Le 12 mars 2018
Entre patriotisme et résignation, America trace le portrait d’une Amérique contrastée et finalement attachante.
- Réalisateur : Claus Drexel
- Genre : Documentaire
- Nationalité : Français
- Distributeur : Diaphana Distribution
- Durée : 1h22mn
- Date télé : 2 février 2021 22:25
- Chaîne : OCS Choc
- Date de sortie : 14 mars 2018
L'a vu
Veut le voir
Résumé : Novembre 2016 : Les Etats-Unis s’apprêtent à élire leur nouveau président. {America} est un plongée vertigineuse au cœur de l’Arizona, à la rencontre des habitants d’une petite ville traversée par la Route 66, les héritiers cabossés du rêve américain qui nous livrent leurs espoirs et leurs craintes.
- © 2018 Diaphana. Tous droits réservés.
Notre avis : Après avoir filmé la pauvreté des sans-abris parisiens et la splendeur de la Ville-lumière dans son second long-métrage Au bord du monde en 2014, le réalisateur allemand Claus Drexel saisit avec la même ferveur les contrastes de cet immense pays capable de susciter autant d’admiration que de défiance. Une voix annonçant que « le rêve américain est mort » démarre le film. Certains pourtant veulent croire qu’il pourrait renaître
Pour nous emmener à la rencontre de « Rednecks », ces Américains profondément attachés à leur pays, Claus Drexel installe sa caméra au cœur des plaines mythiques du Far West, une terre de cow-boys où l’on vit librement, on l’on pense librement et où il n’est pas question de se plier à quelque diktat étatique, quelque part entre le Grand Canyon et Monument Valley.
- Copyright Sylvain Leser
A 300 kms de Phoenix et 600 de Los Angeles, dans ce coin perdu d’Arizona se trouve Seligman située sur la célèbre route 66 immortalisée par Les raisins de la colère de John Steinbeck racontant l’exode de fermiers ruinés vers la Californie, lors de la grande dépression des années 30. Après avoir connu des années glorieuses, en 1978, la route est déclassée au profit d’une autoroute qui contourne Seligman. Du jour au lendemain, la ville est désertée, les commerces périclitent. Quarante ans plus tard, le temps semble s’être définitivement arrêté dans cet endroit où les belles voitures des années 60 ne sont plus que des carcasses sans vie, abandonnées au milieu des herbes sèches et des panneaux rouillés et où les taudis contrastent avec des paysages à couper le souffle. Ici, comme ailleurs le sentiment d’abandon (« les gens sont mécontents de leur salaire, de leur assurance-maladie. Ils ne veulent ni d’une femme président, ni d’un homme noir » déclare une supportrice de Bernie Sanders) et la peur de l’autre (« Si vous décidez de vivre ici, soit vous adorez, soit vous détestez. Et si vous détestez, on veut pas de vous ici. Même si vous adorez, on voudra pas de vous » affirme la serveuse du seul bar du coin) ouvrent la porte à bon nombre de choix hasardeux.
- Copyright Sylvain Leser
Fuyant le cliché du péquenot obtus, le réalisateur nous offre une savoureuse galerie de personnages tantôt rustres, tantôt pétris de bon sens, toujours affables et surtout animés de contradictions touchantes. Alternant strictement plans de paysages et interviews, il choisit un cadrage -plan fixe et grand angle- destiné à les inscrire dans un décor qui raconte quelque chose d’eux de manière à nous les rendre proches. Un cow-boy jovial trônant au milieu de son magasin remplis d’armes nous vante la magnificence de ses jouets destinés à tromper l’ennui des autochtones. Deux solides gaillards occupés à dépecer à l’arrière de leur 4x4 le cerf qu’ils viennent d’abattre nous invitent à partager avec eux quelques bières, au milieu des mares de sang. Une jeune femme enceinte, les mains sur son ventre rond, affirme sans aucune gêne son envie de pouvoir assister un jour à une exécution capitale. Un collectionneur d’armes s’emporte avec lucidité contre la supercherie de la candidature de Trump quand quelque plans plus tard, un Indien hopi plein d’une spiritualité désormais révolue laisse planer un vent de sérénité. Un kaléidoscope de vignettes qui étonnent, amusent ou même choquent mais qui jamais ne laissent la place à l’indifférence.
Pourtant, le regard quelque peu condescendant de la vieille Europe sûre de sa culture et de ses principes à l’égard d’une Amérique en manque de réflexion, associé à la litanie obsédante sur le rapport aux armes finissent par amoindrir la force de ce documentaire à la beauté géographique ravageuse et à l’humour non feint.
- Copyright Sylvain Leser
D’un point de vue européen, la fascination naît de la capacité de ces Arizoniens mis à l’écart à pourtant se sacrifier pour la gloire de la nation plutôt que de défendre leur situation personnelle. Poussés par un élan viscéral et naïf, ils votent pour un Trump, perçu comme le candidat des riches et dont ils savent pertinemment qu’il ne sauvera jamais l’Amérique, juste pour le plaisir de mettre un coup de pied dans la fourmilière et d’espérer secrètement le retour de la grandeur de leur pays, qui, contre vents et marées, continue à leur inspirer respect et fierté.
Galerie Photos
Le choix du rédacteur
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.