Une étoile s’éteint
Le 25 septembre 2007
Un portrait neurasthénique du leader de Joy Divison par un artiste touche-à-tout. Estimable.
- Réalisateur : Anton Corbijn
- Acteurs : Samantha Morton, Toby Kebbell, Sam Riley, Alexandra Maria Lara, Joe Anderson
- Genre : Biopic
- Nationalité : Américain
- Durée : 1h59mn
- Date de sortie : 26 septembre 2007
- Festival : Festival de Cannes 2007
Un portrait neurasthénique du leader de Joy Divison par un artiste touche-à-tout. Estimable.
L’argument : Le récit retrace la vie et la mort du chanteur Ian Curtis, leader de Joy Division, groupe mythique du rock anglais des années 70. Dévoré par ses démons, tiraillé entre sa vie de famille, sa gloire naissante et son amour pour une autre femme, Curtis s’est donné la mort la veille d’une tournée américaine qui s’annonçait triomphale.
Notre avis : Control propose le vrai sujet que 24 Hour Party People, de Michael Winterbottom, avait peut-être loupé : la naissance du groupe Joy Divison. Ou plus précisément de son chanteur leader : Ian Curtis qui s’est tragiquement suicidé à l’âge de 23 ans. Comme le démontre le film, le groupe est né par le hasard punk (Curtis a croisé lors d’une soirée une bande de potes qui recherchait désespérément un chanteur) et a toujours revendiqué l’ironie provoc (l’expression "Joy divison" désigne les bordels nazis pendant la seconde guerre mondiale). Plus tard, lors d’un concert, on aperçoit dans la foule grouillante de jeunes nazillons qui ont pris la provocation au premier degré. Mais tout ceci reste en arrière-plan. Photographe et clippeur pour Depeche Mode et Cold Play (entre autres), le hollandais Anton Corbijn scrute l’apparence arrogante de son chanteur nonchalant au quotidien, déchaîné sur scène, et accentue la mélancolie de ses images délavées en noir et blanc pour coller au mal-être d’un jeune homme au sourire absent, sur le point d’exploser. Le cinéaste dont c’est le premier long connaît d’autant mieux son sujet qu’il a réalisé des clips pour New Order, le groupe né de Joy Divison après la mort de Curtis.
Cette plongée, inédite et inattendue, intéressera plus les aficionados que les profanes. Oubliant l’excitation du star-system, Corbijn dévoile le contre-champ qu’on ne montre généralement pas dans les hagiographies ordinaires, celui de Curtis tiraillé entre son quotidien prosaïque et ses désirs intermittents d’évasion. Ado, Crash de James Graham Ballard trône dans sa bibliothèque et il fantasme une vie en écoutant seul avec ses clopes un vinyle de David Bowie. Au gré de ses rencontres, le jeune homme construit sa vie sentimentale qu’il partage difficilement avec la scène. Fâché avec les contingences de l’âge adulte, il a l’impression d’être pris dans un cul-de-sac existentiel, reste avec la seule fille qu’il ait connue, ne touche pas son enfant et pleure toutes les larmes de son corps lors d’une étreinte avec sa femme en prenant conscience qu’il se comporte comme un lâche. Le récit est linéaire pour éviter les effets ostentatoires et respecter la fadeur d’un écrin inerte. Sans être aussi radical que Last days qui retranscrivait le tohu-bohu mental d’un simili-Kurt Cobain confronté à sa solitude toute nue, Corbijn obéit à son parti pris jusqu’au bout en ayant cette même impression de ne pas passer à côté de son sujet. Belle obstination.
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Norman06 27 avril 2009
Control - la critique du film
Biopic attachant, davantage dans la tonalité du film social anglais que de l’hagiographie émotionnelle hollywoodienne. En dépit de la banalité de l’histoire conjugale et d’une première partie manquant un peu de rythme pour une œuvre du genre musical, l’ensemble se laisse voir (et écouter) avec plaisir.
Sébastien Schreurs 9 septembre 2012
Control - la critique du film
« Joy Division, l’étoile filante de la cold wave »
Hormis "Pink Floyd - The Wall", "Control" est le must en ce qui concerne les fragments de la vie d’un groupe musical. Si le succès est au rendez-vous (il sera éphémère), Corbijn insiste sur le fait qu’un artiste est avant tout un être dont la sensibilité à fleur de peau s’exprime au travers de ses chansons. Le noir et blanc qui retranscrit parfaitement l’atmosphère de l’époque et l’interprétation habitée de Sam Riley (Ian Curtis) font que ce biopic atypique restera gravé à jamais dans les mémoires. Ce coup d’essai est un coup de maître.