Critique  : L’auteure américaine a décidément un don pour faire naître des romans des choses les plus simples. Micah Mortimer vit à Baltimore, seul. Il est en couple avec Cass depuis trois ans. "Passionné" n’est pas l’adjectif le plus approprié pour décrire leur relation. Cet informaticien freelance est issu d’une famille nombreuse, désordonnée, pleine de joie et d’espièglerie : de cette ascendance est née son aversion pour tout ce qui dépare l’ordre, le respect des règles, sa routine. Il se lève, va courir, prend son petit-déjeuner et va voir ses clients. Tous les jours. Jusqu’au jour où, en rentrant, il trouve un garçon sur le pas de sa porte. Brink Adams plonge à nouveau Micah dans sa vie amoureuse d’étudiant – pas palpitante, mais existante malgré tout –, lui rappelle ses jeunes années et son histoire avec Lorna, l’amène même à se remettre en question.
Ce petit accroc dans l’existence bien rangée du protagoniste suffit à Anne Tyler pour tisser son récit, bâti sur les petits faits de la vie. Le quotidien, les pensées sombres, les repas en famille, la relation à deux par intermittence, les ruptures causées par un rien. Tout est un peu sommaire, brut, sans effets de style, sans originalité déplacée : un seul point de vue, une narration externe, une chronologie linéaire et causale, un protagoniste qui se contente de ses journées un peu mornes.
Il ne se passe jamais grand-chose dans les romans de cette auteure, mais cela suffit à faire sourire, à emmener dans un ailleurs qui n’est pas sans rappeler au lecteur sa propre existence. Tendre et simple, ce livre est à l’image de l’œuvre d’Anne Tyler : pleine d’esprit et de douceur un peu âpre.