Colin Firth en quête de rédemption chez Woody Allen

Colin Firth est à l’affiche du nouveau Woody Allen. Une opportunité dans une carrière en grande difficulté ?

De Love Actually à Mamma Mia, en passant par Nanny McPhee ou Un Mari de trop, de St Trinian à Ce dont rêvent les filles... les choix de Colin Firth reflétaient, dans les années 2000, un plan de carrière assez paradoxal. Cet acteur britannique révélé aux côtés de Ruppert Everett dans Another Country Histoire d’une trahison (1984), futur Valmont pour Milos Forman, était enfin récupéré par Hollywood, au prix de petits rôles secondaires assez fades, souvent comme père de famille fade. La star de la série télé Orgueil et préjugés, second rôle émérite dans Le Patient anglais ou Shakespeare in love, se globalisait dans des productions pour adolescents ou pour femmes célibataires avides de Bridget Jones où il interprétait le fameux Mark Darcy.
Tout a changé avec son rôle d’homosexuel dépressif dans A single Man de Tom Ford en 2009, qui lui vaut un prix d’interprétation masculine à Venise. L’oeuvre magnifique du styliste lui offre des opportunités magnifiques qui atteignent un paroxysme avec Le Discours du roi en 2010. Dans le film de Tom Hooper, il incarne George VI, roi bègue, avec une intensité de jeu qui ne fait aucun doute : l’Oscar du meilleur acteur sera le sien, et cela n’a pas raté. Dans ce chef d’oeuvre d’académisme de bon goût, tout était admirable, Colin Firth le premier.
La suite fait moins rêver. A l’exception de La Taupe, film d’espionnage anti commercial, de Tomas Alfredson, où son interprétation est tout de même noyée dans un casting haut de gamme (Tom Hardy, Gary Oldman, John Hurt...), Colin Firth va accumuler les mauvais choix et les flops : en 2014 l’adaptation du roman Avant d’aller dormir et le mélo Les Voies du destin, tous deux avec Nicole Kidman, sont d’effroyables revers commerciaux. Les 3 crimes de West Memphis d’Atom Egoyan ne sort qu’en vidéo, et Arthur Newman avec Emily Blunt déprime ses acteurs, ses producteurs et les quelques spectateurs qui s’égarent dans les salles le projetant : il n’est exploité en France qu’en contre-programmation cannoise, un an après sa sortie américaine. Et on n’oubliera pas, en 2013, l’échec patent du médiocre Gambit, où il partageait l’affiche avec la bombe comique Cameron Diaz. Le duo ne fonctionne pas, malgré la caution des frères Coen.

Aussi, la sortie de Magic in the Moonlight de Woody Allen peut apparaître comme une opportunité de rédemption après tant de bévues ou, du moins, d’actes malchanceux qui, pour certains, auraient pu payer. Mais voilà, le dernier Allen, fantaisie charmante tournée sur la French Riviera, n’est pas exactement le meilleur film du maître new-yorkais, et pourrait desservir, in fine, la carrière de Colin Firth dont la seule issue immédiate serait le succès du blockbuster Kingsman : The Secret Service de Matthew Vaughn (X Men Le commencement, Kick Ass) où il jouera un agent secret bien armé, dans une oeuvre calibrée pour le grand succès.
Colin Firth retrouvera-t-il alors la voix qu’il a perdu dans l’industrie hollywoodienne ? En tout cas, à la dernière minute, en juin dernier, il décidait de retirer cette voix du projet Paddington, encore avec Nicole Kidman, puisqu’il devait doubler l’ours mythique, en images de synthèse. Une décision inopinée qui n’a pas plu à ses producteurs, contraints de trouver un remplaçant (Ben Whishaw) lorsque le film entrait en post-production.
L’acteur retrouvera toutefois Nicole Kidman, et oui, une fois de plus, en 2015, dans Genius de Michael Grandage, un biopic, mais aussi un premier film risqué.

Filmographie ©Twentieth Century Fox