Humains après tout
Le 28 décembre 2010
Le troisième film d’Isild Le Besco délaisse quelques tics de réalisation mais, s’il conserve une indéniable sauvagerie, Bas-fonds manque de profondeur et révèle une certaine naïveté.
- Réalisateur : Isild Le Besco
- Acteurs : Valérie Nataf, Ginger Romàn, Noémie Le Carrer
- Genre : Drame
- Nationalité : Français
- Date de sortie : 29 décembre 2010
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– Durée : 1h08mn
– Interdit aux moins de 12 ans
Le troisième film d’Isild Le Besco délaisse quelques tics de réalisation mais, s’il conserve une indéniable sauvagerie, Bas-fonds manque de profondeur et révèle une certaine naïveté.
L’argument : A la lisière de la civilisation, trois jeunes femmes, Magalie, Marie-Steph et Barbara, vivent perdues entre elles. Noyées d’alcool, elles se désirent, se prennent et se détestent comme des bouts de viande, emportées cependant peu à peu dans un jeu complexe de domination et d’amour. Magalie, la meneuse, subjugue de toute sa puissance mâle et son charisme bestial. Marie-Steph, sa petite sœur, est effacée et simplette, et Barbara, jolie sans le savoir, a rejoint la meute par amour pour Magalie. Un jour, à l’instigation de Magalie et presque par désœuvrement, elles braquent une petite boulangerie et tue le boulanger d’une décharge de chevrotine. La vie reprend peu à peu mais plus rien n’est pareil.
Notre avis : Dans son premier long-métrage, Demi-tarif, Isild Le Besco filmait trois enfants livrés à eux-mêmes en l’absence de leur mère. Dans Bas-fonds, c’est comme si ces enfants avaient grandi et continué sur la mauvaise pente. Totalement en marge de notre société, Magalie, Marie-Steph et Barbara habitent dans un appartement répugnant de saletés. Les trois jeunes femmes y vivent comme des animaux (l’une d’elle dort même avec un chien volé à son propriétaire). Magalie, la leader, qui regarde la chaîne porno à longueur de journée, passe son temps à vociférer, à insulter ses colocataires, pour qu’on lui apporte une bière ou lui serve ses raviolis, qu’elle mange à même la conserve. Autour d’elle, Marie-Steph se plie aux caprices de sa sœur, y compris physiquement (elle courbe de plus en plus l’échine au fil du film, comme si elle tendait à marcher sur les mains et les pieds, à quatre « pattes »). De son côté, Barbara possède en elle la plus grande part d’humanité. C’est elle qui reste la plus rattachée à la société (elle a un boulot). C’est la seule qui semble avoir la volonté de s’en sortir (pour devenir quoi ? pour se ranger dans la norme ?) malgré son amour pour Magalie.
Comme dans Charly, son précédent film, Isild Le Besco joue beaucoup sur la répétition. A travers un montage abusant des fondus au noir (histoire de renforcer la noirceur du drame qui se joue sous nos yeux), la jeune réalisatrice enchaîne d’abord les séquences de déchéance, de répugnance, où seule la télévision bénéficie d’un soin particulier (attention, message). On y retrouve aussi cette volonté de choquer le bourgeois, même si le film n’est finalement pas si trash que ce que l’on avait pu entendre après sa projection au festival de Locarno. Si la mise en scène donne beaucoup moins le tournis (cette manière de filmer « à l’arrache »), elle conserve cette esthétique DV crade, qui tend à appuyer le propos. Mais tout ceci paraît bien naïf, à l’instar de Charly. On sent bien le désir de montrer ces femmes (réduits à de la viande) comme des personnages malgré tout encore humains. Il est d’ailleurs intéressant de voir que c’est le meurtre qui les renvoie vers une forme d’humanité. Bas-fonds est une manière pour Le Besco de dire que ces femmes-là n’ont pas eu la chance d’avoir une vie « normale », faute d’éducation, notamment. La réalisatrice appuie alors lourdement son propos en désignant des parents qui ont totalement délaissé leurs enfants, qui ne leur portent au final aucune considération. La démonstration s’avère louable mais apparaît limitée et naïve. Et puis, l’ensemble se montre beaucoup trop écrit, beaucoup trop appuyé pour prétendre à une quelconque perspicacité, à une quelconque justesse.
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