Shakespeare in love
Le 13 septembre 2018
Une reconstitution époustouflante des chefs-d’œuvre de William Shakespeare et un hommage au théâtre constituent les ingrédients gagnants de cette première saison.
- Réalisateurs : Richard Eyre - Rupert Goold
- Acteurs : Jeremy Irons, Ben Whishaw, Clémence Poésy, David Suchet, Tom Hiddleston, Simon Russell Beale
- Genre : Drame, Historique
- Nationalité : Britannique
- Durée : 505mn
- Date de sortie : 18 septembre 2018
L'a vu
Veut la voir
– Sortie dvd : 18 septembre 2018
– Studio : L’Atelier d’Images
– Chaîne d’origine : BBC Two ; en France : Histoire
– Accord parental souhaitable
Résumé : Le roi d’Angleterre Richard II est appelé à régler une discorde entre ses deux cousins, Henri Bolingbroke, duc de Lancaster et Thomas Mowbray, duc de Norfolk. Il leur ordonne de s’affronter en duel. Le jour venu, le roi interrompt le duel et bannit ses cousins du pays... De la cour de Westminster aux champs de bataille de France et d’Angleterre pendant la guerre de Cent ans, Richard II, Henri IV et Henri V affrontent leurs destins épiques.
Notre avis : Lorsque l’on parle du français, on évoque la langue de Molière ; lorsqu’il est question de l’anglais, de la langue de Shakespeare. C’est dire à quel point des producteurs comme Sam Mendes (Skyfall, 007 Spectre), Gareth Neame (Downton Abbey, Rome) et Pippa Harris (Les Noces rebelles) ont eu le nez creux lorsqu’ils ont proposé, en 2012, une adaptation pour la chaîne BBC Two des pièces Richard II, Henri IV et Henri V. Sans doute ont-ils été échaudés par le hashtag #ShakespeareSunday, utilisé sur les réseaux sociaux britanniques tous les dimanches et qui permet à des milliers d’internautes de partager leurs vers préférés du célèbre dramaturge. Ce qui témoigne de l’attachement des Anglais pour leur plus célèbre plume.
- © 2018 L’Atelier d’images. Tous droits réservés.
La première saison de The Hollow Crown, composée de quatre épisodes (Richard II, Henri IV parties 1 et 2 puis Henri V) débute ainsi par des pièces que William Shakespeare a commencé à écrire dès 1595, composant ainsi avec Richard II un prélude à une tétralogie historique, l’Henriad, qui évoque le règne mouvementé de plusieurs rois d’Angleterre. L’objectif est d’implanter l’écriture de Shakespeare dans la modernité, avec l’aide d’une nouvelle génération d’acteurs formés pour la plupart à la Royal Shakespeare Company.
D’une incroyable fluidité, le texte de William Shakespeare étant imputé d’un tiers pour s’adapter au format télévisuel, la prose datant du XVIe siècle est d’une incroyable modernité alors que l’auteur décrivait ses contemporains. Est-ce à dire que les vers n’ont rien perdu de leur mordant alors que près de cinq cents ans séparent le célèbre poète du spectateur d’aujourd’hui ? Rien n’est moins sûr, au point que les épisodes s’ancrent facilement dans l’actualité, puisque la diffusion de la première saison en 2012 a coïncidé avec le jubilé de diamant de la reine Elizabeth II.
- © Carnival Film & Television Limited 2012
Il est donc ici question d’offrir une nouvelle lecture aux œuvres de Shakespeare tout en permettant aux phrasés d’acteurs modernes tels que Ben Whishaw de s’adapter à sa prose. L’atmosphère de chaque épisode est très différente et rend justice aux aléas politiques qu’ont connus les monarques britanniques. Du tyrannique Richard II en passant au magnanime Henri IV puis à son hésitant héritier Henri V, l’action prend surtout place dans des décors naturels tels que les châteaux de Pembroke et Caerphilly ou encore les cathédrales de Saint David et Gloucester. Cette production britannique a donc pour vocation de rendre hommage aux auteurs anglais, à la beauté du Royaume-Uni mais également à la langue anglaise. La série est ainsi toujours diffusée en version originale et n’a jamais bénéficié de doublage ; seuls des sous-titres ont été ajoutés pour aider les spectateurs étrangers à suivre le texte. La langue anglaise et surtout la version dans laquelle le texte a été écrit sont ainsi mises à l’honneur. De plus, l’Histoire britannique dans son ensemble est contée, notamment en évoquant les relations diplomatiques avec la France. L’entente cordiale prend vie sous nos yeux par l’intermédiaire de pourparlers de paix, de batailles sanglantes ou encore d’accords au vu de mariages de raison.
- © Carnival Film & Television Limited 2012
Les quatre épisodes, en ayant l’air de ne s’intéresser qu’au texte de Shakespeare, implantent l’actualité politique de la Grande-Bretagne avec moult sous-entendus. Des critiques sous-jacentes contre le Brexit ne sont peut-être pas le fruit de l’imagination d’un spectateur qui aura plaisir à remarquer que des Britanniques jouent des Britanniques et que des actrices françaises telles que Clémence Poésy et Mélanie Thierry interprètent les épouses ou les prétendantes françaises de monarques britanniques qui font la guerre à la France le lundi avant de choisir une épouse outre-Manche le mardi. The Hollow Crown s’inscrit donc dans un contexte où le militantisme n’est pas fortuit, tout en rendant un hommage appuyé au théâtre à l’heure où il subit une crise importante avec une perte de spectateurs qui pose question. Loin de ne pas s’impliquer et de ne pas rappeler que les acteurs de la série se sont illustrés au théâtre avant d’apparaître à la télévision et au cinéma, la mise en scène rappelle la richesse du théâtre britannique dont William Shakespeare est une référence inaltérable.
- © Carnival Film & Television Limited 2012
Des décors somptueux donc, des costumes qui font revivre un siècle lointain et un hommage au théâtre grâce à une mise en scène qui joue avec l’immobilisme de certains décors. Les scènes en extérieur prennent place dans un décor qui met en valeur la beauté du pays alors que les scènes d’intérieur sont autant d’excuses pour jouer avec l’une des règles du théâtre classique, les fameuses trois unités. Unité de temps, unité d’action et surtout unité de lieu : certaines scènes de ces quatre épisodes rappellent clairement la difficulté pour le théâtre de faire vivre les différentes péripéties dans un espace restreint.
Loin de handicaper le jeu des acteurs de The Hollow Crown, cette règle adaptée à la télévision offre une puissance considérable à la mise en scène en permettant aux spectateurs de se concentrer sur le texte. Et pour rendre justice à une prose qui fait le bonheur du théâtre britannique, rien de mieux que des acteurs qui ont fait leurs armes sur scène grâce à Shakespeare. Formés pour certains à la Royal Shakespeare Company et d’autres à la Royal Academy of Dramatic Art, Ben Whishaw (Richard II) a interprété Hamlet, alors que Jeremy Irons (Henri IV) a joué Macbeth puis Richard II sur les planches. Sam Mendes, qui a lui-même joué dans des adaptations de Richard III, a tenu à réunir une équipe qui avait à cœur de rappeler son attachement à Shakespeare. Alors que Ben Whishaw a remporté en 2013 le British Academy Television Award du meilleur acteur et Simon Russell Beale la même statuette dans un second rôle pour son interprétation de Falstaff, la qualité de cette mini-série est royale car elle réunit ce qui se fait de mieux dans le paysage théâtral et télévisuel britannique.
- © Carnival Film & Television Limited 2012
En suivant de manière chronologique les différents règnes de trois rois d’Angleterre encore célèbres des années après leurs morts, les épisodes peuvent se voir indépendamment. Plus qu’une chronique d’un siècle lointain, c’est avant tout le portrait d’hommes ordinaires qui occupent des fonctions extraordinaires qui constitue l’attrait d’un programme rappelant que ceux qui nous gouvernent sont avant tout des êtres humains avec leur fragilité et leurs doutes.
De la naissance au crépuscule d’un règne, The Hollow Crown s’attarde sur la dureté de la politique, quel que soit le poste que l’on occupe dans une nébuleuse qui dépasse les prétendants au pouvoir suprême les mieux préparés. D’actualité, décidément.
LE DVD
Les suppléments :
Un court making-of et des entretiens avec les acteurs et les équipes techniques constituent les principaux bonus. Chacun des 4 DVD contient un bonus différent, malheureusement très court et qui n’apporte pas suffisamment d’éclairage sur la reconstitution des œuvres de Shakespeare ni sur l’adaptation du texte à l’écran. Davantage d’informations sur les décors et les costumes auraient constitué un sérieux plus, alors que les suppléments ici se contentent de quelques interviews. Scènes coupées et coulisses du tournage constituent quelques bonus supplémentaires, sans en apprendre beaucoup aux spectateurs.
L’image :
La qualité de l’image est un des éléments qui explique la grande virtuosité de la série. D’une grande clarté sur le support SD, elle a de toute évidence été travaillée pour montrer qu’une prose du XVIe siècle a tout à fait sa place dans un projet qui réunit les plus grands talents, aussi bien techniques que photographiques.
Le son :
Belle restitution sonore, mais le Dolby 2.0. est quelque peu frustrant. Evidemment, exclusivement réservé à la seule piste présente, originale, comme mentionné dans la partie critique.
- © Carnival Film & Television Limited 2012
Galerie Photos
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.