Le 31 mai 2017
Le premier film très singulier du lauréat de la Palme d’or 2017, portrait acide d’une société perplexe.
- Réalisateur : Ruben Östlund
- Acteurs : Erik Ruström, Julia Persdotter
- Genre : Drame
- Nationalité : Suédois
- Distributeur : Bac Films
- Durée : 1h30mn
- Titre original : Gitarrmongot
- Date de sortie : 8 mai 2015
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– Année de production : 2004
Résumé : Dans une ville qui se veut fictive, des destins se croisent, des individus de la marge, évoluent. Un enfant réinvente la chanson punk, des hommes jouent avec des armes à feu, une femme vire de plus en plus dans la paranoïa, des ados s’attaquent aux vélos… Ils vont parfois se rencontrer…
Notre avis : La retransmission télévisée d’une concert un peu niais se trouble. Sur le toit, un garçon réoriente des antennes satellites. C’est le début de The guitar mongoloid, premier film de Ruben Ostlund, inédit en France ; un début étrange, à la mesure de ce qui va suivre : un jeune hurle et massacre des chansons en s’accompagnant à la guitare, un groupe jette des vélos dans l’eau, une femme cherche le sien … Autant de scènes courtes, tournées la plupart du temps en plans-séquences fixes, autant de petits moments banals ou absurdes. Mais pas seulement : la roulette russe ou la voiture qui tourne en rond créent un malaise évident, alors que le travelling sur l’enfant endormi paraît une respiration bienvenue dans cet univers froid.
Le film emprunte au documentaire avec un visage bizarrement flouté, un « bip » à la place d’un nom, mais un documentaire qui n’explique rien, qui enregistre à distance une Suède décontenancée, incapable de trouver un sens. C’est sans doute ce qui ressort le plus de The guitar mongoloid, cette impression de vanité d’actions qui se succèdent sans s’éclairer. On ne saura rien des personnages (le garçon s’appelle Erik, mais qui est l’adulte qui l’accompagne et pourquoi mendie-t-il ?), de leurs motivations si elles existent ; la caméra indifférente d’Ostlund les fait exister hors de toute réalité concrète, comme des êtres qui s’agitent sans but. Ainsi, la femme qui cherche son vélo porte des sacs, qu’elle trimballe dans ses errances, et s’adresse à des gens qui ne l’écoutent pas. Elle semble ne faire que ça, obsessionnellement, inerte face à l’agressivité. Autant dire que là encore, quand elle parle à des jeunes filles puis touche les cheveux de l’une d’entre elles avant de se faire rabrouer, le malaise est palpable.
Tout se passe comme si le cinéaste condamnait non pas des personnages, mais une société à l’abandon, percluse dans des révoltes stériles ou des suites de gestes dépourvus d’intérêt. Détruire des vélos, c’est un nihilisme à la petite semaine, où peut-être ne compte que le geste ; ainsi de ce plan fulgurant des phares éclairant l’eau. De même taper dans des réverbères ou y coincer un autre vélo sont-ils des actes gratuits, absurdes. Autrement dit nous ne serions même plus capables de révoltes, de pensées, mais seulement, à la manière de la voiture folle, de tourner en rond absurdement. Sinistre constat. Alors ne demeure que l’esthétique, celle d’un feu d’artifice au milieu des usines, ou celle, plus ambiguë, d’un objet étrange gonflé pour s’envoler ; et les passants de s’interroger : est-ce une sonde météo ou des sacs poubelle ? À la manière de ce ballon, l’identité floue des protagonistes rejoint celle du film tout entier, porté par des interrogations relativement absconses. On pourra en goûter le sel, c’est notre cas, ou s’en agacer.
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