Les Damnés de la Commune . T.1 À la recherche de Lavalette - La chronique BD

Et si votre lointain voisin de pallier avait été un héros de la Commune ? Et si les gravures de l’époque pouvait raconter une histoire ? Ce constat a animé Raphaël Meyssan au moment de réunir dans une enquête sur un obscur communard nommé Lavalette plusieurs destins, au cœur de l’Histoire avec un grand H. Celle, méconnue, de la Commune, gouvernement éphémère de 1871 à la croisée entre la résistance et l’indépendance, l’anarchie et l’utopie. Aux côtés des grands noms que les archives et journaux d’époque ont su rendre, d’autres se trouvent, dans les copies de greffiers d’assemblées, dans les rapports de police ou les ordonnances de la mairie... Au milieu, un récit de la vie d’une anonyme, Victorine Brocher, dont le journal Souvenirs d’une mort-vivante est bouleversant. Les illustrations, qui sont toutes tirées des archives du XIXème siècle, donnent une pudeur touchante à l’ensemble, que ce soit la rébellion, la répression ou la famine. Ainsi les hommes de ce siècle font de la place pour les femmes et les enfants, les oubliés et les disparus de l’Histoire, qui ont ici une petite histoire pour exister et se faire connaître. Quelques pages qui témoignent des souffrances de la France d’autrefois, celle qui n’avait rien mais qui a lutté pour tout, le petit peuple qui s’est pris en main, et qui en a payé le prix. L’action n’est pas essentielle, beaucoup de planches racontent d’ailleurs les écueils d’une recherche historique véritable, donnant à la première partie de l’œuvre un côté haché et mal structuré, qui s’efface progressivement, tant l’enquête devient prenante.

© Delcourt

Le travail de réhabilitation, découpage et intégration des gravures vaut son pesant d’or. C’est un pan entier de l’Histoire de France, celle des gazettes et des documents administratifs, qui se retrouve pimpante et étincelante dans chaque planche. Apprêtées comme des bulles, relevées par quelques traits d’ironie ou de tragique, ces gravures assurent une originalité et un écho à ce premier tome, qui assume son côté vieillot, que l’on pourrait sans soucis qualifier ici de vintage branché.

© Delcourt

« Le plaisir des archives », c’est ainsi que l’historien Georges Duby résumait le travail de celui qui doit fouiller, chercher pour ne parfois rien trouver dans les méandres des archives. L’auteur a ici probablement pris du plaisir, mais en livre tout autant avec un premier album magnifique entre Cold Case et Secrets d’Histoire. Un bijou de l’ancien temps.