Le 11 avril 2019
Samuel Tilman a réussi un joli tour en transformant la question « qui est le coupable ? » en « est-ce vraiment lui le tueur ? A-t-il réellement pu faire une telle chose ? »
- Réalisateur : Samuel Tilman
- Acteurs : Natacha Régnier, Fabrizio Rongione, Christophe Paou, Myriem Akheddiou, Baptiste Lalieu
- Nationalité : Français, Suisse, Belge
- Distributeur : Destiny Films
- Durée : 1h34mn
- Titre original : Une part d'ombre
- Date de sortie : 22 mai 2019
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Résumé : David est un père de famille comblé : une femme qu’il aime, deux enfants adorables, une bande de potes soudée. Au retour de leurs dernières vacances, David est interrogé par la police dans le cadre d’un meurtre. Rapidement, l’enquête établit qu’il n’est pas irréprochable. Même si son meilleur ami et son avocat le soutiennent, le doute se propage dans son entourage…
Notre avis : Un chalet au milieu d’un paysage vosgien, une bande de potes, un cadavre retrouvé sur le bas-côté. De prime abord, le scénario peut sembler assez proche de ceux qui sont habituellement proposés dans les séries policières - diffusées sur des chaînes télévisées bien connues - afin de satisfaire quelque peu notre légère (mais néanmoins charmante) appétence pour le morbide. Toutefois, Samuel Tilman a réussi un joli tour, transformant la question « qui est le coupable ? » en « est-ce vraiment lui le tueur ? A-t-il réellement pu faire une telle chose ? ». Dans Une part d’ombre, en effet, il n’y a pas d’image sanglante, ni d’intervention spectaculaire des « forces spéciales de la brigade judiciaire d’élites anti-méchant », pas même de scène où le chef de cette brigade (agent spécial d’élite lui aussi) arme au poing, biceps à l’air, défonce une porte d’un coup de talon précis pour aller sauver l’humanité. Dans Une part d’ombre, il s’agit plutôt de montrer les différents comportements des proches de David, au fur et à mesure que l’enquête s’oriente de plus en plus vers sa personne. On peut apprécier ce pas de côté, cette attention portée à l’humain qui évite une approche psychologisante des personnages.
Le spectateur peut alors se plaire au jeu de la comparaison entre ses propres réactions et celles des protagonistes. Et si l’un de nos proches se retrouvait soudain visé par une enquête criminelle ? Serais-je plutôt naïf comme ce meilleur ami aidant aux allures sympathique et innocente ? Il ne s’agit pas pour autant d’un processus d’identification aux personnages, mais plus simplement d’une proposition de mise en situation. Il ne s’agit pas d’imiter le réel, mais de mettre en scène certains types de comportements dans une situation donnée (extrême en l’occurrence), puis d’observer leurs évolutions, en fonction de celles de cette dernière. Et si certaines réactions ne semblent pas véritablement cohérentes et logiques alors que le parti pris tend vers la rationalité, elles n’en demeurent pas moins nécessaires, puisqu’elles participent à ce processus d’observation en permettant à la situation de se développer. Julie, l’épouse de David, semble toutefois le seul personnage pour lequel nous sommes invités à compatir ; des gros plans sur le visage de Natacha Régnier (qui en cette occasion a été nommée pour le Magritte de la meilleure actrice) révèlent ses traits marqués par la dureté de l’épreuve : et si c’était vrai ? Et si mon propre conjoint, le père de mes enfants, avait bel et bien commis un meurtre ?
Copyright Destiny Films, 2019
Le cadrage de certaines séquences en vue subjective rend par ailleurs sensible un certain malaise qui s’installe d’abord insidieusement, puis remonte à la surface. C’est le cas lorsque David descend l’escalier de sa chambre en pleine nuit. La scène n’est pas sans rappeler un « topos » cinématographique particulièrement présent dans les films d’horreur : la descente de marches sombres, en bas desquelles nous savons pertinemment qu’il y a un grave danger potentiellement anxiogène. Pourtant, à mesure que le film avance, une autre forme d’inquiétude s’immisce : « Bon flûte alors, c’est bien beau mais c’est du déjà-vu. Soit à la fin il est coupable et c’est tragique, soit il ne l’est pas et tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles. » Fort heureusement, Une part d’ombre échappe à cette alternative ennuyeuse, ce qui fait tout son intérêt.
Enfin, notons qu’un certain humour affleure dans cette production. Non pas des vannes, ni des intentions claires de faire rire, mais de la dérision face à la gravité de la situation mise en scène, plus précisément un certain détachement dans l’acte créatif.
Copyright Destiny Films, 2019
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