Le 31 décembre 2023
Une œuvre absolument nécessaire, urgente même, dans un monde qui faillit peu à peu aux sirènes de la discrimination, de la haine de l’autre et du fondamentalisme politique.
- Réalisateur : Rolf de Heer
- Acteurs : Gary Waddell, Mwajemi Hussein, Deepthi Sharma, Darsan Sharma, Natasha Wanganeen, Craig Behenna
- Genre : Drame, Science-fiction, Expérimental
- Nationalité : Australien
- Distributeur : Nour Films
- Durée : 1h36mn
- Date de sortie : 13 décembre 2023
- Festival : Festival de Berlin 2023
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Résumé : Au milieu d’un désert aride, sous un soleil de plomb, une femme est abandonnée dans une cage de fer. Déterminée à vivre, elle parvient à s’en échapper. Elle marche à travers les dunes, les ruines d’un monde en désolation, gravit la montagne et arrive en ville. Une odyssée qui la mène jusqu’aux frontières de l’humanité…
Critique : Dix ans que Rolf De Heer n’avait pas sorti de film. Dix ans et il revient sur les écrans avec une œuvre puissante, envoûtante, aux frontières de la science-fiction, du film expérimental et du drame. Une femme noire se retrouve enfermée dans une cage que d’étranges hommes équipés de masques de protection phytosanitaire déposent au milieu du désert. Une fois sortie de la stupeur, elle parvient à se libérer et entreprend un voyage sans but, à travers les paysages et les villes ravagées par une guerre ancienne où elle découvre ce qui ressemble à un holocauste à ciel ouvert de toutes les personnes de couleur.
- Copyright Nour Films
The Survival of Kindness est sans doute le film le plus original de cette fin d’année 2023. Pendant toute la projection, le spectateur ressent à la fois le trouble de cette odyssée et l’énigme posée par les personnages que l’héroïne rencontre. Même si naturellement il ne s’agit pas du sujet principal, on se demande pourquoi certains faillissent à cette sorte de virus respiratoire et cutané et pas d’autres, comment les gens font pour résister à la soif et la faim, et l’on s’interroge sur ce qui explique la haine que vouent les hommes masqués aux étrangers. On se fait évidemment des réponses, mais comme le réalisateur ne donne aucune clé définitive de compréhension, il faut intégrer ce qui pourrait ressembler à des invraisemblances comme une composante de la fiction elle-même. Les protagonistes parlent tous une langue inconnue que le réalisateur refuse à juste titre de traduire. En réalité, il n’y plus de langage qui compte, sinon celui de la survie contre ces maladies des poumons, la haine, dans ces terres désolées qui respirent un air de fin du monde.
- Copyright Nour Films
La dimension politique du long-métrage n’échappera pas au spectateur. On entend derrière cette histoire sinistre la petite musique de l’extrême droite australienne qui invite à toujours plus durcir les flux migratoires et à isoler les étrangers dans des centres de rétention. Les suicides accompagnent le triste voyage de la protagoniste, à l’image de la détresse psychologique des déboutés du droit d’asile en Australie depuis les années 2000. L’inhumanité étouffe ces terres australes, encourageant les minorités à s’inventer un langage commun et à construire des échappatoires à l’horreur qu’ils subissent. Rolf De Heer décrit une hypothétique société qui remet au goût du jour l’esclavagisme, dans un contexte terrible où, au contraire, la solidarité serait plus que nécessaire pour retrouver une sérénité.
- Copyright Nour Films
The Survival of Kindness est une œuvre totalement urgente à notre époque où hélas, le populisme aveugle semble prendre le pas sur la démocratie dans la plupart des pays du monde. Aussi, au-delà du message idéologique, le film constitue une vraie gageure en matière de mise en scène dans une économie de mots et d’effets stylistiques.
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