Le 20 novembre 2020
- Dessinateurs : Frank Margerin, Cyril Pedrosa
- Famille : BD Franco-belge
- Festival : Bédérama 2020
- Date de sortie : 21 septembre 2020
Sur ce dimanche de clôture du festival Bédérama se sont succédés Libon, Frank Margerin, Cyril Pedrosa pour finir avec le film d’animation Josep réalisé par Aurel. Une journée très riche.
Résumé : L’occasion d’aller à la rencontre de deux auteurs phares de la BD : Frank Margerin et Cyril Pedrosa. Frank Margerin, l’auteur incontournable de Lucien revient sur l’ensemble de sa carrière alors que Cyril Pedrosa nous parle de la sortie du tome 2 de L’âge d’or, sa BD réalisée avec Roxane Moreil.
Frank Margerin et Cyril Pedrosa, deux univers opposés.
Frank Margerin raconte au micro de Sonia Déchamps qu’il a démarré par des études à l’école des Arts Appliqués pour obtenir un diplôme de dessinateur textile mais il lorgnait déjà vers la BD. Fan des journaux Pilote et Spirou, mais pas du tout de Tintin, son rêve était de faire de la BD. Il a lu longtemps Pilote mais s’est détaché de Spirou qui n’évoluait pas avec ses envies. Son carton sous le bras, il a démarché des journaux et finalement, ses premiers petits dessins, comme il dit, ont été publiés dans Lui et Playboy.
En continuant à démarcher, il a rencontré chez Nathan une personne qui l’a renvoyé vers Jean-Pierre Dionnet à Métal Hurlant.
Là, il a vu sa première histoire acceptée. Lucien n’était pas encore né. Il créait des récits de science-fiction, normal pour Métal Hurlant, des histoires complètes de quelques planches.
Quand Philippe Manoeuvre est arrivé à Métal Hurlant et qu’il a voulu lancer un numéro spécial Rock, c’est à ce moment que Frank Margerin a proposé Lucien. Le personnage a plu, et Margerin était bien content car il tenait un héros dont il pourrait décliner les aventures. Il préférait nettement cela plutôt que de devoir reconstruire une histoire nouvelle à chaque fois.
La BD, il l’a apprise sur le tas lors de ses années Métal Hurlant, car il n’avait aucune formation dans ce domaine.
Lucien a duré de longues années, puis avec le succès, sont venus des propositions d’adaptation au cinéma qui n’ont pas abouties, puis en série télé. Mais échaudé par les échecs des développements pour le septième art, Frank Margerin a proposé un autre personnage, dérivé de Lucien, Manu, pour la télévision.
Il a écrit cent quatre épisodes de deux minutes et vingt-neuf de huit minutes pour cette série.
Mais comme Lucien lui manquait, du coup, il a relancé la BD en vieillissant le héros, lui donnant des enfants et un travail. Il se sentait ainsi plus proche du personnage, tout comme l’ont ressenti les lecteurs qui ont été heureux de voir que leur héros avaient vieilli avec eux.
Après Lucien et Manu, Frank Margerin créa Momo le coursier pour l’Écho des savanes.
Et quelques années plus tard, pour la première fois de sa vie, il travailla sur une BD dont il n’était pas scénariste, la série Je veux une Harley.
A côté de la BD, Frank Margerin a d’autres passions. D’abord la musique, il a d’ailleurs participé à plusieurs formations musicales, dont une avec les dessinateurs JC Denis et Vuillemin. Puis les motos, vous imaginez sa joie quand il a travaillé sur une série appelé Je veux une Harley.
Et les collections diverses et variées, comme les fly-tox ou les papiers d’emballages d’agrumes.
Dans une autre salle, pour un apéro dessiné virtuel, Cyril Pedrosa, n’ayant pu se rendre à Bédérama, était donc présent à distance via les outils numériques de télécommunication moderne. Cela ne l’a pas empêché de répondre aux questions de Alex Masson et du public et de nous parler du second tome de L’âge d’or qui est sorti le 6 novembre 2020. Une série qu’il réalise avec sa compagne, Roxanne Moreil.
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Un travail qui change de ses BD précédentes, Portugal ou Equinoxes, qui était plus intimiste alors qu’avec L’âge d’or il aborde une histoire médiévale aux nombreux personnages pour parler d’utopie. Comment aborder le discours politique ? Et quel discours ? C’est suite à ces interrogations qu’est né le projet de cette BD. Parler d’utopie ne fait pas de Cyril Pedrosa un optimiste, il se voit plutôt réaliste. Il nous rappelle que notre système actuel qui nous semble indétrônable n’a rien d’éternel. Il y en avait d’autres avant, et si l’on avait demandé aux gens du passé ce qu’ils auraient voulu changer, ils n’auraient pas su quoi répondre, mais cela ne voulait pas dire que le système ne pouvait être changé. L’histoire est en perpétuel mouvement, et nous ne sommes qu’à une étape de son déroulement. Ne pas tenir pour acquis notre système de fonctionnement politique n’est pas une utopie, c’est juste être réaliste.
Dans ses échanges avec Roxanne sur cette histoire, il fallait trouver comment illustrer ce récit, quelle forme lui donner. Il y a eu plusieurs inspirations : les vitraux, les tapisseries, les peintures et d’autres encore avant d’arriver au résultat final.
Cyril Pedrosa a travaillé d’une manière particulière. Le dessin réalisé sur papier en noir et blanc est ensuite scanné. Là, au numérique, il colorise et prend les traits noir pour les changer de couleur. Cela contribue à l’aspect particulier, riche, dense de cette BD.
Et la couleur est bien une des étapes qui donnent à l’auteur le plus de mal. Il doit essayer, tâtonner, se tromper et recommencer avant de trouver. Sur l’âge d’or, c’est au bout de cinquante pages qu’il a commencé à sentir, à voir les couleurs et comment les utiliser pour ce récit. Après, il construit ses ambiances colorées par renvoi et opposition des planches les unes par rapport aux autres.
Cette BD met en scène de l’action et pour gérer ces séquences, Cyril Pedrosa s’est rappelé ce qu’il avait appris quand il travaillait dans l’animation. Car c’est de là qu’il vient au départ. Les lignes de force, les dynamiques de dessin, il a repris tout cela pour faire vibrer les scènes d’action. Cyril Pedrosa dispose de cette formidable boîte à outils que lui a procuré l’animation. Mais il fait attention car cette boîte est à double tranchant.
Il faut savoir y puiser mais aussi savoir s’en éloigner pour ne pas tomber dans des habitudes de dessin où l’on ne prend plus de risque, où l’on se formate soi-même.
Histoire chorale, époque médiévale, action et épopée, discours politique, cette BD lui semble aujourd’hui son projet le plus abouti.
Cette histoire, qui devait s’étaler sur une BD de deux cent pages, fait donc finalement deux tomes de deux cent pages. Mais c’était important pour Roxanne Moreil et lui de la porter jusqu’au bout. C’est un projet ambitieux qui fit un peu peur au départ à Cyril Pedrosa. Se sentait-il de taille à s’embarquer sur une période aussi longue pour réaliser une telle BD ? Le découpage en deux tomes l’a beaucoup aidé. Et aujourd’hui, il ne regrette pas l’aventure.
Il a déjà l’idée de son prochain livre. Le titre, le sujet - une étape qui peut parfois prendre du temps pour agencer les événements avant d’arriver à une trame qui tient la route -. Mais maintenant que L’âge d’or est achevé, il sait déjà ce vers où il va se diriger.
Deux rencontres riches et passionnées par des auteurs qui adorent la BD, autant en écrire, en dessiner qu’en parler. Deux moments forts de ce dernier jour du festival Bédérama.
Photos : David Neau
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