Le 19 novembre 2015
Un portrait passionnant de Thomas Sankara, président atypique du Burkina Faso (1983-1987), ayant engagé des réformes sans précédent pour son peuple. Un "feel good documentaire" aussi précieux qu’essentiel.
- Réalisateur : Christophe Cupelin
- Genre : Documentaire
- Nationalité : Suisse
- Durée : 1h30mn
- Date de sortie : 25 novembre 2015
- Plus d'informations : Le site officiel du film
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Un portrait passionnant de Thomas Sankara, président atypique du Burkina Faso (1983-1987), ayant engagé des réformes sans précédent pour son peuple. Un feel good documentaire aussi précieux qu’essentiel.
L’argument : Capitaine Thomas Sankara dévoile le destin unique du président du Burkina Faso, de son élection en 1983 à son assassinat en 1987. Révolutionnaire, féministe et écologiste, Thomas Sankara a transformé un des pays les plus pauvres du monde en défendant la voix des exclus pour réclamer l’annulation de la dette africaine. Ces archives étonnantes redonnent la parole à ce leader charismatique qui a marqué les consciences bien au-delà de l’Afrique.
Notre avis : Ancienne colonie française, le Burkina Faso figure depuis plusieurs années parmi les dix pays les moins développés du monde. Alors que les années 80 sont marquées par de profondes mutations sur le plan géopolitique (chute du mur de Berlin entre autres), le Burkina Faso a engagé à cette époque sa révolution.
Pour son premier long métrage, Capitaine Thomas Sankara, le cinéaste suisse Christophe Cupelin s’intéresse à Thomas Sankara, un jeune militaire local de 33 ans ayant accédé au pouvoir, le 4 août 1983, suite à un coup d’Etat.
Ce documentaire se base sur de nombreuses images d’archives et sur des documents audiovisuels, dont certains n’ont été disponibles qu’en 2007, à l’occasion du vingtième anniversaire de la mort de Thomas Sankara.
Ce qui pourrait constituer la description d’un énième dictateur africain, révèle au contraire un chef d’Etat anti-conformiste, ayant fait du développement de son peuple son credo. Avec un salaire net de seulement 138’736 francs CFA par mois (environ 230 euros), Thomas Sankara se présente comme un dirigeant modeste et de surcroît accessible. Il se plaît à pratiquer des activités culturelles et sportives au milieu de son peuple.
Avec brio, le documentaire révèle les deux faces de Thomas Sankara : l’homme généreux et enthousiaste dans sa vie quotidienne (l’insouciance de la jeunesse ?) et le chef d’Etat charismatique qu’il était.
Orateur talentueux, il est décrit comme à l’aise aussi bien devant une foule de concitoyens que devant des dirigeants étrangers. Ce leader proclamait haut et fort l’amour de sa patrie avec des expressions faisant mouche : une justice au service de la patrie ; la patrie ou la mort nous vaincrons, ce slogan ponctuant chacun de ses discours.
Pour autant, Thomas Sankara n’en était pas pou autant un homme politique démagogique.
Derrière les mots, se tiennent les actions d’un homme de terrain déterminé et passionné. Très cultivé, Thomas Sankara faisait preuve durant son mandat d’une ouverture d’esprit presque hallucinante. Moult exemples à l’appui, ce documentaire explique que ce révolutionnaire s’était engagé dans des transformations radicales des structures économiques et sociales de son pays. Les mesures prises ont été ambitieuses et englobaient des sujets aussi essentiels que variés : l’émancipation des femmes (suppression de l’excision, un salaire donné aux femmes) ; la lutte contre l’analphabétisme ; la construction de logements, de barrages, de rails de chemins de fer ou encore la mise en place de tribunaux populaires pour lutter contre corruption. Et puis ce dirigeant était en avance sur son temps par son discours pro-écologique, comme le prouve son programme massif de reboisement pour éradiquer la désertification.
Thomas Sankara voulait libérer les mentalités et donner à son peuple les moyens d’accéder à un monde meilleur. Il se posait en père de la nation.
Le documentaire, très (trop ?) flatteur à son égard ne passe pas sous silence les zones d’ombre de l’homme politique : l’élimination de certains de ses opposants lors de sa prise de pouvoir ; son lien trouble avec Kadhafi. On aurait toutefois apprécié davantage de recul par rapport au capital de sympathie que le cinéaste lui porte, et plus de place accordé à ses erreurs politiques certaines.
Aussi, on gardera de Thomas Sankara l’image d’un chef d’Etat de tendance marxiste, ayant eu comme souci permanent le bien-être de son peuple en réformant en profondeur son pays. Anti-impérialiste, anti-colonialiste, anti-capitaliste, il était intervenu avec vigueur à l’ONU ou au sommet des membres de l’OUA. Il a notamment sollicité l’effacement de la dette des pays d’Afrique, ce qui n’a pas plu à tout le monde.
C’est finalement sans grande surprise que le destin de Thomas Sankara s’est achevé de façon brutale le 15 octobre 1987. Son assassinat l’a érigé en une figure quasi mythique. Ainsi, si l’homme est mort, ses idées sont toujours vivaces.
En ces heures sombres où Paris a été victime le vendredi 13 novembre 2015 de la plus grande des barbaries, on ne peut s’empêcher de faire un parallèle avec ce feel good documentaire qui vient à point nommé. Capitaine Thomas Sankara est l’illustration d’un dirigeant politique qui peut faire de ses concitoyens et de son pays une priorité, et prôner plus que tout la cohésion de son peuple. Ce documentaire vient donc à point pour redorer le blason politique en mettant en lumière l’exercice du pouvoir d’un chef d’Etat qu’on aurait aimé côtoyer.
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