Le 27 avril 2014
Au début des années 70, la firme Hammer, connue pour sa série des Dracula, tente de se renouveler en s’intéressant à une figure historique sanguinaire, la comtesse hongroise Elizabeth Báthory. Mais l’ensemble demeure trop désincarné pour convaincre.
- Réalisateur : Peter Sasdy
- Acteurs : Ingrid Pitt, Maurice Denham, Nigel Green
- Genre : Épouvante-horreur
- Nationalité : Britannique
- Editeur vidéo : Elephant Films
- Durée : 1h36mn
- Titre original : Countess Dracula
- Âge : Interdit aux moins de 12 ans
- Date de sortie : 1er janvier 1972
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– Sortie du combo blu-ray-DVD : 6 mai 2014
Au début des années 70, la firme Hammer, connue pour sa série des Dracula, tente de se renouveler en s’intéressant à une figure historique sanguinaire, la comtesse hongroise Elizabeth Báthory. Mais l’ensemble demeure trop désincarné pour convaincre.
L’argument : Vieille et amère, la comtesse Elisabeth découvre à la suite d’un incident que le sang de sa femme de chambre peut lui apporter la jeunesse éternelle. Elle ordonne que la jeune femme soit assassinée, et vidée de son sang. Désormais, la comtesse a trouvé le visage de ses vingt ans. Mais ce sanglant prodige ne dure pas : il lui faudra assassiner d’autres innocentes victimes pour continuer d’apparaître jeune et belle...
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Notre avis : Comtesse Dracula fait partie des six classiques de la Hammer qu’Elephant Films nous propose de découvrir en versions Blu-ray/DVD restaurées. La firme anglaise étant connue pour ses films fantastiques en costumes et leur photographie soignée pleine de couleurs chatoyantes, on appréciera d’autant plus un tel travail. Retour donc en 1971. La Hammer n’est pas en meilleure forme. Son approche un peu "conservatrice" est largement dépassée par le renouveau du cinéma d’épouvante, qu’il vienne des États-Unis ou d’Italie. Elle décide alors d’aller plus loin qu’à l’accoutumée dans le cocktail explosif d’érotisme et d’horreur, notamment avec une trilogie basée sur le texte classique du vampirisme Carmilla de Sheridan Le Fanu : The Vampire Lovers (1970), Lust for a Vampire (1971) et Les sévisses de Dracula (Twins of Evil, 1971). Comtesse Dracula s’inscrit dans cette volonté d’un renouveau du cinéma gothique vers plus de sensualité et de perversions. Mais contrairement à ce que le titre du film suggère, il n’est point question de vampirisme ici, mais d’une adaptation de l’histoire sanglante de la fameuse Elizabeth Báthory et son désir de rester éternellement jeune en se baignant dans le sang de jeunes vierges assassinées à cet effet. L’aspect historique prend donc le pas sur l’horreur et le fantastique, bien que la dimension tragique manque cruellement et qu’on préférera se tourner vers des adaptations comme Les lèvres rouges (1971) de Harry Kumel ou La Comtesse (2009) de Julie Delpy quant aux méfaits cruels et sinistres de la comtesse hongroise, qui ont au demeurant souvent inspiré le cinéma.
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Les liens thématiques avec le vampirisme restent néanmoins très présents, notamment ceux liés à l’immortalité et au besoin de sang de jeunes filles. Indirectement, les pratiques de Báthory ont d’ailleurs servi de source au texte de Sheridan Le Fanu, qui influencera ensuite le Dracula de Bram Stoker. Donc nous ne sommes pas non plus dans un racolage mensonger même si la Hammer jouait évidemment sur sa réputation avec un titre pareil. Pour rendre au mieux l’ambiance est-européenne, le metteur en scène Peter Sasdy, d’origine hongroise, est embauché après une carrière assez fournie à la télévision britannique. Il travaille avec un autre hongrois Alexander Paal sur l’histoire, ensuite remaniée par Jeremy Paul. Les acteurs eux mêmes ont souvent des origines étrangères : Ingrid Pitt était née en Pologne et Sandor Elès à Budapest. L’action se déroule au XVIIe siècle et, même si une très grande partie de l’intrigue se situe à l’intérieur du château, on ne peut nier la splendeur des décors qui seraient apparemment ceux d’Anne des mille jours (1969) de Charles Jarrott. Le problème du film est pourtant qu’il lui manque une vraie atmosphère malsaine et envoûtante, qui se serait pourtant facilement pliée à un tel sujet, quelque part entre perversions incestueuses et conte de fées dégénéré. Comtesse Dracula souffre donc de ce contraste entre une somptueuse reconstitution et un manque de caractérisation et de profondeur quant aux personnages. On ne parlera pas des maquillages ridicules, qui ont souvent été le grand point faible de la Hammer. Les acteurs font pourtant du bon boulot dans l’ensemble, bien qu’ils soient tous éclipsés par la performance de la sculpturale Ingrid Pitt.
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En effet, dans Comtesse Dracula, tout repose sur cette actrice plantureuse, et la scène où elle est surprise nue dans sa baignoire reste une image mémorable. Bien loin du fantastique, l’intrigue s’attarde sur un dilemme domestique et sur sa relation à ses deux amants : le mûr capitaine Dobi (Nigel Green), capable de tuer pour elle, et le jeune officier Imre Toth (Sandor Elès). Rebaptisée Nadasdy dans le film, la comtesse est prête à tout pour redevenir jeune et belle, et non pas la vieille femme aigrie, vieillissante et couverte de verrues qu’elle voit quand elle se regarde dans le miroir. Elle est incapable d’empathie et de compassion. Seule son apparence compte. La vie des autres ne vaut rien en comparaison du bonheur que lui apporte la beauté. C’est une vision de la folie fort intéressante bien que trop peu creusée. Elle n’hésite d’ailleurs pas à faire retenir sa fille prisonnière (jouée par Lesley-Anne Down dans un petit rôle) et à prendre son identité. Machiavélique, il y a aussi une innocence perverse chez elle, notamment quand elle tombe amoureuse de Toth, s’amusant à changer de rôle entre celui de la fille et de la belle-mère. L’attitude du jeune homme est d’ailleurs fort ambiguë car, même après avoir appris la supercherie, il semble comme en état de stupéfaction face à cette relation presque incestueuse. On aurait aimé que Sasdy creuse plus avant cette complexité des sentiments, sans parler du personnage de Dobi, mais, comme pour sa mise en scène, il semble toujours en retrait, jamais vraiment impliqué dans son sujet, restant à la surface des choses.
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Au final, demeurent une intrigue bien mince et lente (un chapitre d’un livre sur les sacrifices de sang explique tout le stratagème), une Ingrid Pitt possédée par le rôle d’une femme en quête de sensualité qui vit le vieillissement comme une malédiction et une réalisation timide en termes de cruauté, ce qui est le comble pour un film d’horreur. Les clichés du genre gothique et du conte s’accumulent (la comtesse cruelle étant un stéréotype en soi) et encore une fois chez la Hammer, le décor et les costumes semblent primer sur tout le reste. C’est bien dommage.
Le DVD
Une édition limitée Blu-Ray + DVD qui rend hommage à la photographie et aux couleurs des costumes et décors, agrémentée d’une présentation par Alain Schlockoff.
Les suppléments
Mise à part la présentation d’un peu moins d’une vingtaine de minutes d’Alain Schlockoff de L’écran fantastique, il n’y a pas grand chose à se mettre sous la dent en termes de bonus, juste les bandes annonces d’autres films de la collection et une galerie d’images.
Image
Le travail de restauration est impeccable, si ce n’est le grain épais qui apparaît sur quelques très rares plans, et rend hommage au travail de la photographie de Kenneth Talbot. Les couleurs sont superbes et soulignent la beauté des acteurs et des décors. Pour le Blu-Ray, il s’agit d’un encodage full HD 1920x1080p. Le format du film est respecté en 16/9.
Son
Le film est uniquement en version anglaise avec des sous-titres français, en Dolby Digital Mono pour le DVD et en DTS HD Dual Mono pour le Blu-Ray. Hélas, même dans la version originale, la voix d’Ingrid Pitt avait été doublée, ce qui l’avait d’ailleurs rendue furieuse. Quant à la musique de Harry Robertson, un habitué de la Hammer, elle abuse trop souvent d’une grandiloquence kitsch et n’aide en rien un film en manque d’atmosphères et de climats troubles.
Galerie Photos
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