Volontaire - la critique du film

Notre avis : Voilà un film qui se glisse parfaitement dans cette période de parité forcenée. Marquée par son rôle de cheffe de clan mafieux dans Mafiosa, l’actrice-réalisatrice Hélène Fillières (elle réalise en 2013 Une histoire d’amour au succès mitigé) choisit pour ce deuxième long-métrage de démontrer la capacité des femmes à trouver leur place dans un milieu réservé aux hommes, en privilégiant la coexistence plutôt que l’affrontement entre les deux sexes. Elle fait alors s’enchevêtrer le chemin d’une toute jeune fille frêle et réservée qui découvre la vie avec celui d’un commandant de marine aguerri qui pense tout connaître de l’âme humaine et parvient à nous offrir un récit romanesque malgré la raideur de l’univers codé et hiérarchisé dans lequel il évolue.

Photo Michael Crotto (C) 2018 - Albertine Productions - Gaumont - France 2 Cinémas

Laure a grandi entre une mère artiste, profondément anti-militariste (Balasko plus vraie que nature) et un père laxiste (André Marcon) qui a toujours laissé sa femme prendre toutes les décisions. A la recherche d’une structure solide, elle décide d’intégrer l’armée et plus particulièrement la Marine, porteuse d’une notion d’élitisme chère à cette jeune femme cultivée et volontaire. Elle devient alors l’aspirant Baer et ne peut plus compter que sur l’amitié d’un de ses jeunes collègues, l’aspirant Dumont (l’épatant Corentin Fila), à la fois tendre et protecteur pendant que ses rapports avec leurs autres femmes, aux ambitions bien différentes des siennes, ne sont que défiance et incompréhension. Car Laure, afin de gravir les échelons, entend bien participer à la formation commando qui exige des qualités physiques et mentales jugées exclusivement masculines. Le commandant Rivière est intraitable. C’est réservé aux hommes et rien qu’aux hommes. Inenvisageable pour Laure de s’y immiscer.

Photo Michael Crotto (C) 2018 - Albertine Productions - Gaumont - France 2 Cinémas

C’est dans ce décor de l’Ecole Navale de Brest, doté de bâtiments épurés et d’un immense terre-plein face à la mer, que s’installe ce subtil corps à corps intellectuel, où la moindre trace d’émotion est occultée. A coups de scènes contemplatives, de plans géométriquement cadrés et de dialogues réduits à la portion congrue, Hélène Fillières nous convie par touches si tenues qu’elles risquent bien de lasser quelques spectateurs à assister à l’éclosion lente d’une relation improbable. Pourtant, une fois franchi le cap de cette raideur déstabilisante, on se laisse volontiers emportés par l’élégance de cette jeune femme capable de fissurer la façade d’autorité jusqu’à dévoiler la part de sensibilité d’un homme à l’implacabilité assumée, sans que jamais un geste ou un mot ne précisent la nature exacte de leur relation.
Car le plus bel atout de ce film est sans conteste son judicieux casting, à commencer par Diane Rouxel qui s’était déjà illustrée dans La Tête haute d’Emmanuelle Bercot
puis plus récemment dans Les garçons sauvages de Bertand Mandico. La jeune femme assume avec un réel talent son premier grand rôle et, à l’image de son personnage, impose son charme et sa féminité. La caméra ne s’y trompe pas et n’a de cesse de s’arrêter sur la beauté de son regard bleuté, auquel ne résiste pas le commandant Rivière à qui Lambert Wilson prête sans défaut son visage anguleux et sa silhouette élancée.
Très bien documenté grâce à la présence d’un conseiller militaire, Volontaire décrit au plus près l’engagement de ceux qui mettent leur vie au service de leur pays.
La scène finale, libératrice de sentiments trop longtemps enfouis, confirme définitivement que sous leurs allures martiales, les militaires ne sont pas que des brutes épaisses. Une bonne nouvelle !