Le 20 décembre 2020
- Dessinateur : Anna Mill
- Collection : Outsider
- Genre : Science-Fiction
- Editeur : Delcourt
- Famille : Roman graphique
- Date de sortie : 30 septembre 2020
Chambardement des genres par un album de forme carré… mais qui ne l’est pas !
Résumé : Fin, c’est son nom, est une jeune femme dont on ne sait si elle est brillante ou à son crépuscule. Elle-même semble l’ignorer, puisqu’elle a été déconnectée du réseau virtuel, et semble-t-il, du monde réel également. Entre la mémoire qu’elle s’efforce de retrouver, les amis et ennemis qu’elle s’efforce de croiser, le monde s’écoule, voire s’écroule très rapidement…
Grande claque graphique, Square Eyes est, d’un point de vue scénaristique, un imbroglio dystopique assez confus au premier abord. Cette société d’un futur avancé (beaucoup ? pas trop ?) semble orientée vers les plaisirs, rappelant par certains aspects un ou deux pages du début de l’Incal, vers le virtuel évidemment, critiquant les dérives des réseaux sociaux et géants du numérique. Dire que l’autrice Anna Mill a construit son épopée relève de l’euphémisme, et savoir qu’elle a un passif d’architecte n’est pas anodin pour comprendre ce monde qui s’élève, même si l’on n’est plus sur la même génération que les Schuiten et Peeters. En effet, Anna Mill a forcément dû mettre une part d’elle-même, ne serait-ce que dans son héroïne, jolie allégorie de la génération Millenial coincée dans l’abîme d’une société dont elle rejette les fondations… Au début du moins, puisque ensuite, on comprend, on appréhende d’ailleurs l’intelligence de cette Fin, dont le nom (est-ce End dans sa version originale ?) paraît annoncer beaucoup de choses…
Luke Jones, Anna Mill / Delcourt
Revenons à la claque graphique, puisque le scénario, qui mêle rêve, virtuel et un peu de réalité tout de même, est déjà à la hauteur d’un bon Orwell, mais ce que l’on retient, ce sont les entrelacs du dessin, qui jongle entre les volontés, choisissant tantôt un style éthéré comme un rêve éveillé et diffus, tantôt l’interface précise d’un ordinateur ou smartphone amélioré, intégré à la rétine… Malgré cela, le style est installé, faisant baigner dans toute cette œuvre au format imposant et carré une lumière étrange, comme une aube sale, que des yeux fatigués ou mal réveillés auraient à scruter, à l’image du ressenti de l’héroïne. Par la suite, cette aube laisse place à un monde qui alterne couleurs trop présentes du réseau et gris trop terne du béton de la réalité.
Luke Jones, Anna Mill / Delcourt
En plus de sa forme qui en fait un volume original dès sa couverture, Square Eyes profite également sa calligraphie déroutante et son dessin raffiné pour s’affirmer comme un monument du roman graphique, avec une anticipation scénaristique recherchée et un style exquis.
256 pages - 27,95€
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Galerie photos
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