Portraits de femmes
Le 13 mars 2011
Nathalie Borgers signe un film passionnant, accessible et sans prétention sur des femmes en quête d’indépendance.

- Réalisateur : Nathalie Borgers
- Genre : Documentaire
- Nationalité : Français, Autrichien, Belge
- Date de sortie : 9 mars 2011
- Plus d'informations : Le site du distributeur

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– Durée : 1h30mn
Nathalie Borgers signe un film passionnant, accessible et sans prétention sur des femmes en quête d’indépendance.
L’argument : A l’extrême sud du Sahara, au Niger vivent les Toubous, un peuple de bergers nomades. Leur vie dans ce désert impitoyable obéit à des rituels simples et immuables. Les hommes sont chameliers et les femmes restent au foyer. Mais chaque année, tout change pour les femmes Toubous avec le départ de la caravane. Des aïeules aux plus jeunes, les femmes de la tribu entreprennent un voyage de quatre mois sur plus de 1500 km à travers le Sahara, dans la chaleur, la poussière et les tempêtes de sable pour aller cueillir des dates et les vendre à la "ville". Malgré la fatigue et les dangers innombrables, ce périple est aussi pour ces femmes un espace de liberté et la clé de leur indépendance économique.
Notre avis : Il faut préciser d’emblée que Vents de sable, femmes de roc tient à distance les codes du film ethnographique. La réalisatrice, Nathalie Borgers - auteur de plusieurs documentaires sur la condition féminine - a privilégié le choix du portrait plutôt que l’étude des Toubous, peuple nomade de la frange du Sahara. La communauté, et notamment les hommes qui la composent, n’interviennent ainsi qu’à l’arrière-plan, si bien que le film se contente du minimum de précisions documentaires pour plonger rapidement au coeur de son sujet. Loin de rechercher la neutralité, la cinéaste laisse s’exprimer librement les femmes Toubous, n’intervenant jamais entre la caméra et ses personnages, et ne dénonçant jamais à leur place les conditions de vie difficiles dont elles peuvent souffrir.
C’est là, sans nul doute, la grande force du film. Les enjeux politiques ne sont jamais négligés par Nathalie Borgers, mais ils ne sont pas non plus véhiculés par un discours accusateur et ethnocentriste. En effet, le documentaire accorde une grande place aux petits détails du quotidien et aux témoignages de ces femmes qui, malgré l’existence d’un certain nombre de droits (divorce, relative indépendance économique) souffrent parfois de l’isolement et de la solitude dans laquelle les enferment les coutumes locales - et notamment le mariage arrangé, thème qui était déjà l’objet d’un précédent film de la cinéaste, Arrangements avec le destin. Du même coup, aucun commentaire ne vient rappeler à notre mémoire la présence de la réalisatrice, qui se contente de laisser parler les événements plutôt que de leur imposer un sens par le biais d’une voix off artificielle ou d’une mise en scène pesante. Le long-métrage fait donc preuve d’un engagement subtil et pudique.
Ainsi la caméra nous donne à voir les discours des Toubous de front et sans artifice. L’ambition du film est finalement de faire de ces femmes (Amina, Mariama, Domagali) des personnages à part entière qu’il nous importe de suivre et auxquels nous nous attachons de manière sensible. Tout se joue autour d’une complicité qui insuffle au métrage une valeur poétique due, en bonne part, à l’utilisation parcimonieuse de musiques locales et à l’attention portée aux paysages (loin du style un peu tapageur des reportages). Vents de sable, femmes de roc fait donc preuve d’un bel équilibre entre le traitement politique de son argument et les moyens poétiques mis en oeuvre pour nous plonger dans l’univers des femmes Toubous. Une vraie réussite.
La bande-annonce :ICI