SISU - De l’or et du sang - Jalmari Helander - critique

Critique : Jalmari Helander n’a pas dû trouver grand monde pour le contredire quand il a décidé de situer son vigilante movie dans la Finlande occupée de 1944. Le Troisième Reich a en effet cet avantage narratif de représenter une sorte d’horizon indépassable dans la vilénie (in)humaine, leçon bien retenue par le cinéma. Ce mauvais shoot’em up qu’est Sisu ne propose rien d’autre : des nazis tués au fusil, en marchant sur une mine, au couteau… Avec, dans le rôle du justicier, L’Immortel (Jorma Tommila, sosie officieux de Sam Shepard), un Finlandais revenu de tout (on devine que sa famille a été assassinée) avec un cœur gros comme ça ; il refile même des mitraillettes à des jeunes femmes captives. Si ça, ce n’est pas de l’empowerment !

© 2023 Sony Pictures Entertainment Inc. Tous droits réservés.

Le problème n’est pas tant que le film trivialise la Seconde guerre mondiale pour raconter son histoire. To be or not to be, La Grande vadrouille, Les Aventuriers de l’arche perdue peignaient eux aussi les nazis à gros traits pour les besoins de leurs récits. La différence, c’est que Lubitsch, Spielberg ou Oury ne s’en servaient pas comme d’un cache-misère bien commode pour masquer tout le reste. Ou plutôt tout ce qui manque ici. Sisu, d’ailleurs, ne va même pas au bout de son programme (« De l’or et du sang » promettait le sous-titre français) : de métal précieux, il ne sera question qu’au début, pour mettre le récit en branle. Dommage : comme dans les pépites De l’or pour les braves ou Les Rois du désert, il y avait pourtant des choses à dire sur l’âpreté au gain et l’opportunisme en temps de guerre.

Cette vacuité narrative en devient même très embêtante lorsqu’elle tire le portrait d’un proto-John Wick trucidant seul des cohortes d’officiers allemands – alors que la bien réelle guerre de Laponie était un poil moins carnavalesque que cela. Malgré lui peut-être, Sisu sape le minutieux travail d’historiographie entrepris par d’autres œuvres, y compris de fiction. Allez, on vous laisse, on va (re)revoir Requiem pour un massacre.