Le 15 mai 2019
Une parodie plutôt drôle, mais qui finit tout de même par tourner à vide, et parvient difficilement à cacher ses intentions didactiques.
- Réalisateur : Jim Jarmusch
- Acteurs : Steve Buscemi, Bill Murray, Chloë Sevigny, Danny Glover, Tilda Swinton, Tom Waits, Rosie Perez, Austin Butler, Selena Gomez, Iggy Pop, Caleb Landry Jones, RZA, Adam Driver, Carol Kane
- Genre : Comédie, Épouvante-horreur, Comédie horrifique
- Nationalité : Américain
- Distributeur : Universal Pictures France
- Durée : 1h43min
- Date télé : 9 mai 2024 23:40
- Chaîne : Paris Première
- Âge : Interdit aux moins de 12 ans
- Date de sortie : 15 mai 2019
- Festival : Festival de Cannes 2019
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Résumé : Dans la sereine petite ville de Centerville, quelque chose cloche. La lune est omniprésente dans le ciel, la lumière du jour se manifeste à des horaires imprévisibles et les animaux commencent à avoir des comportements inhabituels. Personne ne sait vraiment pourquoi. Les nouvelles sont effrayantes et les scientifiques sont inquiets. Mais personne ne pouvait prévoir l’évènement le plus étrange et dangereux qui allait s’abattre sur Centerville : THE DEAD DON’T DIE – les morts sortent de leurs tombes et s’attaquent sauvagement aux vivants pour s’en nourrir. La bataille pour la survie commence pour les habitants de la ville.
Critique : Le film de Jarmusch est une relecture nonchalante d’un cinéma de genre auquel il ne cherche pas à se mesurer, tout en adoptant l’opinion d’un personnage ermite, une sorte de Diogène sylvestre incarné par Tom Waits, dont la posture serait comme une boussole qui indiquerait l’apocalypse. La désinvolture avec laquelle les protagonistes considèrent la catastrophe annoncée s’accommode d’une distanciation brechtienne, lorsque les personnages, commentant la fiction dans laquelle ils jouent, associent une ritournelle country à un scénario programmé. L’œuvre s’accorde aussi son petit moment pirandellien, dès lors que les deux policiers, assaillis par des zombies affamés, s’en prennent à un certain Jim, qui a prévu de les faire mourir dans le script. A ces décrochages ponctuellement amusants, mais pas si originaux, s’ajoutent des références culturelles qui plairont toujours à certains critiques, mais n’existeront que comme des écrans de fumée. Oui, on aura remarqué qu’un des défunts quitte une tombe au nom de Samuel Fuller, que la tête du personnage incarné par Selena Gomez est celle de Méduse décapitée par Persée, qu’une saillie sur Romero constitue, au bas mot, le degré zombie de l’inspiration.
- Copyright Abbot Genser / Focus Features / Image Eleven Productions, Inc.
Ce logo-rallye qui frôle le Trivial Pursuit, impose une conclusion : Jarmusch joue avec un objet intrinsèquement vain, dont il ne sait que faire. Et à la fin, les personnages - des fictions, on l’a bien compris - couperont les fils du marionnettiste, mais iront tout de même au bout d’une trame, conformément à ce que le destin leur assigne. Comme des morts-vivants.
En fait, sous couvert de rigolade cool pour gens cool et prétendument cultivés, le metteur en scène a bien du mal à cacher ses intentions. On a compris que tout doit converger vers un commentaire conclusif. Analogiquement, les zombies s’agrègent de leur démarche somnambulique vers le cimetière, pour entendre l’homélie finale. Cette leçon rassemble les sous-entendus disséminés dans les scènes et tous les morts-vivants réunis en communauté universelle semblent là pour ouïr cette voix off venue du fond des âges et du bon sens - étant entendu que, selon l’orthodoxie étalonnée par le cinéma de Romero, la créature bavante est une pauvre chose déconnectée de son cerveau matriciel, compulsivement reliée à son désir de consommation, et que l’on doit punir, en la décapitant. Acte absurde, par définition : on enlève une tête à qui n’en a pas.
- Copyright Abbot Genser / Focus Features / Image Eleven Productions, Inc.
On se souvient que le zombie de 1978 se jetait sur les produits vendus en hypermarché. Sa version 2.0 grommèle les mots « wifi » et « xanax ». D’où l’étonnement que le scénario n’ait pas assigné un passage devant une affiche électorale, où un célèbre homme d’affaires devenu président sourirait de toutes ses dents. Les undead auraient grogné "Trump" et la salle aurait gloussé d’aise, en se marrant. Au lieu de quoi, on se contente d’allusions, comme un passage obligé.
À d’autres vivants, qui regardent le film, il faut tout de même asséner des vérités indispensables sur le devenir de l’humanité, l’impéritie des gouvernants, la catastrophe écologique qui s’annonce. En fait, ce petit film, qui a l’air si laid-back, à l’intention des happy (très) few, a besoin d’une morale et d’un support vocal pour la souligner. Et que dit Jarmusch ? En gros, le monde est foutu, et le sage qui s’est retiré dans la forêt a sans doute bien plus de lucidité que les autres, dont nous sommes, pauvres spectateurs à qui l’on doit tout expliquer, après nous avoir tant divertis. Or, on se serait bien contenté de quelques rires, sans la plus-value inutile des commentaires. La consistance de certains effets comiques suffit, de même la nécessité que les protagonistes soient laissés à leur étrangeté - le croque mort et ses virages à angle droit nous agréent, ses maquillages post-mortem aussi (on penserait presque à la fin de La vie devant soi, en voyant ces cadavres grimés), ou encore le redneck qui ingurgite la pâtée de son animal domestique. Le reste, on l’envoie ad patres. Définitivement.
- Copyright Universal Pictures International France, 2019
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