Rigidité filmographique
Le 24 mars 2014
Retour sur l’un des prix du jury du dernier festival de Gérardmer. Le coup d’essai du jeune réalisateur hongkongais Juno Mak pêche par sa trame trop poussive mais regorge toutefois de quelques belles trouvailles visuelles.


- Réalisateur : Juno Mak
- Acteurs : Chin Siu-Hou, Kara Hui, Anthony Chan, Lo Hoi-pang
- Genre : Drame, Fantastique, Épouvante-horreur, Arts martiaux - Combats
- Durée : 1h41mn
- Titre original : Geung Si
- Festival : Gérardmer 2014

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– Prix du jury Gérardmer 2014
Retour sur l’un des prix du jury du dernier festival de Gérardmer. Le coup d’essai du jeune réalisateur hongkongais Juno Mak pêche par sa trame trop poussive mais regorge toutefois de quelques belles trouvailles visuelles.
L’argument : Ancienne vedette de cinéma abonnée aux rôles de chasseurs de vampires, Chin Siu-ho vit désormais une longue traversée du désert. Alors que le destin s’acharne contre lui, il prend une chambre d’hôtel, la 2442, pour y mettre fin à ses jours. Son geste est interrompu par l’étrange présence autour de lui d’autres résidents que Siu-ho ne tarde pas à trouver comme loin d’être normaux...
Notre avis : Juno Mak est un touche à tout, à la fois chanteur, producteur de disques et comédien, le voici qui signe ses premiers pas derrière une caméra avec Rigor Mortis. Ce film produit par Takashi Shimizu (The Grudge) s’inscrit comme un hommage aux films de kung-fu et vampires hongkongais des années 80 comme Mr. Vampire. Difficile de le ranger dans une case puisqu’on se retrouve ici avec pléthore de thèmes abordés : les fantômes, les vampires, le folklore asiatique imprégné de mysticisme. Un croisement des genres payant aux yeux du jury de l’édition 2014 du festival international du film fantastique de Gérardmer qui lui décerna son prix (ex-aequo avec The Babadook).
Nous suivons tout d’abord le destin pas très rose de Chin Siu-ho, une ex-gloire du monde du cinéma qui interprétait essentiellement des rôles de chasseurs de vampires. Mal dans sa peau, il décide de prendre une chambre d’hôtel pour mettre fin à ses jours. Mais la chambre choisie, investie d’une présence surnaturelle, va venir perturber ses plans. Au moment de se donner la mort, l’un des occupants de l’immeuble surgit pour empêcher son acte. C’est avec torpeur que Chin Siu-ho va alors découvrir les sombres secrets enfouis à l’intérieur des murs de cette résidence peuplée d’étranges habitants. Juno Mak tisse tout un univers très personnel autour de ce début d’intrigue et ne se gêne pas pour multiplier les effets de style. L’esthétique globale du long métrage est sans conteste l’attribut essentiel apporté par le cinéaste hongkongais. Les tons gris et verdâtres qui imbibent la pellicule sont sans cesse sublimés par une mise en scène bourrée d’idées qui se révèle très classieuse (ternie cependant par quelques effets numériques qui ne se montrent pas toujours finement intégrés).
En contrepartie, le récit initié par cette nébuleuse histoire de revenants a beaucoup de mal à prendre (l’interprétation fichtrement plate du casting n’est pas vraiment là pour aider non plus...). Ça bavarde beaucoup pour pas grand-chose dans ce scénario décousu qui délaisse petit à petit son personnage principal au profit d’autres sous-intrigues. On vient à s’ennuyer poliment durant les trois quarts du film en dépit de quelques rares scènes de combats filmées avec inventivité et un vrai sens du style. Le duel final et son épilogue sur fond neigeux adoptent une portée sombrement onirique qui révèle encore une fois une belle audace.
On retiendra du premier essai de Juno Mak, une magie visuelle et une envie sincère de se démarquer des récentes productions de la J-Horror. Mais en dehors de cette générosité esthétique, le film se montre fâcheusement miné par un scénario sans grande substance ainsi que par des personnages et enjeux qui laissent aussi froid qu’un cadavre de deux jours.