Portraits réfractés
Le 11 juillet 2024
Moins célèbre que MASH, Shortcuts ou encore Gosford Park, Trois femmes est un petit bijou à (re)découvrir dans la prolifique filmographie du réalisateur américain Robert Altman.
- Réalisateur : Robert Altman
- Acteurs : Shelley Duvall, Sissy Spacek, Janice Rule, Robert Fortier
- Genre : Drame
- Distributeur : Baba Yaga Films, Wild Side Films
- Editeur vidéo : Wild Side Video
- Durée : 2h07mn
- Reprise: 8 mai 2019
- Titre original : 3 Women
- Date de sortie : 25 mai 1977
- Festival : Festival de Cannes 1977
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Résumé : Au cœur de la Californie désertique, Pinky Rose, tout juste dix-huit ans, est engagée comme aide-soignante dans un sanatorium. Millie Lammoreaux, vingt cinq ans, est chargée de la former. Millie prend rapidement Pinky sous sa coupe et l’invite à partager son petit appartement. Pinky est totalement fascinée par l’idéal féminin que représente Millie. Mais à la lecture du journal intime de Millie, Pinkie est totalement bouleversée. Leurs relations, leurs aspirations vont être irrémédiablement modifiées.
Critique : Le cadre : la Californie désertique et brûlante des années soixante-dix. Pinky, jeune texane de dix-huit ans incarnée par une Sissy Spacek à l’étrange et déroutante beauté naïve, fait ses débuts dans un sanatorium, en tant qu’aide-soignante. Rapidement prise sous l’aile de Millie, une des employées cultivant à outrance son apparence, Pinky rencontre dans l’immeuble où Millie lui propose une colocation, la dernière de ces trois femmes, Willie, une artiste peintre dont les fresques surréalistes décorent la piscine de l’immeuble.
De la chronique initiatique d’une jeune Texane en quête d’épanouissement et d’émancipation, le récit bascule progressivement vers le conte surréaliste. Les couleurs initiales bleutées et vaporeuses du sanatorium se reflètent dans le bassin, centre névralgique de l’immeuble, où se tissent des relations conflictuelles entre Pinky et Millie.
- Shelley Duvall
- © 1977 Lionsgate Films. Tous droits réservés.
Maniant savamment l’art du détail, Robert Altman brille à nouveau dans une mise en scène subtile, où les névroses sont plus suggérées que démontrées. On pensera au Persona d’Ingmar Bergman, dans cette histoire imprégnée de la question du trouble identitaire. Peut-être inspiré par le film de Bergman du début des années 60, Trois femmes n’est pas sans rappeler le sombre et cruel duo des aspirantes starlettes du Mulholland Drive de David Lynch. La violence sociale sous-jacente et les conflits intérieurs des personnages d’Altman ne mènent jamais le film à livrer une morale ou un jugement sur ses protagonistes. À l’instar de Persona et Mullholand Drive, Trois femmes laisse au spectateur la faculté de construire lui même la portée de l’histoire. Aux côtés de Sissy Spacek jouant sur son image innocente et virginale, l’excellente Shelley Duvall (vue dans Shining) compose une Millie aussi pathétique qu’intrigante, qui lui a valu un prix d’interprétation au festival de Cannes. Altman excelle dans la direction de ses deux actrices. Ce duo aux allures de duel, ou de dédoublement, déploie sa violence dans une forme de douceur pastel, reflet des tenues et de la décoration digne d’une maison de poupée de Millie. L’actrice Janice Rule (The Swimmer, film qui partage avec Trois femmes son aspect surréaliste) incarne la dernière figure de ce trio, la peintre Willie, à l’arrière-plan du récit, jusqu’à son éclatement.
- Sissy Spacek
- © 1977 Lionsgate Films. Tous droits réservés.
L’irruption de la vulgarité insoupçonnée de Pinky, le déni de réalité de Millie, et l’effroyable beauté des corps peints par Willie, composent un tableau aux facettes changeantes, miroitantes. Un récit kaléidoscopique qui, au final, pourrait être analysé comme une version onirique des films choraux du réalisateur. On retrouve dans le traitement de ses personnages un regard caustique, sans être dénué d’une certaine empathie. Ni monstrueuses, ni héroïques, les membres de ce trio féminin sont en quête d’un bonheur que seul le rêve semble concrétiser. Inspiré par un songe de son propre réalisateur, ce film flirtant avec différents genres cinématographiques, charme et déroute, nous laissant une part de doute sur la distinction entre le réel et le fantasmé.
Le DVD
- Copyright Wild Side
Accompagnée d’un beau livret sur les méthodes de travail et les sources d’inspiration de Robert Altman, ainsi que d’un bref entretien qu’il a donné à l’occasion de la sortie du film en 1977, cette édition DVD offre une manière de se (re)plonger dans cette œuvre plutôt marginale mais envoûtante.
Test DVD/Bluray
Master restauré Format image : 2.35, 16/9ème compatible 4/3 Format son : Anglais DTS Mono et Dolby Digital Mono, Français Dolby Digital Mono Sous-titres : Français
Galerie Photos
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