Le 10 avril 2024
- Scénariste : Eldiablo>
- Dessinateur : Djilian Deroche
- Genre : Western
- Editeur : Sarbacane
- Famille : Roman graphique
- Date de sortie : 6 mars 2024
Un western rugueux au scénario endiablé dans le Grand Nord canadien.
Résumé : Installé depuis des années sur une colline située en marge du bourg de Sinnergulch, Gus Carcajou est un chercheur d’or solide et solitaire au caractère bien trempé, qui ne se rend à la ville que pour troquer son or contre quelques bouteilles de tord-boyau. Si Carcajou est pris par la fièvre de l’or, c’est la fièvre du pétrole qui marque Sinnergulch en cette fin du XIXe siècle. Tenue d’une main de fer par l’entrepreneur Jay Foxton, dirigeant de la compagnie d’extraction à son nom, et ses lieutenants – parmi lesquels le maire et le sheriff – la ville bat au rythme des derricks. Lorsqu’il découvre que la colline où vit Carcajou regorge de pétrole, Foxton n’a qu’une idée en tête : acquérir ce terrain, à tout prix. Mais Carcajou n’est pas du genre à se laisser faire…
Critique :Également connu sous le nom de wolverine, le carcajou est un mammifère farouche, qualifié au Canada d’animal le plus féroce du Grand Nord. C’est revêtu d’une peau de cette bête que Gus Carcajou descend à Sinnergulch, où il est confronté à un mélange de crainte et d’animosité des habitants. Et c’est en effet un western féroce qui attend les lecteurs de Carcajou, avec les codes classiques du genre : nature aussi belle qu’hostile, ambiance de saloon, personnages archétypaux, fièvre de l’or (noir) et libéralisme débridé, violence d’une communauté isolée qui s’affranchit des lois… Imaginé par Eldiablo, scénariste chevronné dont la carrière navigue entre la bande dessinée et l’audiovisuel (Lascars, Kassos...), Carcajou oppose la modernité, incarnée par Jay Foxton qui souhaite développer Sinnergulch autour de l’industrie pétrolière, au monde sauvage que représente le personnage éponyme. Cette confrontation savamment construite constitue le fil rouge d’un récit riche en surprises, et qui mobilise pleinement l’imaginaire du Grand Nord. Par son histoire, son ascendance Nakoda – tribu indienne de la région – et sa capacité à survivre en milieu hostile, Gus Carcajou est au centre de superstitions. Serait-il un wendigo, ces créatures maléfiques et anthropophages qui peuplent les forêts et que craignaient les Premières Nations ? Comment expliquer que l’entreprise de Jay Foxton déraille après que celui-ci s’en soit pris à lui ?
- © Eldiablo, Djilian Deroche/ Sarbacane
Autant de questions qui trottent dans l’esprit des habitants et du lecteur, et qui trouvent leur résolution à l’issue d’une lecture prenante. La mise en place très efficace du récit et le dessin au trait semi-réaliste de Djilian Deroche – aussi à l’aise pour figurer les grands espaces que la promiscuité du saloon – nous entraînent avec une grande efficacité dans ce récit ample (220 pages) durant lequel on ne s’ennuie jamais. Si le virilisme propre au lieu et à l’époque est bien présent, les auteurs ne tombent pas dans la caricature, grâce à la présence de personnages féminins forts, incarné dans le récit par Linda, tenancière du « Horny Squirrel » qui tient tête à Jay Foxton.
- © Eldiablo, Djilian Deroche/ Sarbacane
Sur le plan graphique, on s’arrête avec plaisir sur les dessins en pleine page de Djilian Deroche, sur ses décors soigneusement travaillés. Le dessinateur brille également par l’efficacité de sa mise en couleurs, qui participe pleinement à l’ambiance du récit. Jeune artiste qui a essentiellement réalisé des albums jeunesse jusqu’ici, notamment aux Éditions La Martinière (Pirates, Les dieux de l’Égypte), Deroche témoigne ici d’un véritable talent.
Western dans le Grand Nord, Carcajou joue avec bonheur avec les codes du genre pour livrer un récit nerveux au graphisme soigné. Une très belle découverte de ce printemps.
224 pages – 26 €
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