Paranormal (in)activity
Le 27 janvier 2024
En sa qualité d’artiste non conformiste n’ayant pas besoin d’un budget de plus de 100 000$, David Lowery s’amuse à bousculer la vie, la mort, le temps, l’espace, l’amour mais aussi toutes les règles d’écriture scénaristiques... et il le fait bien !
- Réalisateur : David Lowery
- Acteurs : Casey Affleck, Rooney Mara
- Genre : Drame, Fantastique
- Nationalité : Américain
- Durée : 1h27mn
- Date télé : 27 janvier 2024 21:00
- Chaîne : OCS Pulp
- Date de sortie : 20 décembre 2017
- Festival : Festival de Deauville 2017, PIFFF 2017 (Paris International Fantastic Film Festival)
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Résumé : Apparaissant sous un drap blanc, le fantôme d’un homme rend visite à sa femme en deuil dans la maison de banlieue qu’ils partageaient encore récemment, pour y découvrir que dans ce nouvel état spectral, le temps n’a plus d’emprise sur lui. Condamné à ne plus être que simple spectateur de la vie qui fut la sienne, avec la femme qu’il aime, et qui toutes deux lui échappent inéluctablement, le fantôme se laisse entraîner dans un voyage à travers le temps et la mémoire, en proie aux ineffables questionnements de l’existence et à son incommensurabilité.
Critique : Oubliez tous les Conjuring, Ring et autres Poltergeist, la figure du fantôme que nous présente David Lowery n’a pas vocation à hanter vos cauchemars. Encore que, rien n’est moins sûr... Tel que l’imagine le réalisateur de Peter et Eliott le dragon, cet esprit venu d’outre-tombe prend une forme parfaitement enfantine, et donc intrinsèquement inoffensive : celle d’une silhouette sous un drap errant silencieusement dans les couloirs d’une maison abandonnée.
Le cinéaste-musicien retrouve pour l’occasion le couple de son film Les Amants du Texas, Rooney Mara et Casey Affleck, afin de mettre ce dernier sous le fameux drap. Bien plus encore que l’apparence attribuée au rôle-titre, le plus étonnant dans cette proposition de cinéma est assurément la forme du film lui-même, à savoir un mélodrame intimiste. Filmé en format 4/3 et à travers une photographie argentique, A Ghost Story s’assure une authenticité visuelle qui, couplée à une beauté musicale remarquable, donne corps aux sentiments au cœur de son scénario. Et de sentiments, le scénario n’en manque pas.
- Copyright Universal Pictures International France
Apparaissant avant tout comme une figure de deuil, le fantôme incarné par Casey Affleck ne cessera de hanter sa veuve, étant constamment présent lors de ses moments de chagrin. Des passages d’une telle amertume que le charme solaire de Rooney Mara ne parvient temporairement plus à irradier l’écran. Impossible alors de ne pas ressentir et même de partager la tristesse de cette jeune femme éplorée, allant jusqu’à ne pas savoir quoi penser de cette présence fantomatique, affectueusement pesante. Mais là où Lowery nous surprend, c’est dans sa volonté de ne pas vouloir nous émouvoir sur sa peine à elle, mais bien sur sa solitude à lui. Ici, pas de Bettlejuice pour faire de l’après-vie un moment de pur divertissement. L’éternité apparaît comme un long tourment pour ce qu’il reste de cet homme qui n’a de raison d’exister que l’espoir de revoir sa bien-aimée.
Cette affliction sans fin, Lowery parvient à la transcender grâce à une mise en scène et un montage qui mêlent humilité et poésie. Ses longs plans fixes ne sont pas sans rappeler certains classiques du cinéma japonais. Pourtant, contrairement à ceux-ci, souvent identifiables à leurs dialogues ciselés ou à la resplendissance de leurs décors, A Ghost Story tire son originalité du fait qu’il soit presque entièrement muet et filmé en intérieur. Il n’est pas non plus l’occasion de rechercher une performance d’acteur puisque, rappelons-le, son personnage principal et omniprésent est dissimulé sous un drap. Aucune fioriture de cinéma donc. Le spectateur se retrouve seul avec ses émotions, ses questions et face à au temps qui passe. Exactement dans la même position que ce fantôme tourmenté.
- Copyright Universal Pictures International France
Revenons un instant sur le « presque » qui fait que le film ne soit ni entièrement muet ni entièrement en intérieur. David Lowery s’autorise en effet quelques courtes scènes qui apparaissent en fin de compte comme de surprenantes ruptures de ton. En l’occurrence, une réappropriation des codes du film fantastique et un monologue nihiliste. Certainement pas de quoi satisfaire les détracteurs qui trouveront toujours à dire qu’« il ne se passe rien dans A Ghost Story » mais bien assez pour démontrer qu’il est un auteur qui aime s’affranchir de toutes les règles, même celles qu’il se créé lui-même.
Le résultat de ce pur exercice de style sensoriel est une occasion de faire abstraction de la superficialité inhérente au médium pour se permettre une plongée dans son propre rapport au temps qui passe. De quoi vivre un moment qui relève, sinon du spirituel, au moins du métaphysique, et s’interroger sur ses peurs les plus profondes que sont l’après-vie et la perte de l’être aimé. Après tout, pour qui a joué le jeu de s’immerger dans cette expérience introspective radicale, A Ghost Story restera certainement comme le plus angoissant des films de fantômes !
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