Le temps d’un récit
Le 17 décembre 2003
Saltatempo, fable moderne, narre la vie d’un petit Italien à la croisée de plusieurs époques. D’une tonalité guillerette, le roman traite en arrière-fond d’une période attristée par l’exode rural et la montée du chacun pour soi. Une vraie jouissance des tout petits délices et erreurs de la vie, avec un rire en demi-teinte.
- Auteur : Stefano Benni
- Editeur : Actes Sud
- Genre : Roman & fiction
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Saltatempo, sauteur de temps, "escarpagne" la montagne. Il la dévale à toute allure pour rejoindre l’école dans la vallée. Soudain, surgit une divinité dionysiaque, avec son rire tonitruant et son aura scatologique... L’enfant se voit alors attribuer une montre magique. Saltatempo vit comme tout un chacun, avec ce petit pouvoir supplémentaire, celui de regarder dans le passé ou de lire l’avenir sur sa bimontre. Ainsi commence l’histoire de ce petit Italien au parcours tortueux.
Stefano Benni cultive dans son Saltatempo une parenté évidente avec Pagnol. On en percevrait presque un accent transalpin entre les pages. Plus que des personnages, on y côtoie des figures. Et dans chaque époque traversée par le héros, une galerie de portraits réjouissants anime le récit. Copains de classes, adultes du village, collègues du journal, chacun rivalise de caractère.
Roman initiatique, Saltatempo décrit aussi ces années où les communistes italiens se battaient pour ne plus jamais laisser resurgir le fascisme, blessés par un capitalisme qu’ils ne comprennent pas. Le staliniste libertaire côtoie pourtant sans peine le menuisier spirituel... Du match de foot entre le village de Saltatempo et le bourg religieux d’à côté (quand le bon Dieu s’en mêle) aux luttes entre le candidat bonhomme et le maire-député véreux, les camps s’affichent délicieusement manichéens.
Et cette histoire de sauts dans le temps dont il est question au début ne condense pas le vrai sujet du roman. La bimontre permet tout juste à l’auteur quelques décalages (des sortes d’anachronismes qui n’en sont pas vraiment). Autant de brèves touches d’humour, dotant le héros naïf d’une lucidité parfois douloureuse. Stefano Benni montre ici un séduisant talent de conteur aigre-doux. Léger et doucement critique, Saltatempo sautille sur les montagnes d’une Italie bien vivante.
Stefano Benni, Saltatempo, (Saltatempo, traduit de l’italien par Marguerite Pozzoli, Actes Sud, 2003, 414 pages, 23 €
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