Un pied au paradis – Michele Foletti – la chronique BD

Critique :Pour son deuxième album après Les égarés de Déjima (sur un scénario de Nicolas Wouters), Michele Foletti adapte en bande dessinée le roman de l’écrivain américain Ron Rash (One foot in Eden, 2002, publié en Français chez Le Masque puis dans la collection « Folio » de Gallimard). Ce polar social met en scène l’Amérique profonde des années d’après-guerre, où la tradition incarnée par les petits propriétaires fonciers qui cultivent un sol auquel ils sont attachés – mais que leurs ancêtres ont subtilisé aux Cherokee – se heurte à la modernité, matérialisée par ce gigantesque projet de retenue d’eau. Les transformations socio-économiques affectent n’épargne pas l’Amérique rurale et conservatrice, comme l’avait déjà révélé en son temps John Steinbeck dans Voyage avec Charley (1962).

Michele Foletti – Sarbacane

Avec son dessin au trait noir et sa mise en couleur lumineuse, Michele Foletti parvient à capter l’esprit de cette campagne pauvre et matraquée par le soleil, où les récoltes sont maigres et les habitants superstitieux, comme le démontre la légende noire qui entoure « l’accoucheuse » vivant au fond des bois. Les dernières pages du récit sont, à cet égard, très révélatrices de l’esprit de ce pan de l’Amérique.

Michele Foletti – Sarbacane

Sur le plan narratif, l’intérêt de l’intrigue ne réside pas tant dans la recherche du coupable que dans la vivante galerie de personnages et le drame familial qui se joue chez les Holcombe et au sein de la famille du shérif Alexander. Comme un rappel de l’origine littéraire du récit, Michele Foletti conserve des narratifs à la première personne sur certaines planches. Si le récit prend son temps, le lecteur reste impliqué pour connaître le dénouement de cette affaire, qui donnera matière à réflexion une fois le livre refermé.

Un pied au paradis est un polar social qui dresse un portrait vivant de l’Amérique rurale d’après-guerre.