Scénario sous pression
Le 18 mars 2019
Plutôt original dans son regard sur ce que peut éprouver un artiste dans un pays où il n’est pas bon de faire connaître ses préférences politiques, le scénario de cette comédie en arrive à être presque aussi fade que celui du soap opera dont il aime se moquer.
- Réalisateur : Sameh Zoabi
- Acteurs : Lubna Azabal, Maisa Abd Elhadi, Kais Nashif, Yaniv Biton
- Genre : Comédie
- Nationalité : Israélien, Français, Belge, Luxembourgeois
- Distributeur : Haut et Court
- Durée : 1h37mn
- Date de sortie : 3 avril 2019
Résumé : Salam, 30 ans, vit à Jérusalem. Il est palestinien et stagiaire sur le tournage de la série arabe à succès "Tel Aviv on Fire" ! Tous les matins, il traverse le même check-point pour aller travailler à Ramallah. Un jour, Salam se fait arrêter par Assi, un officier israélien, fan de la série, et pour s’en sortir, il prétend en être le scénariste. Pris à son propre piège, Salam va se voir imposer par Assi un nouveau scénario. Evidemment, rien ne se passera comme prévu.
Notre avis : De nos jours, les écrans sont au centre de nos modes de vie, aussi bien en temps de paix que de guerre. L’idée de Sameh Zoabi est alors de placer un programme télé très populaire à la base d’un regain de tensions dans cette région israélo-palestinienne tristement connue pour être explosive. Travaillant sur l’écriture d’un soap opera, Salam, son personnage principal, se retrouve victime de fortes pressions, symboles de la difficulté de s’affirmer en tant qu’artiste dans une pareille situation géopolitique délicate. Toutefois le caractère très romanesque de cette série vaut à ce Palestinien de se retrouver face à un Israélien dont la principale motivation est de faire plaisir à sa femme. Ce manichéisme en demi-teinte est d’ailleurs certainement symptomatique de la frilosité du cinéaste d’exalter l’un des deux partis en présence. Tel Aviv on Fire est, en cela, assez intéressant à voir, pour opposer son double niveau métafilmique, entre d’un côté Zoabi et son film, et, de l’autre, Salam et son feuilleton.
- Copyright Patricia Peribañez - Samsa Film - TS Productions - Lama Films - Artémis Productions
Il faut en effet creuser jusque dans cette série, qui prend place pendant la guerre des 6 jours en 1967, pour que l’opposition entre les Israéliens et les Palestiniens apparaisse comme pleinement exacerbée. Et pourtant, tous les enjeux qu’y voient ses spectateurs sont uniquement dans les relations amoureuses de son héroïne. Cette ironie peut même être perçue comme l’un des principaux ressorts comiques du long-métrage. Le personnage du producteur du soap, qui s’avère d’ailleurs être l’oncle de Salam, et dont on comprend qu’il était un vétéran de cette guerre, est lui-même celui dans lequel on peut observer cette consensualité pesante, le poussant à dissimuler son discours politique très marqué derrière une médiocrité artistique qui devient de plus en plus accablante.
La pression que Salam reçoit du militaire israélien en arrive d’ailleurs à participer pour beaucoup à cette qualité défaillante. C’est cette mécanique qui fait de Tel Aviv On Fire une pure comédie. Le choix de Yaniv Biton, connu en Israël en tant que stand-upeur, n’est d’ailleurs pas pour rien dans la volonté de Zoabi de donner de la légèreté aux menaces que reçoit quotidiennement son personnage. Ceci dit, malgré l’humour que peut lui apporter le comédien en jouant de sa nonchalance, la situation, et ses conséquences sur le tournage, ne font que se répéter inlassablement tout le long du film jusqu’à, fatalement, perdre leur pouvoir comique.
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Même si la comédie décline, elle le fait en parallèle à la fiction à l’intérieur d’elle-même. Mais l’intérêt métafilmique n’est certainement pas à chercher dans cette regrettable dégénérescence mais davantage dans la question de savoir si Sameh Zoabi cherche à dénoncer le poids du politiquement correct ou s’il en a été lui-même victime. En effet, c’est indubitablement sa volonté de plaire autant aux uns qu’aux autres qui a mené son scénario à ne pas oser se montrer trop mordant et à se concentrer sur une love interest des plus convenues. Le résultat est donc un objet assez inhabituel. D’abord sarcastique et prometteur dans son discours sur le pouvoir des images, le long-métrage vire hélas à la farce potache, sans véritablement qu’on en pressente l’intérêt.
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Fractale 21 avril 2019
Tel Aviv on fire - la critique du film
Je rejoins complètement la critique faite : j’attendais quelque chose de plus consistant compte tenu du sujet, j’ai vu une comédie légère ne manquant pas de charme.