Rien ne se passe jamais comme prévu - La chronique BD

Sur certains continents si vous n’avez pas d’enfant, c’est que le mauvais œil est sur vous.
En Europe, on reste plus modéré, même si avoir un enfant représente l’idéal de la plupart des couples.
Et surtout en Europe, nous avons la chance d’avoir une médecine qui peut palier ce "problème" mais il n’en reste pas moins que c’est une démarche longue et éprouvante.

Sous sa couverture blanche et proprette, Rien ne se passe jamais comme prévu se présente comme un ouvrage tout mignon et ravissant, à l’image d’un nouveau-né.
Il est beau et stylisé avec un titre irisé de mauve et d’argent … mais de qui tient-il sa petite bouille d’histoire ? De la scénariste ou de la dessinatrice ? Réponse à la fin … soyez attentif.

L’intérieur de l’ouvrage se découvre en noir et blanc, parsemé des couleurs de l’arc-en-ciel dont on apprendra en notes que les auteures se sont inspirées de la technique de Robert Plutchik, psychologue américain pour alimenter leurs dessins : chaque couleur et déclinaison étant reliée à une émotion.

Tout au long du livre les personnages se dédoublent afin de dire tout bas ce qu’ils aimeraient affirmer tout haut et prennent en grade coloré à cette occasion. Est-ce pour mieux constater la vaste hypocrisie de tout ce qui se passe autour des couples ne pouvant avoir un bébé ? Les tabous liés à cette vacuité du corps ? Les stéréotypes ? Dénoncer le manque de tac de certains psys comme celui d’Elena qui pense que les hommes sont là pour nous épauler en toutes circonstances ?
Le trait d’Emma Tissier est vif et sûr mais ne reflète pas vraiment l’abattement que pourrait ressentir un couple tout au long de ce parcours du combattant dans lequel il s’embrigade après des résultats d’infertilité.

Gus - l’homme du couple - n’est pas beaucoup représenté dans les moments d’émotion et Elena semble toujours très heureuse de l’évolution des choses et prête à affronter les étapes suivantes sans broncher. On aurait aimé plus de présence masculine dans ce long chemin semé de PAM et autres examens médicaux …

De plus les repères chronologiques sont assez vagues malgré le calendrier à respecter pour les injections de Madame, ses menstruations etc…
Ce livre est surtout axé sur le ressenti de la femme, blindée d’hormones, les organes génitaux en effervescence prête à en découdre avec le premier venu qui lui ferait n’importe quelle réflexion.
Mais elle reste zen…
L’attente des "non-règles" c’est un peu comme un plat que l’on cuisine, démarche biologique oblige…
On est quelque peu plongé dans le cliché du couple bobo trentenaire, qui aime boire, manger, sortir avec ses nombreux amis et dont ces derniers ont toujours leur mot à dire en matière d’insémination. Oui parce qu’on connait tous un cousin, une amie, le frère de la tante de son ex qui est ami avec un tel … qui a eu le même problème et pour qui ça a marché !

Elena se transforme en super-héroïne du quotidien : elle encaisse les tentatives infructueuses de traitement aux hormones, les prélèvements, les piqures et réflexions sans jamais exploser et fait la chasse aux perturbateurs endocriniens dans sa maison, sait-on jamais, il n’est peut-être pas trop tard pour que ses ovaires se réveillent.

Mais peut-on vivre heureux sans enfant(s) ? La question se pose vaguement aux protagonistes qui pensent plutôt investir dans un animal de compagnie et puis l’adoption ? Oh c’est tellement long….
L’ouvrage se veut drôle mais il laisse un arrière-goût un peu vide de sens…
La fin est originale et inattendue (même si on se fait une idée du dénouement de cette longue histoire au détour des remerciements de l’une des auteures).