Tucker & Dale fightent le mal - la critique + test DVD

Descendants pacifiques des rednecks de Tobe Hooper, T & D ont deux neurones, trois litres de blonde et un DVD. Si le film n’est pas totalement indispensable, il vous faudra posséder au moins un des deux autres éléments susmentionnés pour l’apprécier à sa juste valeur. Et oui, il en a une.

L’argument : « Tucker et Dale sont deux gentils péquenauds venus se ressourcer en forêt. Ils y rencontrent des étudiants venus faire la fête. Suite à un quiproquo entraînant la mort d’un des jeunes, ces derniers pensent que Tucker et Dale sont des serial killers qui veulent leur peau, alors que nos héros pensent que les jeunes font partie d’une secte et qu’ils sont là pour un suicide collectif ! C’est le début d’un gigantesque malentendu dans lequel horreur et hilarité vont se mélanger. »

Notre avis : Tucker & Dale n’est ni un slasher forestier évadé des années 80, ni un vrai survival du terroir yankee. Tucker & Dale n’est pas intelligent, pas bien coiffé, et son scénario refoule le whisky de contrebande. Mais Tucker & Dale assume totalement le fait d’avoir le front au niveau des bottes, ce qui l’innocente en partie. Car il s’agit de ne pas se méprendre, un anti-cliché restant un cliché (la jeunesse WASP versus les hillbillies dégénérés), le film ne se repose jamais sur l’originalité douteuse de son pitch. On ne le savoure pas comme un petit sommet de cynisme boisé, mais on le vide comme une Bud, très vite et en riant.

Il faut dire qu’il s’agit d’une énorme farce en tricot de corps. Les fourberies de Scapin avec une tronçonneuse. Les JO de la coïncidence malheureuse. Une comédie qui sait apprécier un bon équarrissage d’étudiant sans pour autant loucher vers le vrai massacre rural de papa Tobe. Du reste, Tucker & Dale prouve qu’on peut brasser une centaine de références appuyées (comme les guirlandes d’ossements dans la cabane, avant même le premier meurtre) et ne pas tomber pour autant dans le WesCravenisme de base. Tout simplement parce que le film ne rit pas de la boucherie, mais autour d’elle, prenant Scream et sa cohorte de succédanés faussement malins à rebrousse-lame. Oui, les codes du genre sont assez souples pour qu’on puisse les travestir sans les ridiculiser. Encore faut-il aimer les bouchers androgynes.

Attention, on ne parle tout de même pas ici de l’Everest de la poire fendue. Mais force est d’admettre qu’entre une bonne dizaine de malentendus absurdes (les tentatives de drague complexée qui flirtent avec la crise de nerf consanguine), quelques théories fumeuses (les étudiants perçus comme une bande de kamikazes fanatiques de l’outillage agricole) et une très estimable collection de câbles rompus (on pense à la scène de conseil matrimonial pour maniaques supposés), ce miraculeux rescapé du DTV a plus d’une seringue dans son fusil hypodermique. Assez pour vous anesthésier les synapses entre deux Bergman, ce qui n’est pas nécessairement désagréable. D’autant plus qu’Eli Craig et ses scénaristes canadiens ont eu la délicatesse d’aimer tendrement leurs personnages, qu’il s’agisse de Dale - grosse peluche en salopette – ou des petites frappes venues lui cracher polos griffés et bourses universitaires à la barbe. Bref, si vous aimez la country FM et les bikinis souillés, si vous avez toujours pensé que le cochon de Delivrance n’était pas le bon, si vous avez (logiquement) démoli votre DVD de Détour Mortel au balltrap et surtout si vous avez deux heures à tronçonner un soir d’ivresse, n’hésitez pas à sauver T & D des limbes de la série Z. Toutes les bêtises ne sont pas mauvaises à prendre, et Tarantino sait que les plaisirs coupables font les plus beaux détenus.

Le DVD :

Les suppléments :

Au-delà d’un making-of insipide et un bêtisier accessoire, vous trouverez un chouette montage alternatif de 15 minutes, dans lequel T & D passent effectivement pour les aliénés qu’ils sont censés être. Belle initiative.

L’image :

Si elle n’est pas exempte de bruit numérique et d’imprécisions -notamment sur les panoramiques brutaux – cette copie au format 2.35 ne fouette pas pour autant les chats du quartier. Stable, assez respectueuse des contrastes pour ne pas ternir l’ensemble, elle atteint la moyenne. Acceptée dans la classe supérieure.

Le son :

5.1 efficace, pour un score qui ne l’est pas moins, et pas de déséquilibre notoire dans le mix. Mais encore une fois, le délicat postérieur de vos chats sera épargné.