âge des questions et des angoisses sur l’avenir. Si la première partie du film s’attarde bien sur le parcours de trois amis et leurs différences, la seconde perd de son intérêt lorsqu’il s’agit de suivre le seul qui entre dans un grand ballet. A croire que les autres, parce qu’ils n’ont pas été repérés par de riches mécènes, ont décidément tout perdu. {{© ZED}}Le dispositif documentaire cumule les interviews de Lukas Bjørneboe Brændsrød (dans le portrait d’un futur danseur déterminé), Torgeir Lund (la force de la nature qui s’est mis à la danse tardivement) et Syvert Lorenz Garcia (le jeune homme qui doute et pense aux loisirs, qui lui permettent d’échapper à une discipline difficilement supportable), et enchaîne les extraits de leurs représentations en public. On note de façon plus originale les images accélérées qui donnent vie aux mouvements des danseurs. La qualité de l’image est bien là et permet à Dancers de se distinguer, malgré la lenteur de son rythme. {{© ZED}}A l’arrivée, le film tient ses promesses : révéler ce qui se cache derrière les ballets et les opéras, notamment la sélection naturelle, la part de chance et le destin des heureux élus et des autres. Mais qu’en restera-t-il dans dix ans ? Alors qu’il avait sûrement pour ambition de se démarquer en montrant le long et dur parcours des danseurs en devenir, le documentaire ne ressortira vraiment des archives que si Lukas Bjørneboe Brændsrød a la carrière qu’on lui souhaite. Pour les deux autres, les fans risqueraient d’être trop déçus.
Un peu comme le spectateur lambda, en somme.