Le 19 novembre 2019
- Réalisateur : Johnny Ma
- Acteurs : Zhao Xiaoli, Gan Guidan, Yan Xihu, Yan Huanghe, Deng Xiurong
- : Épicentre Films
- Nationalité : Chinois
- Date de sortie : 20 novembre 2019
- Durée : 1h39
- Festival : Festival de Cannes 2019, Quinzaine des réalisateurs 2019
Fable élégiaque sur les irréversibles mutations de la société chinoise, Vivre et chanter parvient, par sa sincérité et ses séquences oniriques, à faire survivre, l’espace de quelques bobines, la magie de l’opéra traditionnel du Sichuan.
Résumé : Zhao Li dirige une troupe d’opéra traditionnel de Sichuan qui vit et joue ensemble dans la banlieue de Chengdu. Quand elle reçoit un avis de démolition pour son théâtre, Zhao Li le cache aux autres membres de la compagnie et décide de se battre pour trouver un nouveau lieu, où ils pourront tous continuer de vivre et chanter. S’engage alors une lutte pour la survie de leur art.
Notre avis : Le cinéaste sino-canadien Johnny Ma a certes situé son second long-métrage aux antipodes de sa première réalisation, Old Stone, un drame contemporain dont l’esthétique empruntait beaucoup aux thrillers coréens, mais les deux films n’en sont pas moins liés en ce qu’ils interrogent le lent mais inéluctable déclin des valeurs chinoises ancestrales au profit du capitalisme marchand.
- Copyright : House on Fire et Image X Productions
Ainsi, présenté lors du dernier Festival de Cannes, à la Quinzaine des réalisateurs, Vivre et chanter, dont la forme et le sujet rappellent davantage le cinéma de Jia Zhang-ke, raconte l’histoire d’une petite troupe d’opéra traditionnel du Sichuan qui réunit une douzaine d’artistes entre les murs de son théâtre, au cœur d’une banlieue de la mégalopole de Chengdu : alors que les représentations n’accueillent plus que quelques retraités, que la concurrence débauche leurs membres pour les transformer en saltimbanques de cabaret et que ceux qui restent sont abandonnés par les services des affaires culturelles, leur quartier est peu à peu rasé par les voraces pelleteuses de promoteurs immobiliers. Lorsqu’un avis de démolition annonce la destruction de leur salle, leur responsable s’efforce donc de leur cacher la vérité, dans l’espoir qu’un coup de théâtre vienne les sauver.
- Copyright : House on Fire et Image X Productions
Si le réalisateur se réclame des films de troupe de Yasujirō Ozu, son long-métrage est toutefois davantage centré sur le conflit générationnel qui oppose Zhao Li, la directrice du théâtre, et sa nièce, Dan Dan, à qui elle a transmis son savoir séculaire, mais qui se produit pour quelques billets dans des boîtes de nuit où elle sacrifie son héritage à la modernité. On ne peut, à ce titre, qu’être convaincu par le souci de Johnny Ma de faire interpréter sa fiction, inspirée du documentaire d’un journaliste, par les comédiens dont elle narre l’histoire et de filmer dans les salles de véritables spectateurs, mais on sera plus réservé sur son parti-pris d’employer, tout en célébrant le patrimoine traditionnel chinois, une bande originale qu’il place sous le signe de l’hybridation culturelle en y mélangeant les airs d’opéra chinois aux compositions de Bobby McFerrin.
- Copyright : House on Fire et Image X Productions
Néanmoins, contrairement à ses personnages que la crise confronte les uns aux autres ou à ce vieux spectateur qui ne peut s’empêcher de pleurer à chaque représentation, Johnny Ma refuse de s’abandonner au regret nostalgique d’une tradition vouée à disparaître (après avoir pourtant survécu à la Révolution culturelle), et préfère s’employer à en capter les derniers lueurs. Il s’ingénie ainsi à faire déborder sur le réel l’univers merveilleux de l’opéra du Sichuan, et ménage même un véritable morceau de bravoure onirique, comme pour nous suggérer que la Chine traditionnelle peut encore survivre dans les chimères de quelques passionnés, voire nous inviter à repartir de la salle avec, en nous, un peu de sa féérie. Si l’économie de marché semble donc en passe d’avoir raison de la culture classique, du moins, elle n’empêchera pas les rêves.
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