Le 6 avril 2024
En dépit d’une palette d’acteurs très talentueux et d’un sujet très original, Stéphanie Di Giusto semble avoir perdu l’entrain et la beauté de son premier long, La danseuse.
- Réalisateur : Stéphanie Di Giusto
- Acteurs : Benoît Magimel, Gustave Kervern, Benjamin Biolay, Guillaume Gouix, Nadia Tereszkiewicz, Lucas Englander
- Genre : Romance, LGBTQIA+, Drame historique
- Nationalité : Français
- Distributeur : Gaumont Distribution
- Durée : 1h55mn
- Date de sortie : 10 avril 2024
- Festival : Festival de Cannes 2023
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– Festival de Cannes 2023 : sélection officielle, Un Certain Regard
Résumé : Rosalie est une jeune femme dans la France de 1870 mais elle n’est pas comme les autres et cache un secret : depuis sa naissance, son visage et son corps sont recouverts de poils. Elle est ce qu’on appelle une femme à barbe mais n’a jamais voulu devenir un vulgaire phénomène de foire. De peur d’être rejetée, elle a toujours été obligée de se raser. Jusqu’au jour où Abel, un tenancier de café acculé par les dettes, l’épouse pour sa dot sans savoir son secret. Mais Rosalie veut être regardée comme une femme, malgré sa différence, qu’elle ne veut plus cacher. Abel sera-t-il capable de l’aimer quand il découvrira la vérité ?
Critique : Cela commence par un mystère. Rosalie prie secrètement pour que le mari auquel elle est promise dans un village voisin l’aime. On est bien étonné car la jeune fille rayonne de beauté, elle est cultivée et intelligente grâce à un l’éducation d’un père attentif et aimant. Elle finit donc par être présentée à un cafetier un peu rustre, mais sympathique, étouffé par les dettes que lui réclame un riche propriétaire d’une usine qui emploie tous les habitants du village. Et l’on comprend mieux pourquoi car, à peine mariée, quand elle lui supplie de lui faire un enfant, on découvre que tout son corps est tapissé de poils.
- Copyright 2023 TRESOR FILMS - GAUMONT - LDRPII - AR TÉMIS PRODUCTIONS
Il y aura longtemps qu’on n’aura pas vu un film historique aborder une question aussi sensible que celle de la discrimination et de ce qui faisait que certaines femmes étaient exposées dans des foires. En ce sens, il s’agit d’un choix de sujet tout à fait contemporain qui aurait eu toute sa place dans un univers d’aujourd’hui où l’on n’a de cesse d’interroger le genre, la binarité, tout en cultivant la pression des images sur les réseaux sociaux notamment. Rosalie en l’occurrence se passe à la fin du dix-neuvième siècle, dans un village breton, très beau, constitué de longères qui se jouxtent les unes les autres. Tout le cachet du film romantique est présent dans ces bâtisses de pierres saillantes, dans les chemins boueux, et le ciel bleu immense qui borde les collines. Sans le savoir, on est peut-être dans un roman de George Sand où la poésie rurale alimente le mythe romantique.
Mais l’émerveillement ne dure pas longtemps. Le problème essentiel du film réside à la fois dans l’académisme du traitement et le positionnement de personnages campés dans des caractères figés et stéréotypés. Le charisme supposé de la jeune Rosalie ne fonctionne pas du tout, et l’on peine à comprendre comment dans un village aussi reculé, les velléités pilaires d’une femme génèrent autant de clients dans la taverne. En réalité, le récit fonctionne par blocs, passant du rejet à l’acceptation totale de la différence, puis de nouveau au rejet, sans aucune nuance entre les parties. On n’est jamais loin de la caricature, même si les comédiens font tout pour rendre les protagonistes crédibles et attachants. La grâce tragique de La danseuse, premier long métrage de la réalisatrice, a disparu au profit du portrait assez binaire d’une femme à barbe qui tente de faire de sa différence un atout économique et social.
En tous les cas, on espère que le troisième long-métrage de la Stéphanie Di Giusto sera plus inspiré, avec peut-être un récit dans la France contemporaine.
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