Le 22 février 2021
Une plongée chaleureuse au cœur d’un centre d’accueil où la création vient au secours des naufragés de la vie.


- Réalisateurs : Stan Zambeaux - Edouard Zambeaux
- Genre : Documentaire
- Nationalité : Français
- Distributeur : Eurozoom
- Durée : 1h26mn
- Date télé : 22 février 2021 23:11
- Chaîne : TV5 Monde
- Date de sortie : 14 février 2018

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Résumé : Djibi et Ange, deux adolescents à la rue, arrivent à l’Archipel, un centre d’hébergement d’urgence au cœur de Paris. Ils y affrontent des vents mauvais, des vents contraires, mais ils cherchent sans relâche le souffle d’air qui les emmènera ailleurs. Et c’est avec l’écriture et le chant qu’ils s’envolent… et nous emportent. Une plongée au coeur de l’Archipel, un centre qui propose une façon innovante d’accueillir les familles à la rue.
Critique : Alors qu’ils viennent de terminer un premier documentaire Des clés dans la poche sur des personnes à la rue qui se reconstruisent en Auvergne, les frères Zambeaux, (Edouard et Stan respectivement scénariste et réalisateur), infatigables baroudeurs mus par une éternelle volonté de donner un espace à ceux qui n’en ont pas, sont contactés par le président du Samu Social et directeur d’Aurore (l’association parisienne qui accompagne les SDF et les mal-logés) qui souhaite rendre compte de la place des déshérités dans l’espace public. Leur curiosité et leur sens de l’esthétisme nous permettent de découvrir en toute dignité une réalité difficile mais sans misérabilisme, à travers ce huis clos installé dans le centre d’hébergement d’urgence l’Archipel où sont accueillies des familles à la rue, souvent composées d’une mère et de ses enfants.
- Copyright Eurozoom
La caméra, témoin impartial de ces vies raccommodées, se faufile le long des couloirs pour nous ouvrir les portes d’une cuisine impersonnelle, de douches spartiates et de chambres plus ou moins bien agencées (il s’agit d’anciens bureaux). Un confort basique que l’on finit par oublier car la caractéristique de ce lieu où cohabitent des personnes de tous horizons et de toutes nationalités est de parvenir à générer des initiatives et des énergies. Les enfants constituant les forces vives de l’Archipel, c’est à eux que les réalisateurs choisissent d’accorder une place centrale, tout particulièrement Djibi, un garçon seul avec sa mère, et Ange, une fille seule avec son père. Déployant des trésors de patiente complicité et de bienveillante attention, le réalisateur suit, à travers l’atelier d’écriture auquel il s’est inscrit, le cheminement du jeune garçon protégeant, tant bien que mal, la dernier part de son enfance mise à mal par les aléas traversés. Ses écrits qu’il espère bien voir publiés dans le quotidien Libération lui permettent de se délivrer d’un passé trop lourd, mais aussi de se rêver un avenir fait de reconnaissance et de valorisation. Pour reprendre ses propres termes, il n’est qu’un serial déménageur qui habite au 115, ce qui, dans l’espace social, ne lui accorde qu’un statut « d’invisible ».
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Si son regard sur le monde, sa maturité, sa détermination nous rendent immédiatement craquant ce gamin héroïque, un léger sentiment de frustration nous envahit en constatant que son seul point de vue est évoqué et que la place réservée à Ange est réduite à la portion congrue. Timide, elle se réfugie dans le chant et les occasions de la côtoyer seront trop peu nombreuses pour que l’on profite de son témoignage que l’on pressent pourtant riche. Sa prestation musicale en compagnie de la pianiste Peggy nous donne néanmoins l’occasion de découvrir la beauté de l’incroyable chapelle cachée au cœur de ce no man’s land, à la fois lieu de promiscuité mais aussi cocon protecteur. L’irruption bien inutile de migrants venus de Calais ne faisant que traverser l’écran et dont on ne saura rien, ne parvient heureusement pas à perturber cette alchimie précaire mais nécessaire à ces oubliés soumis à une vie d’incertitude et de ballottement.
Un documentaire plein de poésie et d’optimisme qui nous laisse l’espoir qu’un jour, ça ira.