Le 4 décembre 2016
Le portrait saisissant et poétique d’un jeune juif orthodoxe.
- Réalisateur : Avishai Sivan
- Acteurs : Khalifa Natour, Omri Fuhrer, Riki Blich
- Genre : Drame
- Nationalité : Israélien
- Durée : 2h00min
- Titre original : Tikkun
- Date de sortie : 7 décembre 2016
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Résumé : Haïm-Aaron vit à Jérusalem où il effectue de brillantes études dans une yeshiva ultra orthodoxe. Ses aptitudes et sa dévotion font l’envie de tous. Un soir, alors qu’il s’impose un jeûne drastique, Haïm-Aaron s’effondre et perd connaissance. Après 40 minutes de soins infructueux, les médecins le déclarent mort. Mais son père se lance dans un massage cardiaque acharné, et, contre toute attente, le ramène à la vie. Après l’accident, malgré ses efforts, Haïm-Aaron ne parvient plus à s’intéresser à ses études. Il se sent dépassé par un soudain éveil charnel de son corps et soupçonne Dieu de le tester. Il se demande s’il doit s’écarter du droit chemin et trouver une nouvelle voie pour raviver sa foi. Son père remarque ce changement de comportement et tente de le pardonner. La peur d’avoir été à l’encontre de la volonté de Dieu en ressuscitant son fils le tourmente violemment.
Notre avis
Il y a deux manières d’aborder le film d’Avishai Sivan : soit on le considère comme le portrait d’un jeune juif orthodoxe dont le zèle religieux paraît
aussi opaque pour sa famille que pour les autres membres de sa communauté talmudique, soit on lit, à travers la prolifération des plans fixes, d’un esthétisme proche de la photographie, l’incarnation d’un territoire géographique, qui n’est plus vraiment le pays d’Israël, mais une sorte de no man’s land à la fois terrestre et céleste, un avatar du Purgatoire où le jeune Haïm Aaron semble errer.
La première interprétation n’exclut pas la seconde : car il s’agit bien de raconter le parcours d’un homme qu’on a cru mort et que son père a ramené à la vie, par des massages cardiaques répétés. Cet entre-deux permet au réalisateur de reconfigurer l’espace du réel en même temps que l’espace mental du spectateur. Dès lors, on ne s’étonne pas de l’usage du noir et blanc, ainsi que de la multiplicité des plans d’ensemble : leur choix détermine l’évocation d’un espace urbain devenu proprement fantastique, où la géométrie des rues, des routes et des plages semble happée par des points de fuite qui réfèrent au divin.
Au-delà des interrogations qu’il suscite sur la foi religieuse, Tikkoun s’avère une véritable expérience cinématographique. Elle transite par le point de vue de son personnage principal, sans qu’il y ait pour autant l’usage d’une quelconque caméra subjective. C’est plutôt de l’extérieur qu’il faut saisir les sentiments de Haïm Aaron et dans une contamination de l’image par des apparitions surréalistes qu’il
faut lire le rapport hallucinatoire des autres personnages à l’environnement : d’où les scènes oniriques, parfois kafkaïennes, qu’un bestiaire vient envahir d’une présence souvent gênante : le groin d’une vache ventouse quasiment l’oeil de la caméra au début de l’histoire, un crocodile émerge des toilettes et figure les admonestations d’une voix divine, un cafard rampe sur les pages d’un livre que l’ardent prosélyte feuillette.
Le résultat est envoûtant, d’une indéniable beauté poétique, assurément la marque d’un grand cinéaste.
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