Back in the woods
Le 19 septembre 2016
En 1999, le micro-budget Blair Witch Project entrait dans la légende. 17 ans plus tard, l’œuvre culte se voit enfin gratifiée d’une vraie suite. Douche froide malheureusement, car celle-ci ne parvient jamais à suivre son modèle, piégée par son manque d’audace et son trop grand classicisme.
- Réalisateur : Adam Wingard
- Acteurs : James Allen McCune, Callie Hernandez, Corbin Reid
- Genre : Épouvante-horreur, Documenteur / Found-footage
- Nationalité : Américain
- Durée : 1h30mn
- Titre original : Blair Witch
- Date de sortie : 21 septembre 2016
- Festival : L’Etrange Festival 2016
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Résumé : James et un groupe d’amis décident de s’aventurer dans la forêt de Black Hills dans le Maryland, afin d’élucider les mystères autour de la disparition en 1994 de sa sœur, que beaucoup croient liée à la légende de Blair Witch. Au départ, les jeunes étudiants s’estiment chanceux en tombant sur deux personnes de la région qui leur proposent de les guider à travers les bois sombres et sinueux. Mais tandis qu’ils s’enfoncent dans la nuit, le groupe est assailli par une présence menaçante. Peu à peu, ils commencent à comprendre que la légende est bien réelle et bien plus terrifiante que ce qu’ils pouvaient imaginer..
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Cette année apparaissait un mystérieux projet sobrement nommé The Woods. Très attendu, le film est diffusé en avant-première du Comic-Con 2016, et là la surprise est totale : les journalistes présents découvrent en effet ni plus ni moins suite officielle du culte Projet Blair Witch, et qui, afin d’officialiser sa parenté avec le phénomène horrifique de 1999, se voit renommé simplement Blair Witch. Voilà de quoi soulever le buzz autour d’une saga qui y est habituée, le premier opus étant à l’époque sortie sous le coup d’une très efficace campagne marketing sur Internet à une époque où cela était encore peu commun, présentant les faits fictifs du film comme réels, avec disparition du cast... Bien que reprenant un concept déjà exploité dans l’illustre Cannibal Holocaust de Deodato (1980), The Blair Witch Project (1999) avait su oser la différence, par le biais de sa réalisation au camescope, utilisant le procédé du found-footage. Le résultat ne faisait que suggérer en filmant les brindilles à une époque où le surnaturel horrifique à l’écran était frontal.
Mais voilà, en dix-huit ans les choses ont bien changé, et ce Blair Witch débarque dans un contexte où le procédé du found-footage est arrivé en bout de course, surexploité, et ce jusqu’à l’overdose, dans des longs paranormaux et méphistophéliques souvent navrants de nullité (The Devil Inside, Paranormal Activity 4 & 5, The Baby, Pyramide...).
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La réalisation a été confiée à Adam Winsgard, jeune réalisateur ingénieux dont le choix s’avère tout à fait logique quand on sait qu’il a également contribué à des segments des deux premiers V/H/S, anthologie usant justement du procédé du found-footage. Le bonhomme, habitué à pareille économie de budget, parvient à se débrouiller et à proposer quelques petites choses intéressantes ici-et-là, ce qui n’empêche pas l’ensemble de macérer dans un sentiment de déception, puisque peu à peu l’esprit du premier opus disparaît pour s’ancrer dans une modernité qui ne lui sied guère.
Blair Witch commence donc par une exposition assez laborieuse, nous présentant une série de personnages tristement stéréotypés, ce qui nuit considérablement à l’immersion dans une fiction jouant justement sur sa prétendue véracité (à moins qu’il s’agisse là d’une maladroite tentative afin de s’éloigner de ce gimmick par trop souvent utilisé ?). Histoire de ne pas trop s’embêter avec son concept de caméra intradiégétique, le cinéaste décide d’ailleurs d’utiliser des mini-caméras accrochées aux oreilles de ses protagonistes, ainsi qu’un drone destiné à multiplier les angles de vue. Un choix qui s’avère payant et qui suspend quelques commentaires ironiques habituels au genre ("pourquoi il continue de filmer ?", "c’est qui qui tient la caméra ?"). Payant donc, et pourtant assez mal exploité, car l’impression subsiste d’une œuvre tiraillée entre sa volonté de renouer avec ses racines tout en s’en éloignant pour des raisons bassement plus commerciales.
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Sans surprise, Blair Witch est par ailleurs bien moins subtil que l’original dont la fin demeure un paroxisme dans l’épouvante suggéré. Ce dernier faisait ainsi preuve d’une grande discrétion quant à la présence de l’horreur à l’écran, celle-ci étant disséminée qu’en de très rares instants. C’était là sa force ou sa faiblesse, selon les goûts de chacun, mais au moins un climat de mystère planait quant au devenir et à la menace planant sur les protagonistes. Ici il n’est plus question de doutes réalistes : les tentes s’envolent toutes seules, les os se brisent par la faute d’artefacts mystérieux, et la présence d’une entité maléfique nous est clairement explicitée. Les inquiétants bruissement et murmures des arbres du film de 1999 font ici place à de véritables tempêtes de troncs brisés. Il n’est donc plus question de pistes à explorer, celles-ci sont pour ainsi dire toutes balayées, et le spectateur n’aura d’autres choix que d’accepter l’unique piste narrative qu’on lui offre là où l’original offrait plusieurs alternatives de lecture très satisfaisantes.
Certes, certains moments parviennent à susciter un certain sentiment de stress et le film a l’intelligence de ne pas tout dévoiler de l’entité qui hante les bois (pour une éventuelle suite ?). Mais le sentiment est léger et même la scène finale, qui était le point d’orgue de l’œuvre matricielle, s’avère ici tout simplement frustrante. D’autant plus que, après la vague de films en caméra à l’épaule aux plans finaux toujours identiques, nous aurions aimé une réelle remise en question d’un support banalisé à l’excès. Il n’en sera rien.
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Sous ses allures de séquelles, Blair Witch ressemble donc à un simple remake. Il fait d’ailleurs totalement fi des évènements de l’oubliable et oublié Blair Witch 2 : le livre des ombres, ne les citant que pour les démonter au détour d’une réplique. Une déception avérée donc, jusqu’au box-office américain, dont on aurait pourtant aimé qu’elle marque le genre comme son ancêtre avait su le faire en son temps. Bref, un found-footage de plus au milieu d’un genre totalement mort et désincarné.
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