Ballade dans le Maryland
Le 26 juillet 2018
Le film paraît faire du surplace, mais c’est son héros, et à travers lui toute la middle-class américaine, qui est coincé dans une forme de médiocrité. Un constat qui fait froid dans le dos.
- Réalisateur : Matthew Porterfield
- Acteurs : James Belushi, McCaul Lombardi, Zazie Beetz
- Genre : Drame social
- Nationalité : Américain, Français
- Distributeur : JHR Films
- Durée : 1h41mn
- Titre original : Sollers Point
- Date de sortie : 29 août 2018
- Festival : Champs Elysées Film Festival 2018
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Résumé : Sollers Point, aujourd’hui. Après une absence forcée, Keith, 24 ans, retourne habiter chez son père, il retrouve Sollers Point, son quartier de Baltimore de plus en plus marqué par le chômage, la violence et la ségrégation. Il y retrouve aussi ses démons.
Notre avis : « Celui qui ne choisit pas la vérité, sa vie n’est que destruction ». Ce sont les mots que professe, vaguement, un chef de gang au jeune Keith. Même s’il n’est pas facile de prendre au sérieux cet individu à cheval entre le gourou hippie et le skinhead belliqueux, le parcours autodestructeur que va suivre son interlocuteur ne peut que lui donner raison. Il faut reconnaître que tous les éléments de la vie de Keith semblent liés contre lui pour mener ses efforts de réinsertion dans l’impasse. A moins que son destin ne soit le fait d’un milieu social particulièrement difficile à vivre. Matthew Porterfield a la délicatesse de ne pas répondre à cette question en s’épargnant le moindre misérabilisme qui aurait assurément transformé son film en une chronique politique, éminemment consensuelle.
- Tous droits réservés - JHR Films
Mais le piège qu’a surtout réussi à éviter Porterfield est celui du jugement moral apposé à son personnage principal. En prenant, tel qu’il le fait, un certain recul sur les errances de Keith, le réalisateur dresse une peinture alarmante de la situation du quartier qui prête son nom au film. En posant sa caméra dans cette zone pavillonnaire construite autour d’une zone industrielle qui a depuis fermé, il poursuit une trilogie (la clôt-il ? Seul l’avenir nous le dira), entamée avec Putty Hill et I Used to Be Darker, consacrée à sa ville natale de Baltimore, que l’on a peu l’occasion de voir au cinéma, à l’exception récurrente des œuvres de John Waters. Quand bien même son approche passe par une mise en scène désormais très convenue dans le cinéma indépendant américain, elle profite d’une retenue émotionnelle qui permet à l’observation très documentée des conditions de vie des personnages d’apparaître comme un enjeu artistique plus important que la volonté de suivre les péripéties d’un seul d’entre eux.
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Un tel parti pris, proche du néoréalisme européen, a inévitablement pour conséquence d’aboutir à un film que l’on suit tout en espérant malgré tout que Keith, le personnage principal, traverse des aventures qui nous assurent le spectacle. Peut-on alors se réjouir que la violence fasse, elle aussi, partie du quotidien de ce jeune homme ? C’est en tout cas elle qui permet à certains passages de nous offrir leur lot d’action, qui n’a en l’occurrence rien de divertissante. De voir Keith contraint d’hésiter à reprendre les armes pour se débarrasser de ceux-là même qui l’avaient protégé en prison ne fait que creuser plus profond encore cette tragédie, et rajoute surtout plus de noirceur à cette peinture d’une Amérique qui semble décidément avoir tout perdu de sa grandeur passée. Le constat sociologique est affligeant ; l’absence même de résolution vers laquelle la narration semble s’orienter pourrait surprendre les spectateurs pour qui un film s’achève automatiquement par un happy-end, en dit long sur cette situation précaire.
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