All-Star Superman - La chronique BD

Urban ressort une édition intégrale regroupant les 12 volumes de la saga All-Star Superman réalisés par Grant Morrison et Frank Quietly et publiés aux États-Unis entre 2005 et 2008 chez DC comics.
A la source de cette série, la volonté d’alors de la maison d’édition de donner à des auteurs les clés d’un des grands comics maison. Le cahier des charges est simple, une liberté quasi totale et la volonté de s’émanciper du passif et des arcs narratifs en cours.

Le gallois Grant Morrison hérite du privilège de donner sa version du premier super-héros de l’histoire. Il fait alors le choix de ne pas explorer une nouvelle direction mais plutôt de synthétiser l’ensemble des aventures de Clark Kent afin d’en livrer une version définitive. Celui-ci n’étant pas tout jeune, la tâche est très ambitieuse.
Pour cela, il s’attache tout d’abord à ce qu’aucunes des figures du mythe ne soit oubliées, qu’elles soient évidentes ou extrêmement pointues. Ensuite, il fait le choix génial de condamner Superman. Superman est mourant ! Pas blessé à la suite d’un combat titanesque. Non, il se meurt, secrètement et lentement. Seul son bourreau, Lex Luthor partage son secret. Cependant Superman n’est pas agonisant, il est même plus fort que jamais. Telle une batterie solaire en surtension, il brille de mille feux avant son extinction annoncée. Que faire du peu de temps qu’il lui reste ?
C’est donc confronté à son funeste destin et à son incapacité à donner une descendance humaine qu’il va s’attaquer à ce qui restera comme son héritage : l’exécution de 12 travaux surhumains. La référence au mythe grecque est assumée, il sera même amené dans une de ces aventures à rencontrer Atlas et Samson qu’il affrontera dans un grand combat... de bras de fer.

En réinterprétant avec grand talent les fondamentaux du super-héros le plus populaire du 20e siècle, l’auteur parvient à revenir à la source de ce qui a fait de lui une icône, tout en lui donnant une empathie nouvelle. On prend énormément de plaisir à lire chacune de ces aventures qui se mêlent habilement à la narration. L’action est évidemment omniprésente mais l’émotion et parfois une certaine mélancolie jalonnent le récit. Les références sont nombreuses et nul doute que les néophytes seront perdus à la lecture de certains passages. C’est d’ailleurs le principal reproche qu’on peut faire à la série. Cependant, les 12 volumes forment un tout qui se suffit à lui-même et inutile d’être un expert pour apprécier la réussite de l’ensemble. C’est pour cette raison que nombre de fans considère cette œuvre comme la référence ultime des aventures de l’homme au slip rouge.

Comment ne pas parler, pour finir, des dessins de Frank Quietly. Premier choix de Grant Morrison pour s’atteler à cette tache considérable, l’illustrateur écossais livre une version brillante de chacun des personnages. La posture voutée et malhabile de Clark Kent en fait un personnage à part qui parvient à tromper même le lecteur bien qu’il partage rigoureusement les mêmes traits que Superman. C’est ce genre de détails, qui n’en est pas un, qui fait de Frank Quietly un des illustrateurs les plus doués de sa génération et de All-Star Superman une telle réussite.