Le 27 mai 2020
Cette course-poursuite dans des paysages arides est plutôt répétitive. Les relents machistes et colonialistes de ce film taillé pour ses interprètes rendent même l’ensemble particulièrement antipathique.


- Réalisateur : Henri Verneuil
- Acteurs : Lino Ventura, Jean-Paul Belmondo, Bernard Blier, Gert Fröbe, Andréa Parisy, Reginald Kernan
- Genre : Aventures, Noir et blanc
- Nationalité : Français, Italien
- Distributeur : Gaumont Distribution
- Durée : 2h10mn
- Date télé : 4 décembre 2021 22:40
- Chaîne : OCS Géants
- Box-office : 3 441 118 entrées (France) dont 1 041 463 (Paris)
- Date de sortie : 17 avril 1964
- Festival : Festival de Cannes 1964

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Résumé : Aux portes du désert, Castigliano dirige une entreprise de transports routiers. Hans doit conduire un chargement clandestin de cent mille dollars au coeur de l’Afrique. L’apprenant, Rocco élimine le chauffeur, vole son véhicule et part avec sa complice. Castigliano promet alors une forte récompense à Marec s’il récupère le camion. Commence une folle poursuite...
Critique : Depuis La Vache et le Prisonnier, comédie qui fut un succès mondial, Henri Verneuil enchaîne les succès : Le Président, Un singe en hiver et surtout Mélodie en sous-sol, avec son duo de vedettes, Gabin et Delon, dans un casse qui rapportera plus 3,5 millions d’entrées en salle. Pour tourner Cent mille dollars au soleil, le metteur en scène dispose d’un budget confortable qui lui permet de poser sa caméra au Maroc, avec un casting de luxe (Blier, Ventura, Belmondo), Cette adaptation du roman d’aventures Nous n’irons pas en Nigéria, écrit par Claude Veillot, est un ersatz de western, qui substitue les vastes étendues sahariennes aux espaces légendaires de Monument Valley. L’histoire, qui constitue une sorte d’hybridation du Salaire de la peur et d’Un taxi pour Tobrouk, démarre plutôt lentement, comme s’il fallait assurer des numéros d’acteurs aiguisés par la plume de Michel Audiard, lequel, comme à l’accoutumée, multiplie les bons mots ou les expression fleuries.
Or, il y a un paquet de séquences qui n’ont vraiment aucune utilité : ainsi, la virée nocturne qui précède le vol du camion par Rocco n’apporte rien à l’intrigue. Elle s’étire même en longueur. Les propos éthyliques de Marec et Mitch-Mitch, vaguement calqués sur la célèbre scène de cuisine des Tontons Flingueurs, ne sont qu’un prétexte à des cabotinages successifs. Il y a, dès le début, comme une volonté de masquer un scénario bien mince, qui tient en une ligne : une course-poursuite plutôt répétitive pour un mystérieux contenu de 100.000 dollars. Beaucoup plus gênant encore : le long métrage exhale des relents de colonialisme insupportable, traitant les Marocains en indigènes aux expressions souvent ahuries, vivant dans une forme d’enfance, et à qui la force des Blancs européens impose constamment sa férule : on mentionnera exemplairement le saccage d’une épicerie et la forfanterie du destructeur Marec comme symboles de cette violence.
Si les paysages désertiques, souvent filmés en grand angle, ont la beauté majestueuse des décors de western, on s’y ennuie plutôt souvent. Reste la grâce naturelle de Jean-Paul Belmondo, mais les répliques machistes de son personnage, notamment assénées à la pauvre Pepa, rendent le film encore plus antipathique. Les phrases sexistes abondent sous la plume du très viriliste Michel Audiard : "Tout ce que tu peux vendre c’est toi, et encore tu te vendrais mal, tu es trop gentille" rétorque tranquille Rocco à la féminité implorante. Non, décidément, le divertissement de Verneuil n’a vraiment rien pour plaire, aujourd’hui. Or, à l’époque, il fut un succès rassemblant plus de trois millions de spectateurs. Il fit même partie de la sélection officielle du Festival de Cannes 1964, ce qui provoqua un scandale.