Fleurs fanées
Le 10 juillet 2018
Un scénario trop prévisible gâche une intrigue qui s’inscrit au cœur d’une reconstitution de l’Amsterdam du XVIIe siècle.
- Réalisateur : Justin Chadwick
- Acteurs : Judi Dench, Christoph Waltz, Alicia Vikander, Dane DeHaan
- Genre : Drame, Historique, Romance, E-Cinéma
- Nationalité : Américain, Britannique
- Durée : 1h47mn
- Date de sortie : 12 juillet 2018
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Résumé : Amsterdam – 1636. La ville est plongée dans une fièvre spéculative autour du commerce de la tulipe. Un riche marchand décide d’engager un célèbre portraitiste pour immortaliser la beauté de sa jeune femme. Au premier coup de pinceau, une passion dévorante débute entre la jeune Sophia et le séduisant peintre. Alors qu’une liaison torride et fougueuse s’installe, les jeunes amants cherchent à se débarrasser du mari envahissant et à s’enfuir. Une soif de liberté qui aura un prix, aussi précieux que celui d’une tulipe...
Notre avis : Le cinéma est un univers impitoyable : alors qu’une équipe entière constituée d’un nombre considérable de personnes met tout son talent au service d’un film, il est fréquent de n’entendre parler que du réalisateur, des acteurs, du scénariste… A peine l’équipe technique a-t-elle la chance d’être citée lors de cérémonies officielles où ce moment de gloire amplement mérité est éclipsé par les statuettes décernées aux "premiers rôles".
Quelle étrangeté alors de ne pouvoir couvrir de louages que les costumiers, décorateurs et autres techniciens qui se sont acharnés sur le nouveau projet du réalisateur britannique Justin Chadwick (Deux sœurs pour un roi ; Mandela : un long chemin vers la liberté) pour offrir à la petite histoire dépeinte dans Tulip Fever un cadre parfait, reconstitution minutieuse des Pays-Bas du XVIIe siècle. Ces talents artistiques et techniques se sont alliés pour saisir l’esprit de l’époque, l’une des plus charnières que n’a jamais connu Amsterdam. Siècle d’or économique, âge d’or de la peinture hollandaise, boom de la tulipomanie… L’année 1636 a vu la Venise hollandaise devenir la grande cité que nous connaissons actuellement. Il est donc tout naturel qu’elle inspire les cinéastes, autant que les artistes de l’époque.
- © 2017 PROKINO Filmverleih GmbH
Le XVIIe siècle fut celui des peintres, dont l’activité s’est développée en même temps que l’exploitation de la tulipe, devenue si populaire que les spéculations firent rapidement rage, transformant l’artisan hollandais lambda en Loup de Wall Street. La Tulipe Mania a tellement ébranlé l’économie que les artistes peintres s’en sont inspirés, au point que leurs modèles ont voulu se représenter avec cette plante à bulbes pour montrer leur richesse. C’est au cœur de cette effervescence que se déroule l’histoire de Tulip Fever, projet qui devait mettre en scène Keira Knightley et Jude Law sous la direction de John Madden. Avorté en 2014, ce projet est tombé dans les mains de Justin Chadwick, qui en a conservé le scénario, au grand dam des règles élémentaires de l’intrigue type, qui présupposent un minimum de suspense. Rien de pire que de regarder un film dont l’épilogue est si évident que l’ennui laisse rapidement place au désintérêt, et ce dès les premières minutes du long-métrage.
Alors que Tulip Fever prend place dans un siècle magique dont l’effervescence ne pouvait qu’offrir à n’importe quel scénario tous les ingrédients pour être flamboyant, seuls les éléments techniques et la reconstitution des ateliers d’artistes sont ici dignes d’intérêt.
- © The Weinstein Company
Le tableau est en effet bien fade : un riche commerçant d’Amsterdam a épousé une femme beaucoup plus jeune que lui, qui ne parvient pas à lui donner d’enfant. Sa vanité le conduit à embaucher un peintre pour réaliser son portrait, ce qui conduit la douce épouse et l’artiste à tomber amoureux, sous les yeux de leur domestique. Elle est riche, il est pauvre. Elle est mariée, lui non. L’impression de déjà-vu n’est pas fortuite, surplombée qui plus est par certains clichés assez grossiers. Ainsi, les riches ont une aisance matérielle mais ne sont pas heureux, alors que les pauvres ont des difficultés financières mais un quotidien bien plus réjouissant. Pire encore, pour mettre en valeur la vie terne des commerçants, le couple formé par Christopher Waltz et Alicia Vikander est sans cesse dans l’ombre alors qu’un filtre lumineux entoure Holliday Grainger, qui n’a ici aucun mal à éclipser un premier rôle tenu par une actrice oscarisée qui a l’air complètement perdue. Si Christopher Waltz n’apportait pas toute sa tendresse au mari bafoué, la froideur de l’interprétation laisserait de marbre un public déjà bien ennuyé par une intrigue vue et revue.
- © 2017 PROKINO Filmverleih GmbH
Les amateurs d’art trouveront néanmoins un amusement certain, car les décorateurs ont dissimulé un véritable jeu de piste dans chaque scène, truffée de références artistiques. Les postures de Christopher Waltz rappellent les œuvres de Frans Hals et Rembrandt, alors que la vie quotidienne des domestiques fait ici référence aux peintures de Pieter Aertsen. Chaque plan rappellera sans doute aux connaisseurs un tableau, une sculpture, et ravira les aficionados des voyages qui n’auront plus qu’une envie : filer à Amsterdam, ville d’art et de toute évidence, d’Histoire.
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